Éducation technologique, formation professionnelle et lutte contre la pauvreté
Adel Bouras, Jean Sylvain Bekale Nze, Jacques Ginestié, Bernard Hostein éditeurs
Sous le patronage de Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de la Technologie de la République Tunisienne; Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture United Nations for Éducation, Science and Culture Organisation
Partenaires
Il a été réalisé grâce à l’aide et aux financements des partenaires suivants :
- Institut Supérieur de l’éducation et de la formation continue Tunis
- École Supérieure des Sciences et Technologies de Tunis Tunis
- Association Tunisienne de Pédagogie Universitaire Tunis
- École Normale Supérieure de l’Enseignement Technique Libreville
- Institut Universitaire de Formation des Maîtres Aix-Marseille
- UNESCO Paris
- BREDA-UNESCO Dakar
- Ministère des affaires étrangères, Institut Français de Coopération Tunis
Comité scientifique
Président
- Ginestié Jacques (Aix-Marseille Université ; France)
Membres :
- Virginie Albe (ENFA de Toulouse ; France)
- Marcus Balintulo (Université Cape Teknicon ; Afrique du Sud)
- Jean Sylvain Bekale Nze (ENSET de Libreville ; Gabon)
- Tawfik Benabdallah (ENSET ; Algérie)
- Ahmed Ben Cheikh Larbi (ESSTT ; Tunisie)
- Nadia Benjelloun (LIRDIST ; Maroc)
- Teeluck Bhuwanee (UNESCO-BREDA ; Ile Maurice)
- Émile Bih (IPNETP ; Côte D’Ivoire)
- Habib Bouchriha (FST ; Tunisie)
- Adel Bouras (ISEFC Tunis et ISET Nabeul ; Tunisie)
- Jacques Brisoux (Université de Montréal à Trois-Rivières ; Canada)
- Ahmed Dhouib (ENIT ; Tunisie)
- Bernard Hostein (IUFM d’Aquitaine ; France)
- Hervé Huot-Marchand (UNESCO-BREDA ; Sénégal)
- Jilani Lamloumi (ESSTT ; Tunisie)
- Christian Mouity (ENSET Libreville ; Gabon)
- Néjib Talmoudi (CENAFFIF ; Tunisie)
- Turid Trebbi (Université de Bergen ; Norvège)
Comité d’organisation
Président
- Adel Bouras (ISEFC, ISET Nabeul, Tunisie)
Coordonnateurs
- Jean Sylvain Bekale Nze (RAIFFET, ENSET Libreville, Gabon)
- Ahmed Ben Cheikh Larbi (ESSTT, Tunisie)
- Jacques Ginestié (IUFM Aix-Marseille, France)
Membres
- Lamia Abbassi (ISEFC, Tunisie)
- Hassine Ben Fekih (ISEFC, Tunisie)
- Chiraz Ben Kilani (ISEFC, Tunisie)
- Adel Ben Taziri (UVT, Tunisie)
- Helmi Ahmed El Kamel (UCP, Tunisie)
- Ghassen Hanchi (ISEFC, Tunisie)
- Tahar Khaldi (IMSET, Tunisie)
- Ilhem Mediouni (ISEFC, Tunisie)
- Mondher Tangour (ESSTT, Tunisie)
Rapport final du colloque
Ce rapport a été élaboré par Babacar Gueye (rapporteur général) et Virginie Albe, Alexis Belibi, Hervé Huot-Marchand, Bernard Hostein, Christian Mouity (rapporteurs). Placé sous le patronage de Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de la Technologie, le second colloque international du RAIFFET sur le thème Éducation Technologique, Formation Professionnelle et lutte contre la pauvreté (EFTP) organisé par l’ISEFC en collaboration avec d’autres partenaires, s’est tenu à Hammamet du 15 au 18 Avril 2008. Ont participé à ce colloque environ une centaine de participants dont des représentants d’organisations internationales telles que l’UNESCO, des chercheurs en éducation et en didactique des disciplines, des personnels chargés de l’éducation, des étudiants, des institutions de formation. Les participants viennent de trois continents représentés par dix-huit pays.
Cérémonie d’ouverture
La cérémonie d’ouverture a enregistré les allocutions prononcées par les personnalités suivantes :
- Monsieur Adel Bouras, secrétaire général du colloque
- Monsieur Jean Sylvain Bekale Nze, Président du RAIFFET
- Monsieur Jacques Ginestié, Président du Comité scientifique
- Monsieur Teeluck Bhuwanee, Représentant UNESCO
- Monsieur Mohamed Kameleddine Gaha, Directeur de l’ISEFC
- Monsieur Jilani Lamloumi, Directeur général des études technologiques, MEN
- Monsieur Ahmed Hedhli, Directeur de l’ESST
Toutes les intervenants ont noté dans leurs interventions le rôle de plus en plus prédominant que doit jouer l’EFTP dans la lutte contre la pauvreté dans le monde. En effet, on a pu relever que le développement durable devait s’enraciner socialement et s’inscrire dans une perfective d’évolution, en s’appuyant sur les acquis qu’apporterait aux jeunes l’EFTP dans un monde de plus en plus difficile. Les intervenants ont tous exprimé leur espoir de voir les débats du présent colloque apporter un souffle nouveau aux différentes actions engagées par les pays africains en matière d’EFTP.
Réunion du conseil scientifique
Après la cérémonie d’ouverture, le conseil scientifique s’est penché sur la conduite des travaux, l’instauration du palmarès des jeunes chercheurs, la désignation des rapporteurs, Babacar Gueye, Alexis Belibi, Christian Mouity, Virginie Albe, Hervé Huot-Marchand, Bernard Hostein. Le rapporteur général est Babacar Gueye.
Rapport final du colloque
Les travaux
Les travaux scientifiques du colloque se sont déroulés dans un esprit de partage, d’échanges fructueux. Les dits travaux ont été organisés en séances plénières et en ateliers autour des quatre thèmes suivants :
- Acculturation technologique et promotion de l’égalité des chances,
- Quelle formation professionnelle pour accompagner le passage d’une activité de subsistance à la petite entreprise ?
- Quelle relation formation emploi pour une solution éducative et d’insertion formation ?
- Organisations scolaires et compétences professionnelles.
Au total, quatre tables rondes, une conférence plénière sur l’impact de l’implantation d’organisations d’éducation technologique et de formation professionnelle dans la lutte contre la pauvreté. Seize ateliers et soixante-dix communications ont analysé les enjeux du développement de l’EFTP face à la lutte contre la pauvreté. Le concept de la pauvreté est particulièrement vif ; il pose quelques présupposés politiques, idéologiques qui devraient aussi faire l’objet de questionnements et de réflexions.
Le thème I – Acculturation technologique et promotion de l’égalité des chances – a donné lieu à une première table ronde portant sur des expériences contribuant à une acculturation technologique. Étant entendu que l’émergence d’une éducation technologique pour tous est aussi une condition importante du développement, il s’agit de procéder à des ruptures qui permettront par exemple d’introduire dans l’enseignement général une éducation technologique permettant de construire des connaissances de base et de développer une culture de la citoyenneté ancrée sur le monde contemporain tout autant que sur les enjeux de développement durable. Se posent alors les questions liées aux programmes de formation, aux méthodes d’enseignement, au développement des passerelles entre les différents niveaux de formations. L’adaptation des référentiels de formation aussi bien aux réalités locales qu’à une véritable logique de métiers ou au renforcement des partenariats avec les entreprises apparaît comme essentielle. Les intervenants ont insisté sur la nécessité de réduire le déphasage entre la théorie et la pratique et d’intéresser davantage les apprenants y compris les filles aux savoirs technologiques dès l’école de base.
Les interventions du thème 2 – Quelle formation professionnelle pour accompagner le passage d’une activité de subsistance à la petite entreprise – ont mis l’accent sur l’évolution technologique. Ces nécessités de changement imposent des évolutions des curricula afin de mieux prendre en compte les dynamiques nécessaires à la création par les élèves de leur propre entreprise. Il s’agit de sortir des logiques de l’État providence et donc de mettre en valeur les petits métiers tout autant que l’encadrement de l’économie informelle. Cependant les participants ont également admis, au regard de la mondialisation, que chaque pays doit former ses ressources humaines par rapport à son contexte, en tenant compte de ses besoins économiques.
Les interventions proposées sur le thème 3 – Quelle relation formation emploi pour une solution éducative et d’insertion – portaient essentiellement sur l’articulation formation-emploi. Cette articulation a été analysée à travers différents comptes rendus d’expériences, de dispositifs qui ont été construits ça et là dans le but de rapprocher davantage la formation et l’emploi. Les échanges ont porté sur la nécessité d’améliorer la connaissance sur l’emploi, clés d’une insertion rapide des formés notamment des filles dans le monde du travail et donc d’une lutte contre le chômage ou le sous emploi. Cette articulation entre formation et emploi révèle la faiblesse générale des contenus de formation, notamment en matière de culture générale ou de professionnalité et d’employabilité des jeunes. Les débats ont permis d’insister sur la connaissance préalable du milieu professionnel, connaissance qui doit être renforcée par des relations fortes et durables de partenariat entre l’école et l’entreprise. Cela suppose une amélioration significative du suivi d’indicateurs fiables, durables et pertinents, seuls susceptibles de garantir un bon pilotage des formations.
Les exposés du thème 4 – Organisations scolaires et compétences professionnelles – ont porté sur la présentation d’innovations et d’expérimentations pédagogiques dans l’EFTP. Les expériences relatées touchent aussi bien la formation des élèves que celle des enseignants, des formateurs ou des cadres de l’éducation. Le développement d’une ingénierie didactique propre aux contextes scolaires, sociaux et professionnels est un des éléments essentiel de développement d’un EFTP de qualité et répondant aux besoins sociaux et individuels. Le travail en réseau devrait faciliter les échanges sur des méthodes alternatives d’enseignement et de formation tels que l’enseignement à distance, l’approche par les compétences ou l’enseignement en alternance. Ce travail ne saurait être à la hauteur des ambitions d’un tel réseau qu’au travers du développement de recherches socialement finalisées par les besoins de la formation et de l’éducation. La contextualisation, notamment en regard des besoins, des ressources et de l’environnement de chaque institution est un des éléments clé de la pertinence des solutions proposées. Par ailleurs, les participants ont tous souligné l’importance de travailler sur une plus grande cohérence et donc un rapprochement entre les cursus d’éducation générale et les dispositifs d’EFTP. Enfin, la maîtrise des TICE par les enseignants a été jugée indispensable afin de soutenir les initiatives qui permettent de développer la modélisation et de la simulation.
La conférence plénière sur l’impact de l’implantation d’organisations d’éducation technologique et de formation professionnelle dans la lutte contre la pauvreté. À partir des présentations des études conduites par l’Unesco et le Breda et une illustration de ces études sur le cas particulier du Gabon, les discussions ont porté sur un état des lieux de l’EFTP en Afrique à partir des données disponibles et sur la manière d’atteindre les objectifs fixés par les organisations internationales et reprises par les gouvernements. S’il ressort clairement que le développement de l’EFTP peut être un moyen de lutte contre la pauvreté, il n’en demeure pas moins que le rôle et la manière de jouer ce rôle ne font pas l’unanimité des participants ; les discussions font ressortir une hétérogénéité des positions entre un plus grand pilotage centralisé par l’état et un encouragement fort des initiatives locales.
Clôture des travaux
La séance de clôture a été marquée par la remise de prix afin d’encourager la recherche en éducation technologique et sur la formation professionnelle en Afrique. Six participants ont été nominés : Mohamed-Ali Bassoumi (Tunisie), Nawal Khelalfa (Algérie), Ernest Kiamba (Cameroun), Marie-Zoé Mfoumou (Gabon), Venant Nyandwi (Burundi), Frédéric Ouattara (Burkina Faso). Trois prix ont été décernés :
- Prix du jeune espoir : Frédéric Ouattara (Burkina Faso)
- Prix spécial du jury : Marie-Zoé Mfoumou (Gabon)
- Grand prix : Mohamed-Ali Bassoumi (Tunisie)
La séance de clôture s’est ensuite articulée autour des interventions de Jacques Ginestié (président du comité scientifique), Adel Bouras (secrétaire général du colloque), Teeluck Bhuwanee (Breda-Unesco), Jean Sylvain Bekale Nze (président du RAIFFET), Mohamed Kameleddine Gaha (directeur de l’ISEFC et représentant Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur).
Dans son intervention, Jacques Ginestié souligne la qualité des travaux présentés et leur réel intérêt dans la perspective de développement de l’EFTP en Afrique. Il confirme le rôle que peut et que doit jouer le RAIFFET dans ce développement ; il insiste sur la nécessité de structurer divers projets proposés au cours du Colloque par plusieurs membres, afin que le RAIFFET s’engage dans d’autres actions concrètes et ne se limite pas aux conférences internationales qui doivent rester un lieu de rencontre permettant de faire un point sur les projets en cours et les projets à venir. Adel Bouras, au nom du comité d’organisation, remercie l’ensemble des participants pour leur contribution au succès de cette manifestation. Il souligne l’impact de la manifestation sur le développement des EFTP, plus particulièrement en matière de recherches sur ces domaines trop souvent négligés, et se félicite de la contribution de la Tunisie au travers de l’ISEFC à cette aventure scientifique. Teeluck Bhuwanee repositionne le rôle du RAIFFET dans la perspective des actions de l’Unesco et plus particulièrement celles développées en Afrique par le Breda. Il manifeste sa satisfaction de voir se structurer un réseau qui répond à un réel besoin et une forte demande, pour peu que ce réseau s’organise dans un plan d’actions qui ne se limite pas à l’organisation d’un colloque périodique. Notamment, il insiste sur la nécessité pour le RAIFFET de se doter d’un outil de communication moderne tel un site Web et de s’engager dans un programme d’actions, par exemple, de formation de formateurs. Jean Sylvain Bekale Nze manifeste la nécessité de développer les échanges inter-institutions en Afrique autour des EFTP car c’est la seule réponse possible pour accompagner le développement de ces formations et, au-delà, des niveaux de qualification de la jeunesse en Afrique. Il insiste sur le fait que le RAIFFET doit fournir des opportunités à des élèves, des étudiants, des enseignants ou des chercheurs africains pour améliorer leurs connaissances, leurs compétences, leurs domaines d’expérience au travers d’une mobilité organisée dans des échanges inter-établissements. En tant que président du RAIFFET, il affirme sa volonté de conduire cette initiative sur les voies de l’excellence et de la qualité des EFTP en Afrique. Mohamed Kameleddine Gaha, directeur de l’ISEFC et représentant Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur, remercie au nom du Ministre et en son nom propre, tous les participants qui sont venus en Tunisie. Cette manifestation est une conférence d’importance, du fait du fort investissement des participants qui sont venus de tant de pays africains sur un thème aussi crucial pour ces sociétés que celui de l’éducation technologique, de la formation professionnelle et de la lutte contre la pauvreté. Il se félicite de la qualité des travaux et des échanges et affirme que les conclusions d’une telle conférence seront d’importance pour chacun des pays participants et, au-delà, pour les autres. Il remercie avec beaucoup de chaleur l’équipe, depuis le président du RAIFFET jusqu’au comité d’organisation, qui a permis à ce colloque de se tenir à Hammamet et déclare clos le 2nd colloque international du RAIFFET.
Recommandations du colloque
Considérant les orientations générales dégagées, le second colloque international du RAIFFET sur Éducation technologique, formation professionnelle, lutte contre la pauvreté fait les recommandations suivantes : (i) le colloque confie la mission au président du RAIFFET de transmettre aux autorités compétentes une déclaration solennelle sur le rôle essentiel de l’EFTP comme outil de lutte contre la pauvreté en vue d’un développement durable des pays africains. Il s’agit d’appuyer les initiatives des institutions partenaires pour la formation, la production de ressources et la recherche. (ii) Le colloque confie à son comité scientifique le soin de préparer l’édition et la diffusion des actes du colloque comme contribution du réseau aux travaux concernant la lutte contre la pauvreté. (iii) Le colloque encourage les établissements de formations professionnelles et techniques à multiplier les échanges et partenariats tant au niveau national, sous-régional, régional et international, pour le renforcement du RAIFFET et de l’EFTP en Afrique. Le colloque manifeste son souhait de renforcer et d’étendre les partenariats vers d’autres pays africains des sphères anglophones, lusophones, hispanophones et/ou arabophones. (iv) Le colloque propose que le RAIFFET joue un rôle de coordination des actions de développements de l’EFTP dans le cadre des partenaires nationaux, bilatéraux, multilatéraux (Unesco-Breda, Union Européenne, BAD) et des structures et programmes à l’oeuvre en Afrique (plan d’action Union Africaine, Communautés économiques régionales…). (v)
Le colloque engage le RAIFFET à formaliser et institutionnaliser les relations avec les partenaires en développant des conventions définissant les responsabilités réciproques. Le colloque souhaite que le RAIFFET organise des actions concrètes selon des stratégies de partenariats étendus et de mutualisation des compétences. Ce plan d’action résulte des travaux de la conférence et de l’assemblée générale du RAIFFET ; il devra être décliné et précisé. Les actions suggérées relèveraient de :
- la mobilité des chercheurs, des enseignants et des étudiants,
- la mise en place de séminaires de formation des enseignants des domaines concernés dans le cadre d’une politique de zones géographiques,
- le développement d’un site Web qui permettra la diffusion de l’information et qui servirait de portail d’entrée pour des activités de plateforme d’échanges et de coordination
- la création d’une revue scientifique internationale à comité de lecture, dans les domaines de l’EFTP dévolue à l’aide et à l’accompagnement des jeunes chercheurs africains
Session d’ouverture
Discours de Monsieur Jean Sylvain Bekale Nze, Président du RAIFFET
Excellence Monsieur le Président de la République, Excellence Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur, Excellence, Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions de la République, Excellence, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, Honorables Représentants des Organisations Internationales et Non Gouvernementales, Honorables invités, Chers Collègues Enseignants, Chers étudiants, Mesdames et Messieurs,
Monsieur le Président de la République, ce deuxième Colloque International du Réseau Africain des Instituts de Formation de Formateurs de l’Enseignement Technique (RAIFFET) est pour toutes ses composantes un symbole fort qui témoigne de la vitalité de notre organisation. C’est aussi un moment important pour les bienfaiteurs toujours plus nombreux, qui croient en notre action.
En ma qualité de Président du RAIFFET, il me plaît de vous exprimer notre sincère et profonde gratitude pour le grand honneur que vous avez bien voulu nous faire en acceptant de soutenir et d’appuyer l’organisation de ce Colloque. Aussi, permettez-moi, Mesdames et Messieurs, de rendre un vibrant hommage à son Excellence Zine El-Abidine Ben Ali, Président de la République de Tunisie et à son frère et homologue, Son Excellence El Hadj Omar Bongo Ondimba, Président de la République du Gabon, dont le dévouement, sans faille, a permis la tenue des présentes assises. Je voudrais aussi remercier, de façon sincère, le Gouvernement de la République de Tunisie, les autorités Institutionnelles et tout particulièrement le Ministre de l’Enseignement Supérieur, pour avoir accepté que ce pays, à travers l’Institut Supérieur de l’Éducation et de la Formation Continue, puisse abriter ces rencontres scientifiques.
Monsieur le Président de la République, Distingués Délégués, Honorables Invités, Mesdames et Messieurs, Chers amis qui avez à coeur les problèmes de l’éducation technologique et de formation professionnelle, il m’est agréable de témoigner notre gratitude au professeur Jacques Ginestié, Président du Comité Scientifique du présent Colloque, et à Monsieur Hervé Huot-Marchand, un des premiers soutiens de cette entreprise depuis Libreville auprès de la coopération française où il officiait en 2004, il a oeuvré pour l’aboutissement de ce projet et c’est fort de ses talents que l’UNESCO l’a pris, aujourd’hui, pour travailler en son sein.
Qu’il me soit permis aussi de remercier les représentants des Organisations Internationales qui n’ont jamais cessé de soutenir nos efforts en nous apportant leur soutien matériel et financier, qui se manifeste encore aujourd’hui par la présence dans cette salle de Messieurs Teeluck Bhuwanee de l’UNESCO et Abdul Hakim Elwaer de l’Union Africaine et bien d’autres encore.
Mesdames et Messieurs, Honorables invités, avant d’aller à l’objet de notre présence ici, permettez-moi cette petite rétrospective. Quand, en janvier 2004, les ENSET de Libreville, Douala et l’IPNETP d’Abidjan, d’une part, et les IUFM d’Aix-Marseille et de Créteil, d’autre part, décident de travailler, en partenariat au sein d’un Réseau, cela paraissait une gageure ; au vue des stratégies à mettre en place pour atteindre les objectifs visés, à savoir la promotion de l’éducation technologique et la formation professionnelle dans les systèmes éducatifs africains. Mais la convergence et la force de nos points de vue sur l’intérêt d’un tel projet, notre détermination à concrétiser une plate-forme de nos efforts pour une meilleure gestion commune de la formation des formateurs, ont fini par donner le résultat que nous voyons aujourd’hui.
Monsieur le Président de la République, Distingués invités, Mesdames et Messieurs, Le Colloque qui nous réunit ici et que je vais présenter en quelques mots a pour thème : « Éducation Technologique, Formation Professionnelle et Lutte contre la Pauvreté ». Après avoir examiné l’impact de l’implantation d’organisations d’éducation technologique et de formation professionnelle sur le développement durable des pays, au Colloque de Libreville, celui de Tunis va poursuivre cette réflexion en examinant l’impact du développement de ces organisations scolaires dans la lutte contre la pauvreté.
Le but de ce Colloque sera d’étudier, au travers d’expériences originales, les travaux de recherche ou d’analyses d’organisations scolaires, de formations professionnelles ou universitaires, comment dans les différents pays participants, cette question de la réduction de la pauvreté peut être appréhendée. Pour tenter de circonscrire cette problématique, il a été dégagé et retenu quatre thèmes qui feront l’objet d’exposés débattus en ateliers sur quatre jours.
Thème 1 : Acculturation technologique et promotion de l’égalité des chances ;
Thème 2 : Quelle formation professionnelle pour accompagner le passage d’une activité de subsistance à la petite entreprise ?
Thème 3 : Quelle relation formation-emploi pour une solution éducative et d’insertion ?
Thème 4 : organisations scolaires et compétences professionnelles.
Ces thématiques s’inscrivent bien dans la réflexion sur le développement des enseignements technologiques et de la formation professionnelle, secteur d’inclusion sociale, qui, aujourd’hui, fait l’objet de toute l’attention de la communauté internationale. Nous pensons que l’absence de formation est l’une des premières causes de pauvreté en Afrique et qu’une formation professionnelle en adéquation avec les emplois disponibles peut être un premier rempart pour la réduction de ce fléau. C’est en ce sens que la formation des formateurs est un des enjeux majeurs pour notre continent.
Monsieur le Président de la République, Distingués invités, pour conclure mon propos, je formule toujours ce vœu de voir notre espace se rassembler, développer toutes les synergies, toutes les solidarités et contribuer davantage à l’intensification de nos échanges pour que le développement de nos sociétés puisse effectivement reposer sur la maîtrise des savoirs technologiques. Qu’une articulation conséquente et significative entre l’acquisition de ces savoirs et leur mobilisation constitueraient une des réponses à la réduction de la pauvreté sur le Continent. C’est fort de cela que la coopération est une des dimensions capitales pour envisager les problématiques inscrites à ce Colloque. Je vous remercie.
Discours de Monsieur Teeluck Bhuwanee, représentant l’Unesco-Breda
Monsieur le ministre de l’éducation supérieure, de la recherche technologique et scientifique, Monsieur le Directeur de L’ISEFC, Chers collègues du RAIFFET, Mesdames et Messieurs spécialistes de l’éducation, de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, Mesdames et Messieurs, j’ai le plaisir et l’immense privilège de représenter l’UNESCO et de m’adresser à cette illustre assemblée à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des travaux du Colloque international sur le thème Éducation technologique, formation professionnelle et lutte contre la pauvreté. Je salue tous les participants et voudrais vous transmettre également les chaleureuses salutations de notre Directeur Général Monsieur Matsuraa et de notre directeur par intérim du Bureau Régional de l’UNESCO en Afrique Monsieur le Professeur Francisco Komlavi Seddoh. En tant que Directeur du Bureau Régional de l’Unesco à Dakar dont la mission est de contribuer à l’éducation et au développement de la région Afrique subsaharienne, il attache une importance toute particulière à l’amélioration de l’enseignement technique et professionnel. L’UNESCO entière est à vos côtés dans la bataille pour le développement de ce secteur comme outil dans la lutte contre la pauvreté. L’UNESCO vous remercie d’avance pour votre contribution à la réflexion au cours de cette rencontre qui, nous en sommes convaincus, permettra de faire de nouveaux pas en avant. Excellence, Chers collègues, Mesdames et Messieurs, un des volets du programme de l’UNESCO en matière d’éducation s’articule autour de la réforme de l’enseignement dans la perspective de l’Éducation Pour Tous tout au long de la vie. Celle-ci cible trois objectifs :
- la rénovation des systèmes éducatifs à l’ère de l’information à l’aide de la conception de stratégies d’apprentissage tout au long de la vie, de la promotion des politiques et du renforcement des capacités de développement et de reconstruction des systèmes éducatifs,
- la réforme de l’enseignement secondaire général et professionnel à travers la diversification de l’enseignement général et professionnel et l’adoption d’un programme international à long terme spécifique à l’enseignement technique et professionnel et
- la promotion de l’enseignement supérieur, le renforcement de la coopération entre universités et de la mobilité académique.
Ce programme allié aux autres activités a permis d’atteindre de bons résultats. Ainsi, selon le dernier rapport 2007 des Nations Unies sur les Objectifs du Millénaires pour le développement, la pauvreté a reculé au cours des 15 dernières années, en matière absolue et relative. Cependant, en dépit d’améliorations récentes, la proportion des gens vivant avec moins d’un dollar par jour reste élevée en Afrique subsaharienne (41,1% en 2004). En outre, si la pauvreté extrême a reculé, les inégalités de revenu se sont aggravées un peu partout, provoquant de nouvelles tensions. L’éducation et la formation jouent un rôle majeur dans la lutte contre la pauvreté, puisque les gens instruits sont moins menacés par la pauvreté que les autres. Toutefois, à elle seule, l’éducation et la formation ne réduiront pas automatiquement la pauvreté. Afin de pallier aux insuffisances non seulement en Afrique mais également dans d’autres continents, l’UNESCO mène depuis plus de cinq décennies, un vaste programme d’enseignement technique et professionnel comportant un important volet normatif. En effet, l’une des missions de l’UNESCO consiste à définir des normes et pratiques adéquates internationalement reconnues dans chacun de ses domaines de compétence et à les communiquer par le moyen d’instruments normatifs. Dans le domaine de l’EFTP, l’UNESCO dispose de deux instruments normatifs : la Convention sur l’enseignement technique et professionnel (1989) et la Recommandation révisée concernant l’enseignement technique et professionnel (2001). Ces instruments ont aussi permis au secteur de contribuer à la réduction de la pauvreté.
L’enseignement technique et professionnel, volet de l’éducation consacré à l’acquisition de connaissances et compétences requises dans le monde du travail, se trouve constamment confronté à l’impératif croissant de s’adapter aux besoins divers et en constante évolution du marché du travail. En outre, il se voit attribué une part de responsabilité pour le développement personnel de ses élèves, jeunes ou adultes, et pour leur participation efficace à des sociétés dont l’interdépendance et la complexité sont croissantes. Ayant pour principale mission de doter les jeunes et les adultes, femmes et hommes, des compétences qui leur permettront d’assurer leur subsistance, l’EFTP a donc un rôle capital à jouer dans le processus de l’Éducation Pour Tous. Par ailleurs, l’augmentation, suite à l’initiative EPT, du nombre de jeunes inscrits dans l’enseignement primaire dans les pays en développement va entraîner dans un proche avenir une augmentation du nombre de ces jeunes en quête de possibilités de formation continue ou de travail générateur de revenus. Il faudrait que les pays en question dispensent un enseignement de base et d’une éducation secondaire, technique et professionnelle à tous les jeunes issus de l’enseignement de base pour que ces pays puissent faire face assez rapidement à une population grandissante de jeunes gens éduqués et sans emploi. C’est pourquoi il est absolument impératif de mettre en place des programmes de développement des compétences requises dans la vie active afin que les jeunes gens quittant l’école puissent s’engager dans des activités génératrices de revenus. Il est nécessaire de retarder la répartition faite au niveau secondaire entre la filière générale et professionnelle et assurer la mobilité entre les deux lorsque cette répartition a déjà été opérée afin de s’assurer que les compétences douces comme l’entreprenariat et le travail en équipe soient acquises. En bref, il nous faut avoir une approche plus holistique de l’éducation qui prend en compte l’enseignement de base, l’enseignement secondaire, technique et professionnel et supérieur. La déclaration de Bonn affirme que le développement des compétences donnant lieu à un EFTP adapté aux différentes classes d’âge devrait faire partie intégrante de l’enseignement à tous les niveaux et ne plus être considéré comme optionnel ou marginal, ou bien réservé à ceux ou celles qui échouent dans la filière académique. Il est particulièrement important d’intégrer le développement des compétences dans les programmes de l’Éducation pour tous (EPT) et de satisfaire la demande d’EFTP générée par les apprenants ayant achevé le cycle d’éducation de base. La préparation au travail devrait doter les individus des connaissances, compétences, aptitudes, valeurs et attitudes leur permettant de devenir des citoyens productifs et responsables, conscients de la dignité du travail et contribuant à la construction de sociétés durables et a la réduction de la pauvreté. Vu que ce secteur de l’éducation jouit d’une reconnaissance accrue en tant que moyen de générer des revenus et comme facteur de cohésion sociale, il est nécessaire de redoubler d’efforts pour moderniser l’EFTP, renforcer son statut et assurer sa durabilité. L’EFTP a, de toute évidence, un rôle croissant à jouer dans des secteurs d’activité qui contribuent à la durabilité, comme la préservation de l’environnement et du patrimoine culturel ainsi que la production d’énergies renouvelables, dans une stratégie de réduction de la pauvreté. Dans leurs efforts pour développer l’enseignement technique et la formation professionnelle, de nombreux pays se trouvent confrontés à un problème de cout. Si la diversification des mécanismes de financement constitue la principale réponse à ce défi, cela suppose d’affiner les données financières et leur analyse. Ce colloque doit aider les pays à trouver des solutions à ce problème, à trouver des solutions pour aider les pays à consolider leurs informations financières des budgets publics, les états financiers des prestataires privés et des enquêtes sur le renforcement des informations sur les couts de l’EFTP, une étape indispensable pour mieux guider les politiques nationales et permettre des comparaisons au niveau international.
Ainsi, au nom de l’UNESCO, j’invite tous les acteurs impliqués dans l’EFTP, tant publics que privés à mettre en place des stratégies pour réduire la pauvreté, des partenariats public-privés, monde du travail et académiciens, et à oeuvrer résolument pour la mise en oeuvre des recommandations qui n’ont pas encore bénéficié d’une attention ou de ressources suffisantes. Compte tenu de l’ampleur de la tâche à accomplir et de la complexité des situations dans lesquelles il faut agir, une priorité particulière doit être accordée aux initiatives du domaine de l’EFTP qui contribuent à réduire la pauvreté, promouvoir l’égalité, et notamment l’égalité des sexes, stopper l’extension de l’épidémie de VIH/sida, soutenir les jeunes en situation de crise, les communautés rurales et les groupes victimes d’exclusion, encourager la coopération Nord-Sud et Sud-Sud et aider au développement des pays en transition et de ceux qui traversent une crise. Ces initiatives d’EFTP sont essentielles pour un développement durable axé sur l’homme. Ce colloque doit nous aider à trouver des approches du développement qui concilient la prospérité économique, la préservation de l’environnement et le bien-être social de même que des applications des technologies de l’information et de la communication qui réduisent la fracture numérique. Le principal défi de ce colloque reste le suivi des recommandations du rapport qui sortiront de cette réunion. En fin de compte, ces recommandations doivent nous aider a trouver des solutions pour satisfaire une jeunesse désabusée, à formuler des moyens pour améliorer la qualité de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, à améliorer l’employabilité des jeunes, à consolider les liens école/entreprise, à réduire les couts de l’EFTP, et finalement aider a la croissance économique et a l’emploi. Excellence, Chers collègues spécialistes de l’éducation, Mesdames et Messieurs, je vous remercie pour votre aimable attention et souhaite plein succès à ce colloque.
Introduction au thème du colloque par Jacques Ginestié, président du comité scientifique du RAIFFET
Y a-t-il encore une place pour l’école ? Quelques idées pour débattre
Lors du colloque de Libreville, nous envisagions en quoi l’éducation technologique et la formation professionnelle contribuaient au développement durable ; il était logique de continuer par ce truisme : peut-on parler de développement durable sans discuter de la question de la lutte contre la pauvreté ? C’est de cela qu’il est question dans ce second colloque du RAIFFET accueilli à Hammamet par nos collègues Tunisiens. Une seconde édition, cela a du sens ; je vous rappelle qu’il suffit de deux points pour définir une droite et que cette droite peut indiquer une direction et, si elle est orientée, un sens. La direction, celle que nous essayons de prendre, repose sur cette articulation entre éducation technologique et formation professionnelle. Je ne redirais pas ce que nous disions déjà à Libreville, mais seul un développement durable de l’éducation et de la formation professionnelle permettront de supporter un développement durable des personnes, des sociétés, des états et des pays. Ce second colloque pose la question de fond : à quoi sert l’école ? À quoi servent les savoirs scolaires que l’on enseigne à nos enfants ? Pouvons-nous encore penser que nos systèmes scolaires produisent du progrès social, du développement, de l’amélioration de la condition humaine… ? Au-delà d’un militantisme que certains qualifieraient de suranné et feraient certainement bonne mesure dans des manifestations politiques, notre préoccupation est différente. Le RAIFFET, faut-il le rappeler, s’est donné pour mission de rassembler les synergies des acteurs des enseignements techniques, technologiques et professionnels sur le continent africain. Bien sûr, il y a un fort enjeu dans cette dynamique d’une pétition de principe visant une économie générale, une efficacité accrue, un élargissement des champs des ressources et des compétences. Pour autant, essayons d’examiner ces questions préalables à la lumière de nos préoccupations de chercheurs.
Par exemple, sous l’effort conjugué de volontés locales, régionales, nationales, internationales, partout, les systèmes éducatifs progressent vers plus d’éducation pour tous, des formations professionnelles mieux adaptées à chacun ; pourtant, les différences entre riches et pauvres se creusent, qu’il s’agisse des différences entre les pays, entre les entreprises, entre les personnes. Ainsi, de manière assez désespérante, nous pourrions nous aventurer à établir une corrélation entre plus d’école et plus de pauvreté. Ainsi, tel pays du sud accueille largement des entreprises du Nord qui délocalisent leur production sous des cieux de bas salaires, à faible taux d’imposition, à bas niveau de protection sociale. Ce pays va connaître une embellie sociale, il va probablement investir dans la formation de ses jeunes pour avoir des ouvriers, des techniciens, des cadres qualifiés, plus expérimentés, plus compétents pour assurer et accompagner le développement de ces entreprises qui sont venus s’installer ici. Mieux éduqués, mieux formés, plus compétents, le coût de la main d’oeuvre va ainsi augmenter entraînant une baisse de la rentabilité des entreprises qui vont alors délocaliser à nouveau, vers d’autres cieux… Lorsque le pays connaît quelques richesses naturelles, il rentre dans un autre cercle plutôt infernal, celui du cycle exportation de matières premières, importation de produits manufacturés. Exportateurs de matières premières, ces pays importent largement des produits manufacturés qu’ils payent au prix fort. Cette production de matières premières a des répercussions sur les organisations sociales, culturelles, politiques, économiques et professionnelles. Par exemple, le développement de monocultures intensives remet en cause les cultures vivrières sans pour autant accroître les revenus des paysans qui les pratiquent. Y a-t-il une fatalité irréversible qui rendrait vaine toute tentative de structuration et de développement fondé sur plus d’éducation, plus de formation, plus d’intelligence collective ? Au-delà d’un fatalisme convenu, notons que peu de pays africains investissent réellement dans l’éducation, si l’on excepte les pays du Maghreb, la Tunisie, tout particulièrement. Ainsi, les systèmes éducatifs sont à la mesure des ambitions des budgets qu’on leur consacre. Avec une moyenne inférieure à 3% du PIB par habitant, il ne faut pas s’attendre à des miracles lorsque l’on voit que des pays qui consacrent plus de 8% ont des difficultés qu’ils n’arrivent pas à résoudre simplement. Si la qualité et l’efficacité d’un système éducatif peuvent s’apprécier à l’aune de ce qu’un pays investit pour cela, on voit bien que ce seul critère n’est pas suffisant. L’enquête PISA conduite auprès de 32 pays développés montre clairement qu’il n’y a pas de corrélation entre coût du système éducatif et efficacité de ce système ou que le mode de financement du système éducatif n’a pas réellement d’incidence sur son efficacité. Alors, pour répondre à cette question, il va falloir que nous fassions des efforts d’imagination pour développer nos systèmes éducatifs, pour rompre avec une vision conservatrice de l’éducation et de la formation qui conduit à reproduire les organisations politiques, économiques, sociales, professionnelles, techniques… Ce colloque est une contribution à l’élaboration de réponses. En tant que chercheurs, nous pouvons apporter des éclairages sur des choix, des orientations, des possibles. Pour autant, notre responsabilité n’est pas simplement une posture a-sociétale, atemporelle ou a-culturelle. La recherche en éducation technologique et professionnelle doit être une recherche qui s’engage sur les voies d’une plus grande efficacité, d’une plus grande cohérence, d’une pertinence accrue des systèmes éducatifs dans leur articulation entre éducation générale pour tous et formation professionnelle de chacun. L’efficacité se mesure à l’aune du rapport entre le coût et le résultat. S’inscrire dans une logique de résultat n’est pas chose simple et doit nous conduire à interroger les organisations existantes ; il ne s’agit pas de l’autosatisfaction de l’enseignant ou des dirigeants mais des apprentissages des élèves, de ce que ce système éducatif va leur apporter. Une école quelle qu’elle soit n’existe pas pour le bien-être de ses enseignants, elle existe parce qu’il y a des élèves à éduquer, à former et c’est ce seul résultat qui compte.
La cohérence relève de cette recherche permanente de l’efficience des enseignements les uns par rapport aux autres, dans leurs interactions et dans leur progression. Les organisations scolaires ont banalisé les découpages disciplinaires comme s’il y avait une logique intrinsèque forte qui rangerait d’un côté tel savoir. Ces logiques intrinsèques à l’oeuvre ont conduit à une forme d’autonomisation de ces savoirs les uns en regard des autres – par exemple, de la théorie de l’élasticité à la résistance des matériaux – en leur faisant perdre toute signification partagée. Elles ont également conduit à des logiques de progressions qui ne sont pas particulièrement claires et limpides pour quiconque, notamment pour les élèves… Ainsi, la routine scolaire conduit à enseigner telle notion avant telle autre sans que l’on ne sache plus réellement pourquoi l’on fait comme cela ! Regarder un peu au-delà de l’horizon scolaire suppose de penser la place et le rôle de l’école dans la société. Un élève, étymologiquement est là, à l’école, pour s’élever, pour devenir adulte. L’éducation générale doit pourvoir aux besoins d’éducation des futurs citoyens ; les valeurs portées par l’éducation sont des valeurs sociales fortes : nos sociétés de demain seront ce que nos écoles prépareront. Par exemple, le thème d’éducation pour tous revêt une importance particulière ici en Tunisie ; un pays qui scolarise tous ses enfants avec un taux proche de 100% à l’école primaire, à l’école moyenne mais aussi avec un fort taux de scolarisation au lycée et à l’université. Un pays qui scolarise aussi bien ses garçons que ses filles lorsque nous avons trop d’exemples de pays qui excluent les filles des écoles. Soyons-en convaincu, l’éducation pour tous est une valeur fondamentale qui ne peut se réduire à une alphabétisation minimaliste d’un lire, écrire, compter si peu contemporain. L’éducation pour tous, c’est aussi une ouverture de tous sur le monde actuel, l’éducation technologique est une de ces ouvertures au même titre que l’éducation scientifique ou d’autres formes d’éducations artistique, sportive, à la santé… Pour autant, peut-on être un citoyen si l’on ne peut assurer sa subsistance et son existence sociale. Inéluctablement liée à l’éducation pour tous, l’exigence de formation professionnelle nous renvoie à une évidence – permettre à chacun d’avoir une place dans la société – tout en relevant cette fragile et dérisoire espérance éducative : comment former quelqu’un à un métier alors que de nombreux paramètres – employabilité, professionnalité, adaptabilité… – échappent pour partie à toute rationalité prévisionniste qui tenterait d’apprécier ce que sera le marché de l’emploi dans un pays donné à dix ans. Ce sont ces questions qui nous réunissent pour contribuer ainsi à entendre un peu du fonctionnement de nos institutions scolaires, à tenter quelques modestes expérimentations qui vont esquisser quelques possibles, susceptibles d’améliorer nos organisations, rendre plus efficaces nos dispositifs. Les discussions s’organisent dans quatre thèmes que nous avons essayé de choisir pour couvrir le plus largement nos réflexions. Le premier thème traite d’acculturation technologique et de promotion de l’égalité des chances, avec en toile de fond des questions aussi basiques que la lutte contre la fracture qu’elle soit numérique, technologique ou socioprofessionnelle. Le second thème pose que le développement repose avant tout sur le développement des initiatives locales, en posant la question : quelle formation professionnelle pour accompagner le passage d’une activité de subsistance à la petite entreprise ? Le troisième thème s’intéresse aux relations que je qualifiais de pertinence du système éducatif entre l’école et l’entreprise au travers des relations formation-emploi qui permettent d’articuler éducation, formation et d’insertion professionnelle. Le quatrième thème nous permettra de débattre de l’efficacité de nos systèmes de formation professionnelle au travers des questions liées à l’acquisition des compétences professionnelles dans nos organisations scolaires. C’est avec un peu de regrets que nous avons constaté que le thème 2 et, dans une moindre mesure, le thème 1, n’ont pas attiré beaucoup de communicants. La majorité des propositions portent sur le thème 4. Peut-être est-ce une faiblesse de nos organisations de recherche qui sont plus aptes à analyser ou à proposer des solutions en termes d’organisations scolaires plutôt qu’à produire des outils de compréhension de ces mécanismes complexes que sont le passage à la mise en place d’entreprises ou la question de l’égalité entre les personnes, égalité que les anglo-saxons décrivent comme une égalité d’opportunités ?
Un autre regret que nous pouvons formuler, porte sur l’origine des communications qui proviennent de la sphère francophone. Pourtant la confrontation avec nos collègues issus de pays anglophones, hispanophones ou lusophones aurait un intérêt réel qui ne se réduit pas aux seuls échanges culturels. L’approche dans ces pays est souvent assez différente de celles que l’on peut appréhender dans la sphère francophone. La notion même de prescription, les modes d’organisation scolaire, les structures de formation professionnelle ou encore les situations didactiques proposées sont bien différentes et nous aurions tout intérêt à développer cet enrichissement. N’en doutons pas, cette ouverture, qu’il va falloir réussir dans un proche avenir, est aussi un gage de construction identitaire d’une approche africaine de l’ETFP.
Il ne fait nul doute que le RAIFFET grandit et acquiert de la maturité. D’un point de vue global et au-delà des limites évoquées ci-dessus, il est clair que les communications proposées constituent autant de pistes possibles à explorer, pour plus d’éducation technologique, pour une meilleure formation professionnelle, avec l’espoir partagé que cela permette à chacun de prendre en main son destin, de contribuer à inscrire le développement des personnes, des communautés, des sociétés, des pays, pour lutter durablement contre la pauvreté. C’est à cela que chacune et chacun des participants contribuent, modestement, mais avec la force des convictions qui nous animent tous.
Session de clôture
Intervention de Monsieur Jacques Ginestié, président du comité scientifique
Monsieur le directeur représentant le Ministre de l’enseignement supérieur, Mesdames et messieurs les responsables et directeurs des institutions de formation de formateurs, chers collègues, nous voilà rendu au terme de ce second colloque international organisé par le RAIFFET. Avant de tirer quelques lignes de bilan, je voudrais saluer l’équipe tunisienne qui a organisé de manière aussi brillante cette manifestation, se transformant en agent de voyage, en hôtes d’accueil, en éditeur d’actes, en animateurs… L’ISEFC et l’ESSTT ont montré, si cela était encore nécessaire, leur grande compétence dans leur capacité à organiser une conférence internationale d’un très haut niveau scientifique ; à travers eux, ce sont toutes les institutions africaines de formation de formateurs qui mettent en avant cette volonté forte de vouloir prendre en main le développement de la formation des enseignants et des formateurs dans les domaines de l’EFTP en s’appuyant pour cela sur une structuration de la recherche en éducation technologique et professionnelle. Pour ma part, je voudrais tous vous remercier de me donner l’opportunité d’apporter une modeste contribution à cette dynamique. Je souhaiterai remercier Monsieur Mohamed Kameleddine Gaha, Directeur de l’ISEFC, Monsieur Jilani Lamloumi, Directeur général des études technologiques au Ministère de l’Éducation Nationale, ainsi que Monsieur Ahmed Hedhli, Directeur de l’ESSTT, qui ont soutenu ce projet et se sont engagés efficacement pour permettre la tenue d’un tel colloque. Je voudrais également remercier Teeluck Bhuwanee et Hervé Huot-Marchand pour leur soutien dans la phase de montage du projet, pour leur aide à trouver les financements nécessaires et surtout pour leur contribution scientifique aux débats et aux réflexions qui ont eu lieu toute cette semaine. Le RAIFFET ne serait rien sans son président. Je ne sais comment cet homme s’y prend mais je suis toujours impressionné par la facilité avec laquelle il convainc chaque fois les bailleurs de fonds d’ouvrir leurs caisses pour alimenter celles du RAIFFET. Nous étions, il y a quelques semaines, dans le doute et l’incertitude ; les premières factures arrivaient et le compte en banque était désespérément vide… à deux doigts d’envisager de reporter à une date ultérieure !!! Et puis, le gouvernement gabonais qui nous attribue la première subvention ; les autres ont suivi, nous permettant le financement. Je voudrais, au nom de l’ensemble des participants, remercier Jean Sylvain Bekale Nze pour son engagement sans faille dans cette noble cause, le développement de l’EFTP en Afrique, au travers du RAIFFET.
Pour autant, un colloque, c’est également une organisation sans faille. S’il fallait décerner un diplôme de qualification, nous le décernerions sans aucun doute avec la mention très honorable et les félicitations à l’unanimité à notre collègue Adel Bouras qui a organisé cette manifestation avec un brio, une rigueur, une efficacité et une gentillesse jamais démentis et sans aucune faille. Un tel engagement mérite de notre part, ce que les anglais appellent une « standing ovation ». À travers lui, c’est tout le comité d’organisation et toutes les petites mains, les secrétaires, les chauffeurs, les hôtesses d’accueil…, que nous saluons. La Tunisie a une réputation d’accueil et d’hospitalité et ce que nous venons de vivre est à la hauteur de cette réputation. Au-delà de l’organisation et de la vie du colloque, je voudrais me livrer à quelques observations sur ce qui c’est passé et sur quelques conclusions que nous pouvons en tirer. D’abord quantitativement. Nous avons retenu soixante-dix communications proposées par plus de quatre-vingt participants originaires de dix-huit pays. Bien sûr, il était difficile d’apprécier à la lecture des seuls résumés de la qualité des propositions, les exposés et les débats ont montré que cette qualité était au rendez-vous. Il n’est pas facile de se plier aux exigences d’une conférence scientifique, d’en respecter les formes et d’en accepter les contraintes. Il y avait beaucoup d’ateliers, de séances en parallèle qui ont été animées par des débats passionnés et instructifs ; l’implication de chacun dans les discussions est certainement le meilleur indicateur de la qualité des présentations, qui est réellement en évolution depuis Libreville. Une communauté scientifique africaine, travaillant les questions d’EFTP est en train de prendre son essor ; cette conférence vient d’y contribuer en apportant une pierre supplémentaire à l’édifice. Le RAIFFET vient d’y conquérir quelques-unes de ses lettres de noblesse dans l’accompagnement et la structuration de cette communauté.
Bien sûr, les présentations sont encore très hétérogènes. La répartition dans chacun des thèmes est inégale ; les préoccupations portées par les participants concernent essentiellement les organisations d’enseignement dans l’EFTP avec dans ces domaines une propension manifeste pour proposer des dispositifs. Ces propositions relatent souvent des mises en oeuvre de dispositifs conçus par d’autres. D’une manière globale, on regrettera le faible nombre d’analyses critiques sur ces dispositifs, qu’il s’agisse de rendre compte du processus de mise en oeuvre (difficultés, contraintes, bénéfices escomptés et réalisés…) ou qu’il s’agisse de rendre compte des apprentissages des élèves dans de telles situations. Ce dernier point suppose effectivement la mise en oeuvre de méthodologies qui ne sont pas largement répandues dans la communauté. On notera l’important nombre de communications qui présente des dispositifs ayant recours à l’usage des TIC. Il y a une sorte de fascination pour ces dispositifs d’enseignement à distance qui permettraient de développer des situations efficientes, à moindre coût ; il est intéressant de voir comment notre communauté semble adopter, sans critique, sans réserve, les glissements sémantiques transformant l’élève en apprenant, l’enseignant en tuteur et le savoir en ressources. Il est tout aussi intéressant de voir ces dispositifs présentés comme une solution possible pour réduire les coûts de l’école. Il y a toujours ce mythe de permettre à l’école d’exister sans l’école. La dématérialisation de l’école n’a jamais été la solution car, contrairement à ce que croient leurs zélateurs, c’est l’institutionnalisation du réseau de relations professeur-élève-savoir qui fonde l’école et non pas la mise en relation d’un individu et d’un savoir. Alors oui, on peut imaginer d’autres organisations que la forme scolaire classique d’une salle fermée avec un tableau et une craie. La transmission des connaissances est une activité hautement contextualisée socialement, culturellement, économiquement, professionnellement ou cognitivement. Ce contexte est porté par le savoir transmis, mais tout autant porté par l’enseignant qui enseigne les connaissances à transmettre que par les élèves qui interagissent entre eux, avec l’enseignant et avec ce savoir. La difficulté majeure à l’école n’est pas d’aménager les connaissances dans des dispositifs pédagogiques ; non, la difficulté majeure est bien celle de concevoir, d’organiser, de mettre en oeuvre et de faire vivre les situations didactiques qui vont permettre à travers l’enseignement dispensé par l’enseignant, à l’enfant d’apprendre, c’est-à-dire d’acquérir des savoirs. En ce sens, il est logique qu’un grand nombre de communications interroge cette équation, mais ce n’est pas en remplaçant l’enseignant par un animateur (un accompagnant ou un tuteur) que l’on réduira les coûts et que l’on améliorera l’efficacité. L’hétérogénéité porte également sur la qualité d’écriture des textes. Certains sont d’excellente qualité, digne de n’importe quelle publication scientifique internationale et cette qualité est porteuse de l’espoir d’une communauté scientifique africaine capable de penser et accompagner le développement de l’EFTP au travers de travaux de recherche scientifique. D’autres nécessitent un important travail d’édition et supposerait également une solide formation à et par la recherche ; ils témoignent de cette nécessité pour le RAIFFET d’aider et d’accompagner la structuration de la recherche en éducation technologique et professionnelle en Afrique. Car ne nous y trompons pas, l’enjeu du RAIFFET n’est pas simplement d’organiser tous les deux ou trois ans un grand colloque international. L’enjeu du RAIFFET c’est d’aider et accompagner la structuration de l’EFTP en Afrique. Ce but repose sur une offre de dispositifs variés qui vont permettre de mutualiser et de partager les compétences qui existent ici et là. Le RAIFFET doit favoriser la mobilité des étudiants, des formateurs, des enseignants et des chercheurs. Il doit également proposer des actions plus régionales. Par exemple, l’organisation d’un séminaire régional dans chacune des régions qui composent le RAIFFET serait un premier pas important qu’il faut organiser et mettre en oeuvre d’ici le prochain colloque, en 2010. Une communauté scientifique n’existe pas si elle ne se dote pas des moyens de communication pour diffuser et faire connaître ses travaux. La mise en place d’un site Web est un impératif qu’il faut réaliser très rapidement. Par ailleurs, la réalisation d’une revue scientifique pour permettre aux chercheurs africains de publier leurs travaux est le second volet de cette communication ; cette revue devra s’appuyer sur un comité de lecture de réputation internationale et ne rien céder à la nécessaire qualité des articles publiés ; elle devra rendre compte des travaux de cette communauté naissante qui ne demande qu’à s’élargir à l’ensemble des pays africains, notamment les pays anglophones. Il ne s’agit pas simplement d’un élargissement visant un oecuménisme scientifique africain, il s’agit surtout d’ouvrir la communauté actuelle fortement francophone à d’autres organisations scolaires, à d’autres conceptions de l’éducation technologique et de la formation professionnelle, à d’autres cultures éducatives. Penser l’éducation technologique et la formation professionnelle, c’est également penser les relations aux autres organisations sociales. La conception centralisatrice très répandue dans les pays francophones permet d’assurer une planification et une couverture des territoires que l’on pourrait imaginer efficace. C’est ce que l’on peut constater par exemple ici en Tunisie. Pourtant de très nombreux pays ont du mal à fonctionner et la centralisation de l’administration scolaire produit trop souvent de la lourdeur, de la corruption et de l’inefficacité. L’ouverture à d’autres modes d’organisations scolaires permettrait d’interroger chacune et de penser des améliorations de ces organisations. Il ne reste plus à ce beau programme qu’à nous donner rendez-vous pour une prochaine conférence internationale dans une autre région d’Afrique, pour la 3e édition du colloque du RAIFFET. Je vous souhaite un bon retour dans vos foyers respectifs, dans vos pays, dans vos institutions. Je ne doute pas que vous participerez activement à l’atteinte des objectifs que nous nous sommes assignés ; vous pouvez compter sur le président du conseil scientifique du RAIFFET pour évaluer les actions conduites et vous interpeler sur vos engagements respectifs.
Intervention de Monsieur Teeluck Bhuwanee, représentant l’Unesco-Breda
Monsieur le Directeur et représentant du Ministre de l’éducation supérieur et la recherche scientifique de Tunisie, Chers amis, nous voici arrivés à terme de notre colloque qui a été riche tant de la qualité de ses communications que de celle de ses débats en séances plénières, lors des tables rondes ou des ateliers. Je suis persuadé, que comme moi, vous avez largement bénéficié des échanges avec vos homologues venant des différents pays africains ici présents, car le but de cette rencontre était aussi d’encourager le partage d’expériences au sein de la région en matière de programmes de formation des formateurs. Avec les recommandations et le plan d’action du RAIFFET, ainsi que le nouveau bureau, l’éducation technologique et la formation professionnelle prendront certainement un nouveau départ et un nouveau souffle. J’espère aussi que quand l’heure arrivera de notre prochain colloque l’on pourra noter tout le progrès accompli dans l’EFTP, et tout cela grâce à l’engagement de tous. Nous l’avons tous constaté et nous l’avons dit à haute voix dans ce colloque : l’Afrique fait face à la nécessité de sauter (leapfrog, en anglais) des phases de développement traversées par les pays industrialisés. Va-t-on abandonner les structures héritées qui ne répondent plus aux attentes des jeunes africains ? Va-t-on tout déconstruire et reconstruire ? Quels modèles seraient plus effectifs pour aider les jeunes à mieux réaliser leur potentiel dans leur lieu de travail et à avoir une place dans la société comme des citoyens libres et productifs ? Est-ce que ces modèles existent ? Peuvent-ils être adaptés ? Faut-il créer de nouveaux modèles ? Nous avons tous eu la chance de bénéficier de ce système et nous avons maintenant, ayant été les élus des anciennes structures, la responsabilité morale et sociale d’empêcher que nos jeunes africaines et africains prennent le risque de braver l’océan et la mort pour des rivages pas nécessairement meilleurs que ceux d’Afrique. Nous sommes tous responsables, d’une façon ou d’autre, de chaque échec africain. Nous avons tous la responsabilité de tout faire, quitte à subir les foudres de certains politiciens, pour réussir le pari d’améliorer ce système qui a besoin d’une réforme systémique. Ce colloque a amplement démontré que la pertinence d’éducation et de formation peut être déformée par une préoccupation excessive de préparer de jeunes gens pour les études universitaires. En réalité, les grandes proportions de la jeunesse n’auront jamais accès à l’enseignement supérieur et devront affronter le monde de travail sans les compétences exigées pour trouver et garder un travail. On sait très bien qu’il y a aujourd’hui une frustration d’un grand nombre de jeunes, insuffisamment préparés et équipés pour avoir accès à l’enseignement supérieur pour entrer dans le monde de travail et pour leur intégration sociale. De l’autre coté, les employeurs ont des difficultés pour trouver et recruter des ouvriers convenablement habiles, productifs et flexibles. Il y a une utilisation inefficace des budgets de l’éducation et les fardeaux croissants sur les services sociaux deviennent intenables. Nous sommes tous responsables, à commencer par les partenaires techniques et financiers internationaux, les institutions de formations, les formateurs et nos politiciens.
Nos étudiants de l’enseignement technique et professionnel acquièrent des connaissances techniques spécialisées et des compétences tout en ayant des insuffisances en science sociale et humaine, ce qui réduit considérablement leurs domaines de spécialisation. Par conséquent leur rôle créatif et responsable reste dérisoire dans la communauté et spécialement en milieu professionnel où l’évolution des technologies est rapide, continue, de plus en plus sophistiquée et pointue, basée sur les nouvelles technologies et l’information et de la communication. D’un côté la disparité est grandissante entre l’éducation et les demandes de la vie et de l’autre l’exigence plus prononcée dans le recrutement en milieu du travail qui ne concorde plus avec les méthodes utilisées dans les institutions de formation. La créativité, les compétences analytiques, la pensée latérale et la capacité à apprendre indépendamment ont besoin d’être encouragées à ce stade. Dans les mois à venir, l’UNESCO avec le RAIFFET va poursuivre ce travail d’affinement et d’élaboration du contenu qui répond aux besoins d’un part du marché africain et international, et d’autre part à ceux de la société et de la culture africaine. Pour mieux accomplir notre tâche, nous comptons sur votre active collaboration, car ce n’est qu’avec les réalités des pays que le prototype final pourra donner une réponse efficace aux besoins d’apprentissage dans les différents contextes nationaux et locaux. Aujourd’hui, je ne peux pas vous dire au revoir car le travail ne vient que de commencer et nous restons en contact pour mettre en oeuvre les conclusions et recommandations de cet atelier. Mais plus important, il faudrait que tous ceux engagés dans la recherche fassent un effort considérable pour trouver des solutions pour l’amélioration de l’éducation technologique et la formation professionnelle. J’espère aussi vivement qu’un membre du RAIFFET puisse prendre la responsabilité d’informer de ces travaux tous les ministres présents à la biennale de l’ADEA qui se tient très prochainement, dans la première semaine de mai, à Maputo. Mesdames et Messieurs, je vous remercie encore une fois très chaleureusement d’avoir participé si activement dans cette semaine de travail et je vous souhaite un bon retour dans vos pays respectifs.
Intervention de Monsieur Jean Sylvain Bekale Nze, Président du RAIFFET
Excellence Monsieur le Président de la République, Excellence Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur, Excellence, Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions de la République, Excellence, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, Honorables Représentants des Organisations Internationales et Non Gouvernementales, Honorables invités, Chers Collègues Enseignants, Chers étudiants, Mesdames et Messieurs, pendant quatre jours, nous avons débattu de l’impact de la réorganisation, de l’amélioration des systèmes d’éducation technologique et de formation professionnelle en vue de la lutte contre la pauvreté. En ma qualité de Président du RAIFFET, je suis heureux de constater que les travaux de ces assises d’Hammamet ont porté leur fruit par la qualité des échanges qui ont eu lieu. Aussi, je tiens à féliciter le comité d’organisation ainsi que tous les participants d’avoir permis l’excellence son bon déroulement. Mesdames et messieurs, Honorables invités, chers collègues, la rencontre de Libreville a été l’occasion de réfléchir sur l’émergence de perspectives plus économiques de l’éducation et de la formation qui tiennent compte des exigences de qualification des ressources humaines dans un monde globalisé et compétitif, afin de garantir le développement durable de l’Afrique. Tunis 2008 a poursuivi cette réflexion en faisant le lien entre éducation technologique et lutte contre la pauvreté car, en situation de pauvreté, vous conviendrez avec moi, qu’il n’y a pas de développement durable possible. Mesdames et Messieurs, au XXIe siècle, la connaissance est un facteur de production et de développement, donc de lutte contre la pauvreté. Aussi, les percées rapides de la technologie et des communications offrent-elles des possibilités énormes dans l’acquisition des nouvelles qualifications. C’est la raison pour laquelle nous avons invité les communicants à placer l’enseignement technologique au centre de leurs préoccupations. Permettez-moi de vous exprimer, au nom du bureau exécutif et du Comité scientifique du RAIFFET, notre grande satisfaction. En effet, par des études de cas inspirées des contextes différents, vous avez débattu des risques d’une acculturation technologique tout en relevant les effets positifs de son appropriation. À travers vos communications, vous avez également relevé la nécessité de prêter désormais attention aux compétences à mobiliser dans les petits métiers afin de les associer pleinement au développement des économies nationales. En complément du colloque de Libreville, vous avez voulu réaffirmer la nécessaire relation entre les contenus de formation et les besoins économiques de nos pays, décrivant ainsi la formation professionnelle comme un outil de lutte contre la pauvreté, donc un espoir pour le développement de l’Afrique.
Dans ce prolongement, vous avez tenu à mentionner que l’efficacité de la formation professionnelle dans la lutte contre la pauvreté dépend en grande partie des organisations scolaires, donc des systèmes éducatifs de nos différents pays. Pour ma part, je pense que nous pouvons partir d’ici avec le sentiment d’avoir enrichi le débat sur la question du développement et de l’apport de l’enseignement technique et professionnel dans la lutte contre la pauvreté en Afrique. Aussi, tenons-nous à exprimer notre sincère reconnaissance aux autorités qui ont contribué à la tenue de ces assises de Tunis. Au moment où nous nous apprêtons à quitter la terre tunisienne, sachons que notre tâche n’est pas achevée. Nous avons fait des constats sur nos systèmes éducatifs et de formation et sur l’économie africaine. Nous avons débattu de leur avenir, nous avons pris des résolutions. Je pense qu’il nous faut désormais réfléchir à la phase de leur application concrète. J’exhorte donc chacun à faire un effort de réflexion pour la mise en oeuvre des conclusions de ces assises dans son pays. C’est en cela que nous pourrons honorer et remercier les partenaires financiers et scientifiques qui ne cessent de se mobiliser, à chacune de nos sollicitations. Avant de terminer mon propos, je tiens, une fois de plus, à témoigner ma profonde gratitude à tous les soutiens tunisiens, gabonais et internationaux pour l’intérêt qu’ils ne cessent d’accorder aux actions du RAIFFET. Je tiens également à remercier tous les participants qui, en marge de leurs lourdes charges professionnelles, ont accepté de faire le déplacement de Tunis. Merci, enfin au Comité d’organisation pour sa bienveillante attention. A tous et à chacun, bon retour dans vos pays respectifs. Je vous remercie.
Téléchargez les actes du colloque international #RAIFFET2008 de Hammamet en TUNISIE du 15 au 18 avril 2008
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