L’enseignement explicite : une organisation de formation innovante dans la filière des techniques administratives Catherine Nicole Biloa Fouda cnbiloafouda@gmail.com

L’enseignement explicite : une organisation de formation innovante dans la filière des techniques administratives Catherine Nicole Biloa Fouda cnbiloafouda@gmail.com

L’enseignement explicite : une organisation de formation innovante dans la filière des techniques administratives
Catherine Nicole Biloa Fouda cnbiloafouda@gmail.com

Résumé

Plusieurs écrits ont relevé l’inadéquation formation/emploi, en particulier dans notre contexte camerounais, due au non accomplissement de la mission de l’Enseignement Technique Professionnel (ETP).  Cette mission est orientée vers l’acquisition et le perfectionnement des connaissances et des savoir-faire requis pour l’exercice d’une profession exigeant une qualification. Afin de remédier à cette situation, il semble urgent d’adopter de nouvelles méthodes pédagogiques efficaces, tel que l’enseignement explicite qui a fait l’objet de validation et de légitimité au Canada depuis une décennie. Ce papier qui a pour objectif de montrer les atouts dudit enseignement va nous aider à comprendre comment l’enseignement explicite peut contribuer au développement des compétences exigées en techniques administratives.

Mots-clés

Enseignement technique professionnel, enseignement explicite, stratégies pédagogiques, méthode de cas

Introduction

Dans les clauses de la Convention de l’Enseignement Technique Professionnel, l’expression « enseignement technique professionnel » désigne toutes les formes et tous les degrés du processus d’éducation où interviennent, outre l’acquisition des connaissances générales, l’étude des techniques et des sciences connexes et l’acquisition des compétences pratiques, de savoir-faire, d’attitudes et d’éléments de compréhension en rapport avec les professions pouvant s’exercer dans les différents secteurs de la vie économique et sociale ».Ainsi, les considérations des besoins du développement économique, social et culturel se trouvent être au centre des préoccupations de cet enseignement soucieux de l’épanouissement personnel de l’individu. Dans cette optique, plusieurs missions lui sont assignées, entre autres, l’initiation de tous les jeunes à la technologie et au monde du travail dans le contexte de l’enseignement général et le développement d’une éducation visant l’acquisition et le perfectionnement des connaissances et des savoir-faire requis pour l’exercice d’une profession exigeant une qualification (UNESCO, 1989). En d’autres termes, il s’agit d’allier théorie et pratique, c’est-à-dire de mettre à l’épreuve l’acquisition des connaissances dans le cadre des enseignements dispensés dans l’institution de formation et la construction des compétences tout au long des périodes de stages professionnels. Or, plusieurs écrits relèvent l’inadéquation formation/emploi, le non accomplissement de ce deuxième volet de la mission de l’ETP dans notre contexte camerounais, à travers l’inexistence de conventions ou de partenariats entre l’Etat camerounais et le secteur privé, garants des offres de stages de formation.

Pour remédier à cette situation, du moins en partie, il semble urgent d’adopter de nouvelles méthodes pédagogiques ayant été éprouvées ailleurs afin de concilier intégralement la mission de l’ETP : d’où l’intérêt que nous portons sur l’enseignement explicite développé au Canada depuis plus d’une décennie. Comment cet enseignement explicite pourrait-il contribuer au développement des compétences exigées dans la filière des techniques administratives ?

Ce papier vise donc à montrer les atouts dudit enseignement pour permettre une appropriation collégiale à l’échelle nationale du modèle PIC de gestion des apprentissages par les acteurs principaux en charge de l’acquisition des compétences dans ladite filière.

Afin d’atteindre cet objectif, il est nécessaire de présenter, dans un premier temps, l’évolution des paradigmes qui ont jusqu’ici constituer la base de réflexion des approches pédagogiques. Ensuite va suivre l’énoncé théorique sur l’enseignement explicite afin d’éclairer davantage sur ses différentes modalités d’application pratiques. Le cadre méthodologique déployé pour essayer de répondre à notre questionnement de départ et les résultats de notre étude seront développés au dernier point.

Approche par objectifs vs approche par compétence : une évolution des paradigmes

Le behaviorisme, le cognitivisme, le constructivisme et socioconstructivisme sont les principales théories de l’apprentissage qui ont marqué le monde de l’éducation. Les postulats de chacune de ces théories sont présentés succinctement ainsi que leurs applications pédagogiques.

 Le behaviorisme (comportementalisme) et l’approche par objectifs

L’apprentissage ici renvoie à une modification des comportements c’est-à-dire de l’ensemble des réactions objectivement observables d’un organisme réagissant à un stimulus (Pavlov, 1848-1936 ; Thomdike, 1874-1949). L’apprenant est donc passif et formé par son environnement. Ce paradigme est à l’origine de la pédagogie par objectifs (PPO) ou approche par objectifs (APO), de l’analyse de tâches, de l’analyse de contenu, de l’évaluation, et du design pédagogique (Bloom, 1956 ; Mager, 1962 ; Basque, 1999).

Le postulat behavioriste se résume au fait que l’objectif pédagogique doit décrire le comportement final de l’apprenant en précisant les conditions dans lesquelles le comportement doit se produire et définir des critères de performance acceptables.

Le cognitivisme

Les sciences cognitives s’intéressent à la façon dont l’individu apprend, c’est-à-dire, à ce qui se passe vraiment dans la tête de l’apprenant (Bissonnette, Gauthier et Richard, 2005). Contrairement au behaviorisme, le cerveau n’est plus considéré comme une boîte noire. L’apprentissage est vu comme un changement dans les structures mentales ou représentations internes des individus, c’est un processus actif qui permet de traiter les informations en profondeur (Basque, 1999 ; Brien, 1997. Dans cette perspective, les cognitivistes s’attachent aux différences individuelles (style d’apprentissage, modèles mentaux, connaissances antérieures, motivation) et de ce fait, favorisent le développement d’environnements d’apprentissage adaptatifs. Les stratégies mises en place ici font appel à la résolution de problèmes, développent le processus métacognitif de l’apprenant et l’engage activement dans le processus de traitement de l’information (Gagné, 1976 ; Brien, 1997 ; Legendre, 2005).

Le constructivisme et le socioconstructivisme

Pour les constructivistes (Von Glasersfeld, 1995), l’apprentissage est défini comme un processus actif de construction des connaissances. L’apprenant construit ses propres connaissances en interagissant avec son environnement.

Le constructivisme s’est développé grâce aux travaux du psychologue Piaget (1896-1980) sur le développement de l’enfant. Pour ce chercheur, le savoir n’est ni inné, ni transmis par l’environnement, c’est une adaptation continuelle du sujet à la réalité à connaître, l’adaptation intellectuelle étant un état d’équilibre entre l’assimilation et l’accommodation.

Le socioconstructivisme, prolongement du constructivisme est né des travaux du psychologue Vygotsky (1896-1934) qui est à l’origine de la théorie socio-historique. Cette approche met l’accent sur le rôle socio- historique et les interactions sociales dans la construction des connaissances.

L’idée principale qu’on associe à cette nouvelle vision de l’enseignement et de l’apprentissage est celle de l’apprenant maître de son apprentissage, celui-là qui construit son propre savoir au contact de l’environnement et en interaction avec les autres. L’approche par compétences constitue une des applications les plus visibles du constructivisme, la compétence ici étant vue comme la capacité à mobiliser et à orchestrer un ensemble de ressources tant internes qu’externes (Tardiff, 2006). De ce fait, les constructivistes favorisent les stratégies pédagogiques telles que les expérimentations, la réalisation de projets, la résolution de problèmes globaux et significatifs comme l’apprentissage par problèmes (APP), les simulations, l’apprentissage collaboratif (communauté de pratique, communauté d’apprentissage ou technique d’enseignement réciproque), l’accompagnement cognitif (coaching, mentorat, tutorat, supervision, etc.). Ces stratégies ont pour but d’amener l’apprenant à maîtriser, à gérer et à autoréguler sa démarche d’apprentissage (Henri, 2001).

 

 

Tableau 6 : Vue synoptique des différents paradigmes

 
Behaviorisme
Cognitivisme
Constructivisme/
Socioconstructivisme
Année
50
80
90
Pionnier
Bloom (1956)
Mager (1962)
Gagné (1976)
Brien (1997)
Basque (1999)
Honebein, Duffy et Fishman (1993)
Von Glasersfeld (1995)
Wilson (1996)
Définition Apprentissage
Changement de comportement
Changement de structure mentale
Processus de construction des connaissances
Théorie sous adjacente
Conditionnement
Traitement de l’information
Réalités multiples
Attitude de l’apprenant
Passif
Actif
Actif
Application pédagogique
Approche par objectifs
Approche par compétences
Approche par compétences
Objectif d’apprentissage
Description du comportement final observable
Accent sur la compréhension, la résolution de problème et les habiletés métacognitives
Déterminé ou négocié par l’apprenant tout au long de l’apprentissage. Pas défini à l’avance

 

Plusieurs auteurs s’accordent à dire que la pensée behavioriste ou l’enseignement traditionnel qui autorise l’approche par objectifs est encore très présente dans le monde de l’éducation et dans tous les domaines de formation : programmes de formation, séance de formation. Si son intérêt est encore justifié dans l’enseignement primaire, il n’en est plus le cas dans l’enseignement secondaire technique. En effet, un des rôles essentiels de cet enseignement secondaire technique est de permettre aux jeunes de « développer suffisamment de compétences afin de pouvoir évoluer d’une façon socialement acceptable dans la société en mutation rapide et dans la vie professionnelle » (Hirtt, 2009). Ce propos conduit à comprendre la nécessité d’un changement d’approche pédagogique au vu des limites de l’approche par objectifs admises dans la littérature. Et même, la rapidité du développement technologique, social et économique a sensiblement accru la nécessité d’élargir et d’améliorer l’ETP dans notre contexte camerounais, afin de répondre à un souci global de développement, tant des individus que des sociétés. A cet effet, la mise en application d’autres modèles pédagogiques s’avère incontournable et leur appropriation une extrême urgence, les méthodes dites traditionnelle, active ou participative utilisant des outils obsolètes ou étant devenues elles-mêmes inefficaces pour l’évaluation des compétences acquises tant par l’enseignant que par l’apprenant. Le modèle PIC dont s’inspire l’enseignement explicite semble aider à contourner l’obsolescence des outils et favoriser l’appréciation en situations réelles de l’acquisition des compétences ou non.

Énoncé théorique sur l’enseignement explicite

Dans cette partie, une petite revue de la littérature est effectuée afin de montrer la validité et la légitimité scientifique de ce type d’enseignement avant de développer ses modalités d’application pratique.

Revue de la littérature

Les recherches en sciences de l’éducation sont très nombreuses et de natures diverses quant aux contenus et aux méthodologies employées. En effet, d’après la classification des recherches dans ce domaine proposée par Jeffrey et Fouts en 1993 à l’Université du Tennesee, il existe 3 niveaux de recherches.

Le niveau 1 concerne les études descriptives et englobe les recherches de base en éducation (enquêtes, études de cas ou recherches réalisées dans les laboratoires). Le but des recherches de ce niveau est pluriel.

Le niveau 2 est constitué des études expérimentales qui permettent de vérifier ou d’infirmer une hypothèse émise lors d’une étude de niveau 1. La validité scientifique de ces études est plus élevée que celle du niveau précédent.

Les recherches de niveau 3 évaluent les résultats de la mise en œuvre des théories validées au niveau 2 lors d’études à grande échelle. En outre, ces recherches étudient généralement plusieurs composantes des effets de la mise en pratique de ces théories. Ce niveau est le plus fiable au plan scientifique, d’après ces mêmes auteurs, dans la mesure où les observations et les expérimentations menées dans ce niveau fournissent des « données probantes », c’est-à-dire fiables, validées, sur lesquelles les enseignants peuvent fonder leurs pratiques professionnelles avec l’assurance que celles-ci sont soutenues et étayées par une recherche de qualité. C’est donc à ces données dites « probantes » que se réfère constamment la pédagogie ou enseignement explicite (Explicit Instruction), en particulier les données qui définissent les pratiques d’enseignement efficace.

En France, l’analyse de ces pratiques fait l’objet de deux ensembles de travaux. Le premier groupe s’active à décrire différents aspects de ces pratiques, à travers l’analyse des modalités de mise en œuvre des curricula[1]. Le second groupe s’active à mettre en relation certaines pratiques déclarées des enseignants avec les acquisitions des élèves dans le but explicite de mesurer leur efficacité éventuelle. Dans ce contexte français, cependant, on relève une rareté de travaux inscrits dans ce second groupe contrairement aux nombreuses études anglo-saxonnes menées depuis les années 60 (Bressoux, 1994). Le même constat est fait en Afrique, voire au Cameroun. D’où l’intérêt de s’appesantir aujourd’hui sur cet enseignement explicite dont l’efficacité n’est plus remise en cause scientifiquement puisqu’ayant été validé dans d’autres contextes (Bissonnette et Al, 2010). Citons par exemple le projet Follow Through, la plus vaste expérimentation à grande échelle en Sciences de l’Education, menée de 1968 à 1976 aux USA[2]. Ainsi, l’enseignement explicite, de par son rapport constant au monde de la recherche en Sciences de l’Éducation et sa présence sur le « terrain » grâce aux enseignants qui mettent cette pédagogie, constitue une alternative possible pour le renouvellement des pratiques enseignantes, dans le but d’accroître leur efficacité. Mais de quoi s’agit-il concrètement lorsque qu’on parle d’enseignement explicite ?

Modalités d’application pratique

« Faire » de l’enseignement explicite, c’est travailler sur sa gestion de classe et sa gestion de la matière. Gérer sa classe suppose que l’enseignant fixe les conditions d’un travail efficace avant même l’enseignement de la matière. En ce qui concerne la gestion de la matière, il est impératif pour l’enseignant d’élaborer, pour chaque leçon, un plan et un déroulement précis, avec pour objectif la compréhension et la mémorisation.

Le plan d’une leçon en enseignement explicite

L’enseignement explicite s’articule autour de quatre phases bien définies, à savoir :

Phase 1 : Mise en situation (5 minutes)

Cette phase consiste pour l’enseignant, après avoir identifié les objectifs d’apprentissage, de presenter aux élèves les connaissances et les competences essentielles à acquérir (Perrenoud, 1985)

Phase 2 : Modélisation (10 minutes)

Ici, l’enseignant expose longuement les notions essentielles à maîtriser.

Phase 3 : Pratique guidée (20 minutes)

Elle est effectuée au niveau du groupe classe ou de ngroupes d’élèves plus restreints. Les élèves dirigés par l’enseignant, precedent à des manipulations dans le cadre d’un travail collectif, par groupe, individuellement.

Phase 4 : Pratique autonome (20 minutes)

Les élèves precedent à des exercices individuels si et seulement si les phases de modélisation et de pratiques dirigées ont permis une maîtrise suffisante de la notion.

Pendant ces quatre phases, l’enseignant est en interaction permanente avec l’apprenant (Bissonnette et Al, 2005). Cependant, pour cette interaction soit efficace, elle doit faire l’objet d’une preparation minutieuse. De meme, à la fin de la leçon, l’enseignant devra prévoir d’autres exercices afin de consolider les acquis. D’où la mise au point du modèle PIC de gestion des apprentissages en enseignement explicite.

Présentation détaillée du modèle

Le modèle PIC s’articule autour de trois dimensions essentielles à savoir : la Préparation (P), l’interaction (I), la consolidation (C). Détaillons chaque dimension pour mieux appréhender les sous-composantes y afférentes.

La préparation (P) :

Cette dimension qui interpelle exclusivement l’enseignant énonce plusieurs actions à entreprendre telles que préciser les objectifs d’apprentissage (spécifier ce qui est attendu des élèves au terme de la leçon en termes de comportement, contenu et conditions); identifier les idées maîtresses (repérer la fréquence d’apparition et l’importance dans le curriculum, regrouper par thèmes et catégories, déterminer le temps d’enseignement dévolu); identifier les connaissances préalables (planifier la vérification de la solidité des connaissances préalables, assurer un intervalle de temps moyen entre l’enseignement des connaissances préalables et des connaissances nouvelles); intégrer de manière stratégique les connaissances (identifier l’enseignement des connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles, organiser la séquence d’enseignement orientée du simple vers le complexe, planifier l’emboîtement hiérarchique des séquences d’apprentissage); planifier l’enseignement explicite des stratégies cognitives (planifier l’enseignement des stratégies cognitives permettant la résolution d’une famille de situations-problèmes); planifier les dispositifs de soutien à l’apprentissage (planifier les stratégies d’enseignement explicite à travers le modelage, la pratique dirigée et la pratique autonomes, planifier des séquences d’enseignement orientée du facile vers le difficile, organiser les connaissances à l’aide de schémas, graphiques, tableaux, listes de vérification); planifier la révision et la réutilisation des apprentissages (planifier la révision des idées maîtresses et des stratégies cognitives, planifier des occasions de révision suffisantes, distribuées, cumulatives, variées); vérifier l’alignement curriculaire (vérifier la cohérence entre les objectifs d’apprentissage, les activités d’apprentissage prévues et l’évaluation anticipée); préparer un canevas de la leçon (préciser les objectifs, planifier l’ouverture de la leçon en planifiant une façon d’obtenir l’attention des élèves, la présentation de l’objectif de la leçon, la justification de cet objectif, l’activation des connaissances préalable, la présentation aux élèves de la démarche qui sera empruntée au cours de la leçon, une mise en situation, le cas échéant, au regard du contenu de l’objectif d’apprentissage; planifier la conduite de la leçon en préparant le modelage, en planifiant la pratique guidée et la pratique autonome ainsi que l’évaluation des apprentissages; planifier l’objectivation de la leçon et déterminer un temps pour chaque étape et préciser le matériel requis).

L’interaction (I)

Dans cette dimension, il est recommandé d’élaborer deux types de stratégies : dans une approche générale et sur un plan spécifique. Les stratégies générales vont consister à maximiser le temps d’apprentissage scolaire, assurer un taux de succès, couvrir la matière présentée aux élèves, favoriser des modalités de regroupement efficaces, donner du soutien à l’apprentissage, prendre en compte différentes formes de connaissances, utiliser un langage clair et précis, vérifier la compréhension, expliquer, modeler, démontrer, maintenir un rythme soutenu, différencier autrement.

Les stratégies spécifiques, quant à elles, renvoient à la vérification quotidienne des devoirs, l’ouverture de la leçon (obtenir l’attention des élèves, présenter l’objectif d’apprentissage, activer les connaissances préalables), la conduite de la leçon (modeler ou démontrer les apprentissages à réaliser « je fais’, en utilisant des exemples et des contre exemples; guider la pratique « nous faisons ensemble », en enseignant des concepts, des habiletés et des règles, en démontrant étape par étape, en posant des questions et en sollicitant des réponses, en travaillant sur des problèmes déjà résolus, en utilisant le soutien approprié, en vérifiant la compréhension, en donnant de la rétroaction, en corrigeant et en félicitant afin d’obtenir un taux de réussite élevé; faire pratiquer de manière autonome « tu fais sans aide »); la clôture de la leçon (assurer l’objectivation des apprentissages réalisés, annoncer la prochaine leçon et poursuivre l’automatisation.

La consolidation (C)

Dans cette dimension, il s’agit de donner des devoirs et de procéder à des révisions quotidiennes, hebdomadaires et mensuelles.

Tous ces éléments sont répartis dans différentes fiches insérées dans un dossier pédagogique (voir annexes).

Utilité du modèle dans l’achèvement de la mission d’initiation professionnelle de l’ETP

Dans sa conception, le modèle PIC pourrait autoriser effectivement des simulations des situations réelles dont le contenu et les supports didactiques vont être préparés au préalable dans la partie planification de la conduite de la leçon. Ensuite, lors de la phase de déroulement de ladite leçon, l’ensemble des stratégies spécifiques vont être mises en œuvre dans la dimension interaction entre l’enseignant et l’apprenant. Pendant la durée de cet échange, des situations réelles orientées du facile vers le difficile vont être simulées afin de familiariser autant que possible l’apprenant au monde réel du travail. Cet exercice pourra être planifié dans une séquence, étape par étape, du moins à chaque fois que l’enseignant le jugera essentiel pour l’atteinte de son objectif pédagogique opérationnel (OPO). D’autres stratégies pédagogiques peuvent-elles être efficaces pour l’enseignement des techniques administratives ? Nous avons essayé de les identifier en procédant par des entretiens semi-directifs auprès de quelques enseignants des techniques administratives.

Identification des stratégies pédagogiques favorisant l’enseignement explicite en techniques administratives

Afin de comprendre comment l’enseignement explicite pourrait contribuer au développement des compétences exigées en techniques administratives, il nous semble impératif d’identifier les différentes stratégies pédagogiques mises en œuvre par les enseignants qui utilisent cette pédagogie. Pour ce faire, un cadre méthodologique a été déployé.

Déploiement d’un cadre méthodologique

La pertinence de la méthode de cas à expliquer des problématiques contextuelles n’est plus à démontrer en Sciences de l’Éducation. De plus, compte tenu de nos activités pédagogiques réduisant considérablement le temps pour la distribution et la collecte d’un questionnaire, nous avons procédé par entretiens semi-directifs à la constitution de l’échantillon de l’étude à l’aide d’un guide d’entretien. Concrètement et à partir de notre carnet d’adresses[3], 15 enseignants de la ville de Douala qui utilisent la pédagogie explicite ont été sélectionnés. Des rendez-vous ont été fixés avec chaque enseignant en fonction de sa disponibilité. C’est ainsi que nous avons pu interroger 10 enseignants au total (Yin, 1994) en procédant par “homogénéisation” (Pires, 1990).

Hormis la question d’ouverture qui a permis de retenir les cas sélectionnables, c’est-à-dire les enseignants qui pratiquent la pédagogie explicite, une autre question portait sur la (ou les) stratégie(s) pédagogique(s) mobilisée(s), leur concept et des exemples d’utilisation en techniques administratives. Leur avis sur la stratégie dominante (plus efficace) et l’enseignement explicite en général clôturait l’ossature du guide. Voici les résultats qui en découlent.

Résultats de l’étude

A l’issue du déroulement des entretiens, plusieurs stratégies pédagogiques ont été identifiées et consignées dans le tableau ci-après.

Tableau 7 : Recension des stratégies pédagogiques en Techniques administratives

Stratégies pédagogiques
Exemples d’utilisation
Stage de formation pratique
Le stage de formation pratique vise à permettre aux élèves de mettre en pratique, sur le terrain, les connaissances acquises pendant la formation, l’enseignement dispensé, de lui permettre de confronter ses connaissances théoriques aux pratiques réelles de conception et réalisation d’édifices.
Organisation des visites d’entreprises à défaut d’obtenir une période de stage bien définie et respectée.
Simulations
Méthode d’enseignement qui consiste à mettre à la disposition de l’élève ou apprenant un modèle d’un phénomène physique, social, administratif ou autre et à lui fournir la possibilité d’agir sur ce modèle et d’observer ainsi les conséquences des décisions qu’il a prises. Dans certains cas, on combinera les caractéristiques des simulations à celles des jeux éducatifs pour susciter davantage l’intérêt de l’élève.
Pour toutes les leçons dites théoriques, préparation du materiel didactique approprié afin de mettre en oeuvre une situation réelle.
Jeux de rôles
Méthode d’enseignement qui consiste à simuler une situation dans laquelle des relations interpersonnelles ont lieu et à faire assumer, dans le cadre de cette situation, différents rôles en vue d’une rectification éventuelle. Cette méthode est plus subjective que la simulation dans laquelle on note un souci de compréhension objective.
Outils de communication en entreprise

 

 

Stratégies pédagogiques
Exemples d’utilisation
Études de cas
Méthode d’enseignement qui consiste à proposer à un petit groupe (ou à un élève) un problème à résoudre dans un domaine de spécialisation donné et à le guider dans la résolution de ce problème. Le but premier de la méthode des cas est d’inciter les élèves à s’engager dans des démarches de résolution de problèmes et de favoriser ainsi l’assimilation de ces démarches.
Travaux d’application (TA) et travaux d’application et de synthèse (TAS)
Brainstorming
Le brainstorming est une technique de génération d’idées qui stimule la réflexion créative lors de la recherche de solutions pour un problème donné. Il s’agit de produire le plus d’idées possible dans un minimum de temps sur un thème donné et sans critiquer, sans juger. Cette méthode de recherche d’idées en groupe privilégie la quantité d’idées, la spontanéité et l’imagination.
Rédaction des écrits (administratifs et commerciaux)
Démonstration
Méthode d’enseignement utilisée pour illustrer un principe, un processus ou un mouvement quelconque. La démonstration consiste le plus souvent en la présentation, par l’enseignant, de ressources telles que des maquettes, des appareillages divers, des films, des diaporamas, etc. Lors de la démonstration, l’enseignant peut questionner les élèves de sorte à souligner les points importants de la démonstration.
Dans sa gestion de la matière en enseignement explicite, l’enseignant est appelé à modéler/démontrer les apprentissages à réaliser

 

A la lumière de ce tableau, six (6) stratégies pédagogiques ont été recensées et les enseignants qui les ont adoptées s’accordent sur le fait qu’il est recommandé de varier lesdites stratégies en fonction de la matière et même de les combiner. Néanmoins, la démonstration et la simulation sont largement adoptées par l’ensemble, après décompte de la fréquence d’apparition des différentes stratégies (5 enseignants pratiquent la simulation et 6 la démonstration, 3 le brainstorming, 2 l’étude de cas et 2 le jeu de rôle). La non apparition des stages de formation pratiques confirme le non achèvement de la mission de l’Enseignement technique professionnel (ETP) dans notre pays et compte tenu des tracasseries administratives et financières autour de l’organisation d’une visite d’entreprise, les enseignants ont choisi de ne pas adopter cette stratégie. De plus, ils déplorent le fait que la majorité de leurs collègues pratiquent encore l’enseignement traditionnel avec comme stratégies les cours magistraux, les travaux dirigés et pratiques à l’issue desquels les compétences seront évaluées. D’après les participants à cette étude, nous cheminons, petit à petit, mais sûrement, vers une formation innovante en techniques administratives à travers l’illustration de ces quelques stratégies pédagogiques déjà mises en œuvre et qui favorisent amplement la professionnalisation de la formation.

Conclusion

L’enseignant reste et demeure celui-là qui devrait être en contact permanent avec le marché de l’emploi (les entreprises) afin d’intégrer leurs exigences d’efficacité (de compétences) dans l’enseignement de sa matière afin d’aider à l’atteinte des objectifs organisationnels. La prise en compte de ces exigences s’effectue lors de la mise en œuvre du modèle PIC de gestion des apprentissages en enseignement explicite. Ce modèle semble donc être la clé de voûte d’une professionnalisation des enseignements en techniques administratives. Reste donc à sensibiliser tout le corps enseignant de cette spécialité afin de s’en approprier et éradiquer l’approche par objectifs encore très présente. Comme perspective de recherche future, il serait intéressant d’analyser en profondeur les implications de chaque stratégie pédagogique par rapport aux domaines cognitif, affectif et psychomoteur.

Bibliographie

Basque, J. (1999). L’influence des théories de l’apprentissage sur le design pédagogique, Télé-Université et École de Technologie supérieure, notes de cours.

Bissonnette, S., Richard, M., Gauthier, C. & Bouchard, C. (2010). Quelles sont les stratégies d’enseignement efficaces favorisant les apprentissages fondamentaux auprès des élèves en difficulté de niveau élémentaire ? Résultats d’une méga-analyse. Revue de recherché appliquée sur l’apprentissage, vol. 3, article 1, p. 1-35.

Brien, R. (1997). Sciences cognitives et formation, Presses de l’Université du Québec, 3e édition.

Hirtt, N. (2009). L’approche par compétences : une mystification pédagogique. In L’École démocratique n° 39, septembre.

Legendre, R. (2005). Le dictionnaire actuel de l’Éducation, 3e édition, Guérin, Montréal.

Mager, R. F. (1962). Comment définir des objectifs pédagogiques. Paris : Ed. Bordas.

Perrenood, P. (2000). Construire des compétences dès l’école, Issy-les-Moulineaux : ESF éd.

Savoie-Zajc, L. & Karsenti, T. (2000). Introduction à la recherché en Éducation, Éditions du CRP, Sherbrooke.

Tardiff, J. (2006). L’évaluation des compétences.

Von Glaserfeld, E. (1995). Radical constructivism : a way of knowing and learning, London.

Wilson, B. G. (1996). What is a constructivist learning environment ? In Constructivist learning environments. Case studies in instructional design, Englewood Cliffs, NJ : Educational Technology Publications, p. 3-8.

 

[1] Il s’agit ici de la congruence et l’adéquation des instructions officielles avec l’enseignement effectivement réalisé et les évaluations (les interactions maîtres/élèves, les modes de groupement des élèves, l’organisation temporelle des activités).

[2] Cette étude a montré la supériorité du Direct Instruction (DI), modèle pédagogique de transmission directe et explicite des connaissances, mis au point par Ziegfried Engelmann, et dans lequel la guidance de l’enseignant est extrêmement forte. Cette supériorité est présente dans les trois domaines évalués (habiletés de base, habiletés cognitives et habiletés affectives).

[3] A la base, nous sommes Professeur des Lycées d’Enseignment Technique en Techniques Adminitratives (PLET/TA)

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