La formation des formateurs à l’élaboration d’un curricula : cas des formateurs des inspecteurs de travail Fidele Ngouih ngouih@yahoo.fr

La formation des formateurs à l’élaboration d’un curricula  cas des formateurs des inspecteurs de travail

La formation des formateurs à l’élaboration d’un curricula cas des formateurs des inspecteurs de travail

Résumé

Le concours d’entrée à l’École nationale d’administration et de magistrature (ENAM) est généralement très sélectif pour toutes les sections parce que le souci est d’acquérir des agents des services publics qui suivent une formation théorique et pratique qui doit leur permettre d’exercer correctement leur profession. Mais faut-il encore disposer des formateurs compétents et des programmes d’enseignement adaptés pour atteindre l’objectif.

C’est ainsi que dans le cadre de la formation des inspecteurs du travail, il a été ardemment souhaité que les programmes d’enseignement soient harmonisés avec ceux des autres institutions sœurs de la sous-région. C’est ainsi qu’il a été décidé l’élaboration un nouveau curricula de formation pour rendre conforme à la mission principale de veiller à l’application correcte de la législation du travail au sein des entreprises avec un champ d’action très vaste englobant entre autres le milieu et les conditions de travail, les relations professionnelles, les conditions générales de travail, le travail des couches vulnérables notamment les enfants et les femmes, etc. Ce travail étant soigneusement fait par une équipe constituée à cet effet, il ne restait qu’à le vulgariser aux formateurs qui sont les acteurs de formation.

C’est dans ce contexte, qu’un atelier d’une semaine a été convoqué pour que la direction pédagogique, les experts du ministère du Travail et de l’emploi et les formateurs du domaine se retrouvent pour passer au peigne fin le travail soumis à l’appréciation de la plénière pour validation définitive. Cette occasion ambitieuse répond aux objectifs auxquels nous sommes parvenus :

  • la description d’un nouveau profil d’inspecteur du travail conforme aux normes internationales et aux régulations du marché du travail ;
  • la mise en adéquation la formation des inspecteurs et les attentes des bénéficiaires (administrations, employeurs et employés) ;
  • la révision du contenu des programmes de formation des inspecteurs, contrôleurs, du travail.

Les inspecteurs du travail ne doivent pas être désormais des titulaires de diplômes universitaires (maîtrises ou tout autre diplôme jugé équivalent) recrutés sur titre mais ceux recrutés sur une base prédéfinie et formés pour qu’ils répondent aux attentes des parties en présence.

Introduction

La formation est un enseignement destiné à donner à une personne ou un groupe de personne, les connaissances théoriques et pratiques acquises dans un domaine, un métier ou une activité. Il est toutefois possible de mettre en avant les principales caractéristiques effectives de l’activité d’enseignement. Cette dernière serait :

  • une activité relationnelle impliquant la coopération, la compréhension mutuelle d’au moins deux personnes : un enseignant et un ou des apprenants ;
  • la communication impliquant un échange (uni- ou bidirectionnel) d’informations entre l’enseignant et un ou des apprenants ;
  • centrée sur un but d’apprentissage des apprenants, ou encore la maîtrise d’un contenu, l’acquisition d’habiletés ou d’informations ;
  • à propos d’un contenu donné pouvant être des connaissances, des croyances, de l’information, des comportements ; et pouvant de plus avoir des caractéristiques particulières ;
  • dans laquelle l’enseignant aurait un comportement spécifiquede présentation, de clarification, d’évocation, d’indication,
  • et dans laquelle les états mentaux (intentions, croyances) des protagonistes peuvent jouer un rôle important, et être mutuellement inférés.

Cette définition est très générale ; on pourrait par exemple préciser dans quelles conditions et surtout avec quelles habiletés l’enseignement est mis en œuvre. Parvenir à les détailler nous permettrait de mieux comprendre le processus d’enseignement, et donc de mieux pouvoir l’étudier. Dans cette perspective, il est préférable de lister, champ par champ, les conditions cognitives etenvironnementales rendant l’enseignement possible et de s’interroger sur leur caractère nécessaire et/ou suffisant. C’est ce que nous allons tenter d’aborder dans le cadre spécifique de la formation des inspecteurs de travail.

Les services d’administration et d’inspection du travail sont animés par des hommes et des femmes ayant des compétences avérées dans plusieurs matières de spécialité. Ces hommes et ces femmes sont pour la plupart d’entre eux diplômés de grandes écoles d’administration où ils accèdent après un concours sélectif pour devenir inspecteurs, administrateurs ou contrôleurs du travail.

Leur cursus de formation, dans ses dimensions théorique et pratique, doit être adapté à leur mission principale qui est de veiller à la bonne application de la législation du travail sur les lieux de travail.

Avec un champ de compétences très étendu englobant notamment la sécurité et la santé au travail, la sécurité sociale, les relations professionnelles, le travail des enfants, les normes du travail, etc., l’inspecteur du travail doit, au-delà de la maîtrise du cadre administratif et légal de son action, comprendre son environnement économique et social, y compris les problèmes spécifiques à l’économie informelle ainsi que les nombreuses mutations en cours au sein du monde du travail.

Face aux enjeux, en particulier la problématique de la protection de la santé et de la sécurité au travail, il doit, au-delà du simple rappel des dispositions réglementaires, pouvoir identifier et analyser efficacement les risques en situation de travail, informer et sensibiliser les employeurs et les travailleurs sur des comportements à risques.

Ainsi donc, la formation des inspecteurs du travail doit être aussi adaptée et dynamique que possible et porter sur un contenu actualisé. Or, force est de constater que les programmes de formation initiale ne sont pas tout à fait en adéquation avec l’évolution technologique et les nombreux changements qui affectent le marché du travail. De plus, la formation est encore trop académique et la professionnalisation de la formation partielle : les connaissances délivrées ne correspondent pas aux besoins des inspecteurs du travail qui, souvent, ne sont pas suffisamment préparés à assumer leur mission de contrôle et de conseil dans les entreprises ou sur les chantiers. La formation d’un inspecteur du travail nécessite non seulement la transmission de connaissances sur les champs de compétences et la réglementation applicable mais doit aussi porter sur d’autres aspects importants tels que le savoir être et le savoir-faire qui sont des qualités essentielles pour mener à bien une visite de contrôle, intervenir dans le règlement d’un conflit individuel ou collectif de travail ou conduire une enquête à la suite d’un accident du travail mortel, etc. L’acquisition d’un savoir-être et d’un savoir-faire ne peut s’envisager sans le concours de formateurs avertis issus eux-mêmes des services d’inspection du travail et ayant des approches basées sur des éléments théoriques et pratiques en phase avec les réalités sur le terrain. Cette démarche suppose une relation forte, structurée et bien articulée qui fait souvent défaut, entre les administrations du travail et les structures de formation des inspecteurs du travail, à savoir les Écoles nationales d’administration ou les autres institutions dédiées parfois placées sous la tutelle d’autres administrations (fonction publique, enseignement supérieur…).

Il s’avère important d’assurer la formation des formateurs sur le contenu de la formation, afin d’améliorer la qualité de la formation initiale et continue des inspecteurs qui deviendront mieux outillés pour répondre de façon plus satisfaisante aux besoins de l’entreprise et des travailleurs. Cette formation doit se baser sur un référentiel d’activités conséquentes.

L’état des lieux

Il s’agit de passer en revue le programme existant ayant fait l’objet de formation des inspecteurs de travail (inspecteur de travail est un terme générique).

La formation des inspecteurs du travail que l’ENAM de Bangui assure est réservée à des candidats ayant réussi à un concours très sélectif. Ces candidats ont pour la plupart des spécialités différentes, toutefois, ils ont un niveau de formation de base leur permettant à l’issue de la formation professionnelle de s’acquitter correctement des missions qui leur sont confiées dans l’exercice de leurs fonctions.

Cette formation initiale professionnelle dure deux ans dont une année de formation théorique à l’école au cours de laquelle ils reçoivent des enseignements fondamentalement basés sur un ensemble de modules que l’on peut regrouper autour de trois grandes charpentes que sont :

  • la formation juridique de base aux droits de l’emploi et du travail ;
  • l’administration du travail et son environnement institutionnel et économique ;
  • l’administration, la technique et la déontologie de l’inspection du travail ; et une année de stage pratique en milieu professionnel qui, à terme, devrait leur permettre de mieux faire connaissance avec leur nouvel environnement de travail mais également de mieux appréhender les savoir-faire attendus d’un cadre de la fonction publique et nécessaires pour bien mener la mission qui leur sera confiée.

Les forces de la démarche de formation

Comme nous l’avons souligné précédemment, le contenu de la formation est très diversifié et contient plusieurs disciplines notamment les matières liées au droit (droit administratif, droit du travail, droit syndical et organisations professionnelles), à la protection sociale (sécurité sociale, santé et sécurité du travail, médecine du travail, entre autres) et les méthodes et procédures de l’inspection du travail.

Après la formation initiale, les inspecteurs du travail, une fois en service, bénéficient de formation complémentaire à travers des séminaires ou ateliers organisés par l’État et/ou des partenaires techniques ou financiers.

Les faiblesses de la démarche de formation

Malgré tous ces atouts, il faut noter que la formation initiale des inspecteurs du travail présente quelques écarts qu’on est amené à corriger. Quelques constats sont que les destinataires de la formation sont souvent des récepteurs chargés d’assimiler des cours dont ils doutent parfois de la pertinence et de l’utilité.

Évoluant dans un environnement en constantes mutations avec des univers quasiment opposés (l’environnement des entreprises formelles étant totalement différent de celui de l’économie informelle), l’inspecteur du travail, pour bien réussir sa mission aujourd’hui, devrait, outre les qualités cardinales qui sont les siennes, faire preuve de plus de flexibilité et de savoir-faire/savoir-être dans des domaines aussi variés que la communication, la négociation pour d’abord convaincre les acteurs de l’informel des avantages de la formalisation mais aussi jouer sa mission d’appui-conseil chez les partenaires sociaux pour ne plus être perçu comme un « policier » chargé de réprimer les acteurs du monde du travail.

Pour cela, un accent devra d’abord être mis sur son profil au moment de son recrutement en prenant en considération les connaissances pré-requises pour l’accès à la corporation : connaissances académiques, connaissances du milieu professionnel, prédispositions à exercer la fonction…

Ensuite, le contenu de la formation et surtout les stratégies de formation devraient être revues en profondeur afin de la rendre plus efficace et efficiente.

Enfin, cela ne pourra se faire qu’à moyen/long terme à travers une formation professionnelle continue qui sera mise en œuvre par une ressource compétente ayant les pré-requis pour piloter le système de formation continue professionnelle.

Le synopsis des compétences requises de l’inspecteur du travail

L’inspecteur du travail devrait disposer d’un ensemble de compétences assez vaste reposant sur le devoir de garantir la protection des salariés et le respect du droit de travail. Il participe à la prévention des risques liés au travail par une activité de contrôle de l’application de la législation du travail dans tous ses aspects (santé et sécurité au travail, durée du temps de travail, travail illégal…), un appui-conseil en direction des employeurs et des salariés, suivre l’évolution de la réglementation en signalant, au besoin, à la hiérarchie, les écarts notés et les difficultés liées à l’application de la législation et les éventuelles insuffisances liées aux textes en vigueur.

Si dans l’espace du travail formalisé, des difficultés existent, elles sont d’un degré moindre comparées à celles que l’on rencontre dans le cadre informel. La question principale est de voir comment amener des acteurs parfois, sans aucune formation professionnelle de base formalisée à évoluer vers un formalisme progressif.

L’inspecteur du travail d’aujourd’hui devrait pouvoir faire face à ce défi. De ce fait, il doit se doter de nouvelles compétences qui lui permettent de mieux cerner l’environnement économique et social dans lequel il se meut. Cela passe nécessairement par une formation initiale professionnelle en phase avec les réalités socio-économiques.

C’est dans ce sens que le nouveau profil qui suit est proposé.

Le profil requis pour l’emploi type de l’inspecteur du travail

Le recrutement des élèves inspecteurs du travail se fait par voie de concours et est ouvert aux candidats externes c’est-à-dire des personnes diplômées en recherche d’emploi et aux candidats internes qui sont déjà en poste dans le métier et veulent accéder à un grade supérieur. Le profil qui leur est requis :

Savoir

  • Avoir le niveau baccalauréat au moins (pour les candidats externes) et plus éventuellement de 4 années d’études au
  • Disposer de connaissances sur les fondamentaux de la législation sociale (droit du travail et droit de la sécurité sociale).
  • Connaître les principes du tripartisme et du dialogue
  • Avoir une bonne maîtrise des normes et principes de droits fondamentaux du
  • Avoir de bonnes dispositions dans la communication participative et des qualités de négociateur.
  • Avoir une bonne maîtrise de l’outil informatique, des systèmes d’infor- mations et logiciel de base et savoir en faire bon

Savoir-être

  • Avoir le sens du contact, qualité d’écoute, bonne expression, bonne présentation et aptitudes pédagogiques.
  • Être rigoureux, objectif, disponible, discret, intègre, loyal…
  • Avoir la capacité à encadrer et animer une équipe, à manager de façon
  • Pouvoir mettre en œuvre des fondamentaux du code de déontologie de l’inspecteur du Travail
  • Être méthodique et organisé pour pouvoir travailler sous pression et sur plusieurs dossiers à la

Savoir-faire

  • Avoir une capacité d’analyse, de synthèse, de conception, de rédaction, de négociation.
  • Être capable d’effectuer des contrôles normatifs au sein des
  • Être capable de faire preuve de capacité d’anticipation et être
  • Être capable d’utiliser ses qualités de communicateur en public et de négociateur.
  • Être capable d’apporter aux acteurs du monde de travail l’appui-conseil nécessaire et
  • Être capable de mettre en œuvre les mécanismes et stratégies de conciliations généralement utilisées dans le dialogue
  • Être capable de planifier, de suivre et d’évaluer l’ensemble des actions menées dans le cadre de la

Outre ces compétences qui lui permettent de bien veiller à l’application de la législation du travail, l’inspecteur du travail devra désormais être ce fin négociateur à même de convaincre les acteurs les plus sceptiques du monde formel et informel de la nécessité de changer la perception qu’ils ont de la formalisation de leur environnement de travail.

De tout ce que nous venons de développer, nous retenons que les missions principales de l’inspecteur du travail consistent essentiellement à :

  • Contrôler l’application du droit du travail dans tous ces
  • Conseiller et informer l’employeur, les salariés et les représentants du personnel sur leurs droits et
  • Faciliter la conciliation amiable entre les parties notamment en cas de conflit.
  • Veiller l’obligation générale d’assurer aux travailleurs la protection de la santé et la sécurité.
  • Évaluer les actions menées quelles que soient leur
  • Veiller à la facilitation de connaissance et à l’application des principes et normes internationales du droit du travail.

Pour se rendre compte que l’objectif de la formation est atteint, il faut procéder à l’évaluation.

La dimension de l’évaluation

Cette démarche ne sauraitprospérer sans la mise en place d’un système d’évaluation cohérent.

Évaluer, c’est attribuer une valeur à quelqu’un ou à quelque chose. Le supérieur hiérarchique apporte un jugement sur l’agent et sur son travail.

Comment ?

La question du comment concerne la manière de faire l’évaluation. Le supérieur hiérarchique doit se poser deux questions essentielles :

  • Quelle est la méthodologie à utiliser pour que l’entretien d’évaluation soit un moment d’échange, de discussion entre l’agent et son responsable ?
  • Comment faire pour attribuer une valeur juste sur le travail de l’agent et sur sa personnalité ?

Pourquoi ?

C’est le but de l’évaluation, les enjeux. À quoi sert l’évaluation ?

L’évaluation permet de mesurer la performance de l’agent et aussi un moyen d’apprécier ses résultats. Cette appréciation peut donc être positive ou négative.

Trois éléments caractérisent un outil d’évaluation :

La fidélité : elle permet de voir si nous allons avoir les mêmes résultats lorsque le même test est appliqué à des personnes différentes sur un moment donné.

La sensibilité : c’est la capacité de l’outil à départager les personnes évaluées. Tous les agents d’une même structure, d’un même service ne peuvent pas avoir une évaluation positive voire identique.

La fiabilité prouve le degré de pertinence de l’outil d’évaluation.

Pour évaluer correctement un travail, il faut préalablement que les parties se fixent des objectifs clairs (et SMART) pour utiliser un concept très pertinent. Autrement dit, l’objectif doit être spécifique (lié à la personnalité et au profil de celui à qui il est fixé), mesurable (en termes de chiffre), atteignable (en termes de faisabilité donc réaliste), réalisable (humainement possible) dans le temps (sur une durée limitée).

Cette stratégie permet à l’évaluateur comme à l’évalué de pouvoir mesurer le chemin parcouru et ce faisant de corriger progressivement sa copie pour se réajuster au besoin.

Conclusion

Le capital humain est très important mais un accent doit être mis sur sa formation (initiale et continue) pour tenir compte du contexte de la mondialisation et de l’évolution technologique, le programme initial de formation des inspecteurs du travail a connu une révision substantielle dans notre institution de formation. Les objectifs visés par cette révision sont de parfaire la formation par des enseignements spécialisés et techniques, de compléter la formation théorique par des exercices et travaux pratiques sur des cas concrets et de renforcer la capacité managériale des apprenants. Sachant que le colloque qu’organise le RAIFFET est un cadre d’échange entre enseignants et chercheurs, il nous a plu de proposer cette communication pour donner une information sur ce métier et avoir l’avis des amis sur la révision de curricula.


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