RAIFFET 2008 Approche des procédures d’élaboration des référentiels professionnels : la question de l’accès au savoir de référence dans la formation des assistant(e)s de direction Denise Moukagni

Approche des procédures d’élaboration des référentiels professionnels  la question de l’accès au savoir de référence dans la formationdes assistant(e)s de direction
Denise Moukagni

Approche des procédures d’élaboration des référentiels professionnels la question de l’accès au savoir de référence dans la formation
des assistant(e)s de direction
Denise Moukagni

Summary

The objective of professional training is initially to prepare with the exercise of the profession, by the acquisition of the qualifications, competencies, knowledge and know-how necessary. The need for a real collaboration between schools and companies, as well improves quality of the education system, as competitiveness in company. This partnership must be based on the reference plan of formation. In the case of Gabon, one notes unfortunately that there does not exist reference plan of formation. To mitigate this deficit, the persons in charge practice copy-to stick, starting from the French reference contents. This transposition, without adaptation specific to the Gabonese environment, does not go without consequences. Fault of institution essential to the training of the trainers and the coordination of the programs, the step opens on inevitable controversies, on interpretation as on the contents being taught. In our communication, we present elements of analysis which express the need for a taking into account of the real activity of the actors, in the installation of the professional reference frames.

Introduction

Dans l’enseignement technique et professionnel, le référentiel constitue un support pédagogique de base. En effet, le référentiel sert à valider les acquis de la formation. Il constitue donc un outil indispensable à la formation et une référence pour l’enseignant. En tant que formateur, l’inexistence de cet outil dans la formation de l’assistant(e) de direction au Gabon, nous a interpellé et nous a conduit dans notre travail de recherche à nous interroger sur ce qui préside à l’élaboration des référentiels dans le cadre de la formation professionnelle. À ce propos nous avons cherché à déceler comment l’analyse du travail est prise en compte dans le processus d’élaboration de ces référentiels de formation. Nous avons donc choisi d’observer une procédure éprouvée au sein de l’espace francophone, en l’occurrence en France. Notre démarche se veut être une contribution dans la recherche de solutions, et vise surtout la mise en place d’outils de formation permettant d’aboutir à une possible adéquation entre la formation et l’emploi, tant souhaitée par les acteurs du système éducatif gabonais, notamment au regard des recommandations faites lors de diverses rencontres, dont les états généraux de l’éducation et de la formation (1983) et la conférence mondiale sur l’éducation pour tous (1990) s’agissant des plus emblématiques. Dans ce sens, notre travail soutient l’hypothèse selon laquelle l’élaboration des contenus de formation doit prendre en compte l’activité réelle des acteurs.

Question de recherche

La formation professionnelle de l’assistant de direction vise l’acquisition de compétences. Or, il apparaît que pour construire une formation qui a pour objectif l’acquisition et le développement des compétences professionnelles, il est nécessaire de procéder à une analyse du travail réel et prescrit (Pastré). Dans ce sens, en recherchant une convergence du système éducatif et des entreprises en tant que processus global de rationalisation, l’éducation nationale, en France, suppose et inclut des processus de rationalisation secondaire. De fait, l’ajustement des procédures de création ou de rénovation des diplômes de l’enseignement professionnel constitue l’un de ces processus. Ainsi, l’éducation nationale a introduit la procédure qui consiste à construire tout nouveau diplôme, ou à réactualiser les diplômes anciens, en s’appuyant sur un référentiel d’activité professionnelle, pour élaborer le référentiel du diplôme, permettant a priori, un ajustement de la formation à l’emploi et de rapprocher l’école du monde économique. Mais la réalisation du référentiel des activités professionnelles n’est possible qu’après validation d’un dossier d’opportunité. Ce dossier constitue l’analyse de la branche professionnelle en articulation avec l’emploi visé, en termes de gestion de main-d’œuvre, de qualification, de formation. Pour l’élaboration de ce dossier, un appui méthodologique peut être apporté au demandeur. Dans ce cas, l’analyse va s’appuyer sur la méthode emploi-type étudié dans sa dynamique (ETED)124 qui est une méthode d’analyse des emplois fondée sur une analyse du travail et visant à mettre en place une gestion anticipée des compétences. La démarche ETED propose un mode d’analyse des situations individuelles de travail qui repose pour l’essentiel sur la conduite d’entretien. Au regard de ce qui précède, la démarche préconisée par la méthode ETED, permet-elle une analyse suffisante de l’activité pour en tirer des savoir de référence ?

Cadre théorique

Dans une première approche, notre travail se situe dans le contexte théorique de l’acquisition et de la transmission des savoir ainsi que de la transposition didactique (Chevallard, 1991 ; Johsua, 1996 ; Ginestié, 1992). La situation d’enseignement doit être pensée dans une relation ternaire entre le maître, l’élève, le savoir. Puisque l’élève n’est pas d’emblée en contact avec le savoir, qu’il lui revient de s’approprier, une médiation va nécessairement s’opérer à travers un processus de transposition didactique. Dans cette théorie de la transposition didactique, la question de la référence est centrale.

En second lieu, nous situons notre recherche dans un courant des sciences humaines, la théorie de l’activité, qui se concentre sur la médiation par l’outil. Ce qui nous a permis de convoquer des concepts de l’activité, notamment avec Engeström (1987). Pour cet auteur, la médiation qui existe entre le sujet et l’objet de l’activité est représentée par le concept d’outil représentant tout ce qui est utilisé dans le processus de transformation, incluant aussi bien les outils matériels que les outils pour penser. De fait, l’activité doit représenter selon les cas un sujet, un objet vers lequel l’activité est dirigée, un outil qui influence fortement l’activité, une communauté, une division du travail qui permet à chacun de connaître ses responsabilités pour la réalisation de l’activité, des règles pour médiatiser la relation sujet- communauté. Enfin, nous avons fait appel au champ de la didactique professionnelle, centrée sur l’activité du sujet en situation de travail (Pastré, 2005 ; Samurçay, Pastré, 2004).

Méthodologie et analyse des résultats

Pour le recueil des informations, nous avons entrepris un travail documentaire. Ce travail nous a permis de rassembler des documents écrits sur la démarche ETED. C’est une démarche qui est articulée en cinq étapes qui ont respectivement pour objet : la définition de l’étude, le cadrage premier degré, le cadrage deuxième degré, l’enquête proprement dite et le traitement.

124 la méthode ETED a été crée par Nicole Mandon en 1990. Cette méthode a été mobilisée à plusieurs reprises dans le cadre de la refonte des filières de formation initiale professionnelle ou technique.

Les indicateurs Intérêt Ce que cela permet de voir
L’objet représente le motif de l’activité le titulaire répond à des questions qui se rapportent à l’objet de son activité
Le sujet pour exister, l’activité doit au moins comporter un sujet le sujet, est placé au centre de son questionnement
La communauté permet de rendre compte du fait que l’individu n’est pas isolé. dans le questionnement, il est fait référence au réseau de relations du titulaire d’emploi
L’outil l’outil médiatise la relation sujet-objet il est donné au sujet l’occasion de dire comment il s’y prend pour réaliser son objet
Les règles les règles médiatisent la relation sujet- communauté au cours de l’interrogation il est fait

référence aux normes, à la fois réglementaires et opérationnelles

La division du travail permet à chacun des sujets de connaître ses responsabilités pour la réalisation de l’activité. le sujet est invité à répondre sur des attributions pouvant lui échoir par excès

Tableau 1 : la méthode ETED à l’épreuve des concepts de l’activité (Engeström)

Sans rien enlever à l’intérêt que présentent les autres étapes, nous avons particulièrement regardé l’étape de l’enquête proprement dite, notamment le guide d’entretien avec le titulaire de l’emploi, qui est un document qui constitue une orientation à destination de l’enquêteur. Ainsi, au regard des concepts de l’activité et de la didactique professionnelle, nous nous sommes attachés à mesurer la capacité de la méthode ETED à rendre compte des savions de référence qui se manifestent dans les pratiques professionnelles.

L’analyse faite des différentes rubriques concernant l’entretien avec le titulaire de l’emploi, dont l’objectif est de permettre une analyse fine de l’activité nous permet de voir que la méthode ETED prend en compte le sujet par rapport à son activité avec les objets de son environnement. Cette prise en compte du contexte dans la compréhension d’une activité est une caractéristique fondamentale de la théorie de l’activité. Nous pouvons donc dire que cette méthode répond aux exigences fixées par les indicateurs de l’activité que nous avons retenus à partir des concepts développés par Engeström. À la base de l’approche de la didactique professionnelle réside un acquis, qui induit une méthode, dont la formulation la plus simple indique que c’est à partir des situations de travail que doivent se construire les situations de référence, nécessaires à la mise en place de supports didactiques (Rogalski et Samurçay 1994 ; Samurçay et Pastré, 2004).

À l’observation, on relève que dans son processus d’analyse du travail, la méthode ETED est une invitation à la description, de la tâche ou de l’activité, qu’elle permet d’examiner indistinctement et sans limite, notamment en accordant au sujet la faculté de revenir et d’insister sur des aspects insuffisamment abordés. Sans rien enlever aux mérites de l’approche descriptive, on doit relever que celle-ci ne se prête que très peu aux exigences de la didactique professionnelle, dont les attentes en terme d’expertise, d’ingénierie ou de savoir-faire sont à rechercher par une proximité avec la pratique effective du travail. A l’évidence, l’entretien est nécessaire. Mais, pour qu’il soit suffisant, un complément est à imaginer. Nous le suggérons dans l’observation, in situ de l’acteur au travail. En effet, la recherche de l’outil pouvant assurer au mieux l’identification des savoir de référence puisés de l’analyse des situations professionnelles, conduit au sens de la présente étude, à combiner l’entretien, dont le guide observé d’un point de vue qualitatif montre que les sept rubriques qui le composent invitent principalement l’acteur dans la description de sa tâche, une observation de l’acteur suggérée par la didactique professionnelle, qui propose de regarder l’activité du sujet en situation de travail.

Les rubriques Ce que cela permet de voir
L’entrée en matière Cette question présente un intérêt social, qui selon les cas, renvoie à la mobilité professionnelle ou à la stabilité de l’emploi, sans rapport direct avec la tâche ou l’activité.
Description du travail L’examen de cette rubrique permet de distinguer deux groupes de questions. Dans le premier groupe on peut associer les questions 1, 2 et 3. Alors que le second groupe comporte les questions 4, 5, 6, 7, 8 et 9.

Dans les questions du premier groupe le sujet est invité à présenter sa tâche, autrement dit ce qui est à faire, toute chose ne présentant pas a priori d’intérêt didactique majeur.

Les questions du second groupe ont une forte connotation pratique. Par ce fait, les résultats peuvent être porteurs d’enseignements, avec cette réserve suggérée par la psychologie du travail, sur la distance qui peut exister entre ce qui est prescrit et ce qui est fait, laquelle induit une autre, entre ce qui est

dit et ce qui est réellement fait.

Relations professionnelles Dans le cadre de cette question, le débat reste marqué par des préoccupations relatives à la tâche, qui relèvent du domaine de la

prescription, alors que la didactique professionnelle puise son intérêt dans l’analyse de l’activité.

Exigences L’interviewé restructure alors son activité en détaillant des niveaux de progression dans son travail et en se prononçant sur l’expérience et la complexité.

L’entretien sur les exigences évoque pour la première fois et de manière explicite les aspects liés aux compétences et aux savoir. Au-delà de l’énonciation, il reste que les savoir ou les attentes professionnelles doivent

être éprouvés à l’ouvrage, pour créer des situations professionnelles de référence.

Évolutions Les questions portant sur les évolutions professionnelles présentent un intérêt pratique évident. Reste une réserve, déjà formulée antérieurement, qui tient à la nature descriptive.
Conclusion Cette question peut ouvrir le débat, à la fois sur la description de la tâche ou de l’activité.

Tableau 2 : La méthode ETED à l’épreuve de la didactique professionnelle

Conclusion

Au terme de la présente réflexion, une évidence s’impose pour dire que l’entretien, comme moyen de collecte de l’information sur l’environnement professionnel, est nécessaire. Toutefois, l’examen du guide incline à relever que l’entretien est insuffisant pour prendre en compte toutes les dimensions de l’activité, notamment relative au réel de l’activité. Dans ce sens, il s’agit donc de rendre compte des pratiques des assistants de direction sur leur lieu de travail, par l’analyse de leur activité.

Bibliographie

Chevallard, Y. (1991). La transposition didactique. Du savoir savant au savoir enseigné. Editions la pensée sauvage

Engeström, Y. (1987). Learning by expanding an activity. Theorical approach to developmental

research, Helsinki. www.edu.helsinki.fi/activity

Ginestié, J. (1992). Contribution à la didactique des disciplines technologiques. Acquisition et utilisation d’un langage d’automatisme. Thèse de doctorat nouveau régime sous la direction de René Amigues

Johsua, S. (1996). Le concept de transposition didactique n’est-il propre qu’aux mathématiques ? In Caillot M. et Raisky C. (Éd) (1996), Au-delà des didactiques, le didactique. Débats autours des concepts fédérateurs. Bruxelles : De Boeck

Pastré, P. (2005). Analyse du travail et formation. Éducation permanente n° 165. La deuxième vie de la didactique professionnelle

Rogalski, J., Samurçay, R. (1994). Modélisation d’un savoir de référence et transposition didactique dans la formation professionnelle de haut niveau. In Arsac G., Chevallard Y, Martinand J-L, et Al (1994). La transposition didactique à l’épreuve. Grenoble : Éditions la pensée sauvage

Samurçay, R. & Pastré, P. (2004). Recherche en didactique professionnelle. Collection Formation, dirigée par Pierre Rabardel. Octarès

Résumé

L’objectif de la formation professionnelle est d’abord de préparer à l’exercice de la profession, par l’acquisition des qualifications, compétences, savoir et savoir-faire nécessaires. La nécessité d’une réelle collaboration entre l’école et l’entreprise améliore aussi bien la qualité du système éducatif que la compétitivité en entreprise. Ce partenariat doit s’appuyer sur le référentiel de formation. Dans le cas du Gabon, on constate malheureusement qu’il n’existe pas de référentiel de formation. Pour pallier ce déficit, les responsables pratiquent des copier-coller à partir des référentiels français. Cette transposition, sans adaptation spécifique à l’environnement gabonais, ne va pas sans conséquences. Faute d’institution indispensable à la formation des formateurs et à la coordination des programmes, la démarche s’ouvre sur d’inévitables controverses, sur l’interprétation comme sur les contenus à enseigner. Dans notre communication, nous présentons des éléments d’analyse qui manifestent la nécessité d’une prise en compte de l’activité réelle des acteurs, dans la mise en place des référentiels professionnels.

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