Summary
The adoption of the Millennium Development Goals (MDGs) and the importance attached to Education for all (EFA) mark an important turning point in the elaboration of a common initiative, which aims to improve living conditions of people worldwide. Its ambition is to eliminate misery and to increase wealth. The means to achieve this goal focus essentially on education, which has become a goal in itself: reduce illiteracy, ensure global access to basic schooling and promote equal opportunities for all. Through education other objectives can be targeted, such as promoting poverty reduction through gainful employment, gender equality, and sustainable development and partnerships for development. This paper aims to present the situation in sub- Saharan Africa (SSA) since the end of the 1990s and the international focus on these great programs.
Introduction
L’adoption par l’ONU des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) tout comme celle par l’UNESCO des objectifs de l’Éducation Pour Tous (EPT) marquent un important tournant politique visant à améliorer les conditions de vie de l’ensemble des populations. Il s’agit d’éradiquer la misère et la pauvreté dans le monde. Les moyens pour y parvenir se concentrent très largement sur l’éducation qui devient un but en soi : faire reculer l’analphabétisme, offrir un accès à tous à une école de base, promouvoir l’équité d’opportunités auprès de tous. Au travers de l’éducation, d’autres objectifs sont visés, comme la promotion de la lutte contre la pauvreté, de l’égalité entre les sexes, du développement durable ou encore de partenariats pour le développement. En Afrique Subsaharienne (ASS), malgré des progrès notoires, la situation à la fin des années 1990 est particulièrement contrastée, d’un pays à l’autre mais aussi en interne pour chacun d’entre eux.
Plusieurs indicateurs montrent que les problèmes de déscolarisation, d’analphabétisme, de discriminations sexuelles, sociales, culturelles ou ethniques sont récurrents et obèrent largement toute chance de développement des pays. En maintenant tout un pan des populations dans un état de sous-éducation la plupart des pays se privent des capacités de développement que devrait représenter une population jeune et dynamique. Cet article propose une analyse de l’évolution de l’EFTP en ASS en replaçant cette évolution dans un contexte général et plus global. Il s’agit de remettre en perspective les problèmes spécifiques et les actions entreprises – cela dans le temps de ces grandes orientations politiques et en tenant compte de la géographie complexe et des dimensions politiques de l’Afrique – pour entre les succès et les échecs qui émaillent cette route. Cet inventaire n’est naturellement pas approfondi.
2 UNESCO – BREDA – Bureau Régional de Dakar – Dakar (Sénégal)1 Aix-Marseille Université – EA 4671 ADEF – Gestepro – Marseille (France)
L’EFTP en ASS à l’aube des années 2000
Les grandes orientations internationales
Les prémices de la structuration de l’EFTP en ASS
La situation globale de l’EFTP est décrite dans les conclusions du « Deuxième Congrès international sur l’enseignement technique et professionnel » (UNESCO, 1999). De manière significative, l’EFTP se situe dans un large cadre de mise en valeur des ressources humaines qui englobe l’offre tout autant que les interactions entre l’offre et la demande (Rwehera, 2004; UNESCO, 1987). Cette offre comprend les divers niveaux et domaines des systèmes d’éducation et de formation formelle et non formelle, incluant l’enseignement technique ou la formation professionnelle. Elle comprend aussi les compléments de main- d’œuvre provenant de sources externes, notamment les travailleurs immigrés. De fait, à la fin des années 90, l’EFTP apparait, d’une part, solidement enraciné dans les idéaux et les objectifs de l’éducation et, d’autre part, généralement imprégné des critères du marché de l’emploi et des normes en vigueur dans le travail (Atchoarena & Caillods, 1999).
L’enjeu de scolarisation des enfants dans un pays repose pour partie sur les finalités de l’école (UNESCO, 2000). L’articulation entre éducation pour tous et formation professionnelle de chacun revêt un caractère particulier en ASS, particulièrement là où l’existence même d’une éducation pour tous reste un objectif à atteindre en cette fin de siècle. Dans ces conditions, l’EFTP apparait trop souvent comme un luxe hors de portée qui est négligé et renvoyé pudiquement au monde des entreprises, sommées de prendre en charge par elles-mêmes la formation de leurs employés et de leurs futurs employés. Or, avec des secteurs informels qui occupent souvent près de 80% de l’économie d’un pays, cette formation se retrouve réduite à des modes d’apprentissage par compagnonnage essentiellement fondés sur la reproduction par imitation des gestes traditionnels du métier (Sindzingre, 2006). L’institutionnalisation de l’EFTP dans des organisations et des structures conçues et prévues pour cela n’est pas chose aisée en soi. C’est un des constats de la conférence de Séoul, il y a des difficultés de financements des organisations d’EFTP et des difficultés liées à la structuration des filières d’EFTP (R. Reinikka & Svensson, 2001). Ces difficultés sont amplifiées en ASS par le déficit chronique de moyens nécessaires pour conduire des analyses des besoins en matière d’emplois et de qualifications.
Les évolutions technologiques obligent tous les pays à penser les changements, à en apprécier l’impact sur les emplois, les qualifications et donc sur l’EFTP, dans leurs contenus et leurs organisations. La fin du 20e siècle est marquée par des évolutions majeures de nos sociétés qui marquent l’importance de coordonner les politiques de développement en harmonisant leurs domaines d’application en ce qui concerne l’EFTP. Les propositions faites s’articulent explicitement aux objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et ceux proposés dans le cadre de l’éducation pour tous (EPT).
Les objectifs du millénaire pour le développement (OMD)
Les huit objectifs constituent un outil concret de lutte contre l’extrême pauvreté stratégiquement organisée autour de quatre pôles : la santé, l’éducation, l’égalité des droits et le développement. Les objectifs 1, 2, 3, 7 et 8 ne font pas explicitement référence à l’EFTP. Seule la cible 1B de l’objectif 1 fait implicitement apparaitre l’EFTP en proposant d’assurer le plein-emploi et la possibilité pour chacun, y compris les femmes et les jeunes, de trouver un travail décent et productif. Cette entrée pose les bases de la reconnaissance des qualifications professionnelles et celui du rôle des formations professionnelles pour y accéder. Se dégage ainsi un besoin d’accompagnement du développement économique des couches les plus défavorisées au travers de la structuration de l’emploi, de la reconnaissance des qualifications et du rôle important que doit jouer l’éducation professionnelle dans ce développement.
Le marché du travail doit être soutenu par le développement des qualifications et, finalement, par une réorganisation de la division sociale du travail en ASS. Ce sont les fondements même des économies locales, nationales, sous-régionales et régionales qui sont interrogées mais également les rapports économiques Nord-Sud. Atteindre cet objectif suppose des progrès significatifs dans d’autres domaines. Ainsi, l’objectif 3 – Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes – suppose de sortir les emplois féminins des formes d’emplois les plus précaires.
L’objectif 7 – Préserver l’environnement – suppose d’intégrer ces questions dans une perspective d’éducation professionnelle. L’objectif 8 – Mettre en place un partenariat pour le développement – interpelle directement l’organisation de l’EFTP, notamment, au travers de la cible 8b qui prévoit de mettre en place un système commercial et financier ouvert, réglementé, prévisible et non discriminatoire ou la cible 8e qui promeut la coopération avec le secteur privé pour rendre accessible à tous les nouvelles technologies, en particulier les technologies de l’information et de la communication.
Prétendre à l’efficacité de l’EFTP s’inscrit dans une démarche globale qui vise à imaginer et construire des solutions à tous ces problèmes. En ce sens, le rôle de l’EFTP souligne chacun des objectifs du millénaire au travers des efforts à accomplir dans la perspective de développement durable des sociétés, des organisations et des personnes.
Les objectifs de l’éducation pour tous
L’accès à l’éducation pour tous est une préoccupation majeure depuis de nombreuses années. Cet accès au savoir pour tous, au travers du partage des connaissances et du renforcement des capacités, est essentiel pour promouvoir les droits universels de l’homme dans nos sociétés modernes qui utilisent l’école afin de développer la citoyenneté et lutter contre les discriminations.
C’est dans ce cadre que l’Éducation pour tous est lancé en 1990 lors de la Conférence mondiale de Jomtien (Thaïlande), comme un engagement mondial visant à donner une éducation de base de qualité à tous. De nombreux pays sont loin d’avoir atteint l’objectif fixé comme le montre comme le souligne le rapport de par l’Institut International de la Planification en Éducation en 1996. L’étude a portée sur les programmes de développement de formation qualifiante préparant les jeunes à la vie professionnelle. En Afrique, nombre de projets essayent de renforcer des apprentissages traditionnels dans le secteur informel mais ils sont confrontés aux mêmes difficultés qui découlent des mêmes enjeux.
Ce sont ces défis d’EPT qui ont été posés du Forum mondial sur l’éducation (Dakar, 2000). Là encore, l’EFTP n’apparait pas explicitement bien que la complémentarité des objectifs 3 et 6 fournit des liens entre enseignement général et professionnel.
Les objectifs de l’EFTP
La conférence de Séoul visait à convaincre les principaux acteurs de l’importance des enseignements techniques et professionnels dans tout processus de développement. Les partenaires sociaux de l’EFTP ont été invités à proposer des pistes de travail afin de revoir les politiques et les pratiques pour qu’elles répondent au mieux aux besoins des futurs emplois. C’était également le point de départ de la stratégie de l’UNESCO pour les enseignements techniques et professionnels pour la décennie 2000-2010. À l’issue de la conférence, un ensemble de recommandations regroupées en six thèmes ont été élaborées.
Le premier thème concerne les nouveaux enjeux pour l’EFTP. La mondialisation et les rapides changements sociaux requièrent de nouvelles formes de développement. L’EFTP doit se centrer sur les besoins de développement humain et le renforcement de l’implication effective dans le monde du travail. Les recommandations du deuxième thème visent à améliorer les systèmes de formation tout au long de la vie qui doivent être ouverts, flexibles et orientés sur l’étudiant. Le troisième thème se rapporte à l’innovation dans l’enseignement et la formation. Les personnes formées doivent être préparées aux rapides évolutions ; les qualifications des enseignants et les organisations des capacités doivent être adaptatives à ces nouvelles situations. Les réponses traditionnelles en termes d’enseignement trouvent leur limite dans le cadre traditionnel ; la seule manière de favoriser l’EFTP est bien celle de promouvoir l’innovation pédagogique. Le quatrième thème vise à rendre l’EFTP accessible pour tous et à permettre aux communautés de relever de nouveaux défis. L’accès des populations marginalisées à l’EFTP revêt donc une importance particulière. Le cinquième thème se concentre sur le rôle de l’état et sur les autres autorités engagées dans l’EFTP et sur la nécessité de développer de nouvelles associations. Il s’agit de rendre plus logique les cadres législatifs et favoriser l’émergence de stratégies nationales de changement. Il s’agit de considérer l’EFTP comme un investissement et non pas une charge. Le sixième thème vise à renforcer les coopérations internationales en matière d’EFTP afin d’accroitre et optimiser les supports financiers et techniques des institutions internationales et améliorer ainsi les coopérations Nord-Sud. Ce thème souligne également la contribution de l’éducation et, en particulier, celle de l’EFTP au maintien de la paix et de la cohésion sociale.
Les conclusions de la conférence de Séoul sont explicites sur le rôle de l’EFTP dans le développement international. Bien que sujets de considérables variations en fonction des pays et de leurs contextes, tous les systèmes d’EFTP visent l’intégration professionnelle et sociale de leurs étudiants. Fondamentalement, un système d’EFTP sous-développé est incapable de promouvoir le développement du pays par l’éducation et la formation.
La situation de l’EFTP en ASS à la fin des années 90
Une scolarisation très faible et très inégale
Probablement en raison des situations politiques, économiques et sociales, la restructuration de l’EPT et de l’EFTP représente un enjeu majeur dans le processus de développement de l’ASS. Si l’on exclue les rares exceptions, tous les pays d’ASS sont loin à cette époque d’atteindre les objectifs du millénaire en relation avec l’école primaire universelle (Banque mondiale, 2010). En Afrique, ce sont 38 millions d’enfants qui ne sont pas scolarisés (environ 40%). Le taux de scolarisation des enfants est de 12% en pré- primaire et de 57% au primaire. Il y a de très importantes disparités d’un pays à l’autre. Le taux de scolarisation dans le secondaire est de 24% ; il tombe à 4% pour le supérieur et moins de 5% des enfants bénéficient d’une formation professionnelle.
Une étude de la Banque mondiale met en exergue le retard en matière de taux d’achèvement du primaire au cours des années 90 pour l’ASS. La réalisation des objectifs de l’EPT en ASS implique un véritable engagement politique et une affectation adéquate des moyens financiers. L’utilisation efficace des ressources induit de donner la priorité à l’amélioration des résultats d’apprentissage, à la satisfaction des besoins des groupes défavorisés, à l’accroissement des compétences en matière de conception et de mise en œuvre des politiques éducatives afin d’orienter l’économie de ces pays sur une trajectoire de croissance génératrice de ressources.
Une population jeune, rurale et peu employée
Plus globalement, à la fin des années 90, l’ASS, avec environ 650 millions d’habitants, est caractérisée par une population fortement rurale. Le taux de croissance est d’environ 2,65% par an mais c’est la population urbaine croit deux fois plus vite que la population rurale. Les jeunes de moins de 14 ans représentent 44% de la population, soit une population de 290 millions d’enfants scolarisables. À leur naissance, 47% des femmes et 40% des hommes peuvent espérer atteindre l’âge de 65 ans. Le développement des pays d’ASS repose sur leur capacité à offrir un avenir à cette jeune population et l’on mesure au travers de ces quelques chiffres l’importance quantitative et qualitative des enjeux d’accès à l’EPT et à l’EFTP. Notons un important changement de cap dans les stratégies des institutions internationales quant au rôle de l’État qui est largement réhabilité. Le rapport sur le développement dans le monde de 1997 défend le rôle de l’État dans les pays en développement qui ne doit plus être minimal. Il doit pouvoir fournir des biens publics, mettre en place les incitations nécessaires et soutenir les institutions à même d’améliorer le fonctionnement des marchés.
Près de 58% de la population d’ASS vit avec moins de 1,25US$ par jour. Au-delà des conséquences directes de la pauvreté, comme la vulnérabilité, cette fragilité économique a des répercussions immédiates sur la scolarisation ou non des enfants. Les taux de chômage en ASS, lorsque les statistiques existent, sont importants et ceux des femmes sont toujours supérieurs à ceux des hommes. Environ 70% des plus de 15 ans travaillent mais l’on note un important écart en fonction du genre. Ainsi, les statistiques existantes, avec une répartition très inégales selon les secteurs économiques, confirment toutes le peu de travail dans les secteurs de l’industrie ou des services ; la plupart d’entre eux est dans l’agriculture.
Il est donc très difficile de disposer de données fiables sur la division sociale du travail, il est donc tout aussi difficile d’articuler formation et emploi et de développer des projets cohérents. Cette dimension prend une importante proportion dès lors que l’on s’intéresse aux emplois de bas niveau de qualification, qui se développent dans le secteur informel ; le renforcement de l’EPT et de l’EFTP semblent les seules solutions réalistes de développement.
La corruption qui limite l’efficacité et la qualité du système éducatif
Le développement en ASS est trop souvent gangréné par la corruption (Reinikka & Smith, 2011). Comme le souligne le Forum mondial de l’éducation (Dakar, avril 2000), ce ne sont pas seulement des ressources qui sont perdues ; des formes plus discrètes de corruption minent l’efficacité des systèmes éducatifs. Par exemple, de faibles performances scolaires conduisent des parents à retirer leurs enfants de l’école, ce qui impacte directement le niveau de pauvreté de cette population. L’insuffisance des inspections scolaires a pour conséquence une insuffisance d’informations essentielles sur les problèmes rencontrés et les résultats positifs obtenus et limite toute possibilité d’amélioration. En cette fin des années 90, on notera toutefois des évolutions sensibles dans la lutte contre la corruption ; la société civile, notamment les membres de la communauté éducative commencent à avoir un meilleur accès à l’information sur les financements, les coûts et les fournitures (Reinikka & Svensson, 2005).
Des organisations scolaires peu adaptées
Les études qualitatives en ASS ne sont pas très nombreuses mais elles redisent toutes la mauvaise qualité des enseignements et le faible niveau des élèves. Comme l’affirme le pôle de Dakar de l’Unesco, apprendre reste l’ultime objectif de toute scolarisation, qu’il s’agisse des savoirs de base de l’école primaire ou des connaissances et des compétences acquises dans l’EFTP. Certains pays ont su faire face à la massification de la scolarisation tout en garantissant un niveau scolaire sinon supérieur du moins identique. Les disparités gigantesques constatées au niveau qualitatif soulignent les incuries dans le management de l’éducation. D’une manière générale, les années 90 se terminent sur un sentiment largement partagé de dégradation de la qualité de l’éducation en Afrique ; ce sentiment est également porté sur l’EFTP dans à peu près les mêmes termes.
Peu de pays africains participent aux grandes enquêtes internationales, ce qui rend difficile toute comparaison. Malgré ce, les rares données qui existent (par exemple, TIMSS3) constituent un repère essentiel pour évaluer la performance de systèmes éducatifs africains ; elles pointent un niveau extrêmement faible en mathématiques et sciences. Une étude régionale réalisée par le SACMEQ4 (2000-2002), centrée sur l’anglais et les mathématiques, confirment les résultats de l’évaluation TIMSS. Les résultats varient de manière très significative d’un pays à l’autre avec des résultats particulièrement faibles en Mauritanie, RCA, Bénin et Tchad. Peu de pays d’ASS ont les ressources nécessaires pour prendre en charge les structurations curriculaires. Il n’est pas rare d’avoir des programmes de formation pour lesquels le curriculum, la structure et l’équipement ont été importés et se révèlent complètement inappropriés au contexte local. La disponibilité et la fonctionnalité des infrastructures, des équipements, des ressources et des moyens nécessaires pour permettre aux EFTP d’exister ont un impact sur la qualité des apprentissages. Les moyens consacrés par les pays de l’ASS à l’éducation et à l’EFTP est d’environ 3,4% du PIB mais l’on constate de très grandes disparités d’un pays à l’autre (de 1,6% à 14%). De fait, assurer ces moyens est un vrai challenge pour de très nombreux pays. Ça l’est réellement pour l’EFTP qui suppose d’offrir aux étudiants des situations professionnelles leur permettant d’acquérir l’expérience pratique de leur métier. Dans de nombreux cas les étudiants n’ont pas accès à un équipement approprié, ce qui impacte directement la qualité de la formation.
Les enseignants, leur niveau de formation et leur rôle social
À la fin des années 1990, la pénurie d’enseignants se manifestait en termes généraux et de manière particulièrement dramatique pour certains domaines spécifiques. Par exemple, atteindre dans un délai raisonnable un rapport de 25 élèves par classe, supposait de recruter et former un nombre colossal d’enseignants (environ 4 millions). En ce qui concerne l’EFTP, les taux d’encadrement par élève étant très médiocres, il s’agissait de recruter et former 1 million d’enseignants. La question du recrutement des enseignants est à la fois quantitative et qualitative (Ginestié, Balonzi, & Kohowalla, 2006). Dans les années 1990, la proportion d’enseignants non qualifiés en Afrique subsaharienne a été particulièrement critique. Par ailleurs, les enseignants dans les sociétés fragiles fonctionnent dans des conditions précaires ; il n’y a guère de disposition pour les payer, de sorte que le métier n’est pas attractif pour les diplômés nouvellement qualifiés. L’ETFP est également affectée. Pour faire face, ce sont développées, ici comme dans l’enseignement général ou supérieur, le recours massif à des contrats temporaires pour le recrutement de personnels peu compétents et sans formation. De fait, le prestige de la profession s’en trouve diminuée et il est injuste de leur faire porter la responsabilité des faibles résultats de leurs élèves alors que le problème relève typiquement de la considération sociale du métier d’enseignant, son niveau de qualification, sa formation, sa rémunération…
3 Third International Mathematics and Science Study
4 Southern and Eastern Africa Consortium for Monitoring Educational Quality
Quelques conclusions caractéristiques de la situation à la fin du XXe siècle
Les deux volets, massification de la scolarisation et développement de l’EFTP, sont particulièrement fragiles ; ils ne répondent pas aux besoins sociaux et socioprofessionnels identifiés par l’analyse de l’offre et la demande en regard des qualifications professionnelles et de l’emploi. Ces faiblesses sont tout autant structurelles que fonctionnelles ; elles empirent dans les pays confrontés à de graves problèmes sociaux ou économiques. L’importance du secteur informel dans la plupart des économies d’Afrique subsaharienne, couplée à l’absence de dialogue social minent toutes tentatives de promotion de formation professionnelle et de développement des compétences professionnelles. En regard de tous les défis décrits ci-dessus, le niveau de formation était médiocre, voire mauvais ; ainsi, il semble que tout ait été fait pour donner l’impression que l’EFTP est plus un problème qu’une solution. Cette impression transparait dans les projets majeurs qui participent de la définition des grandes orientations pour le 21e siècle, notamment les OMD et les objectifs de l’EPT. Tous les avis, politiques, culturels et sociaux, convergent pour souligner le rôle crucial de l’éducation dans l’édification de sociétés fondées sur les principes de paix et de droits humains. Il est réellement surprenant que ces grands textes ne fassent pas mention des liens indéniables entre le droit à l’EPT et l’accès à la formation professionnelle. Ces omissions ont été heureusement corrigées par la suite et l’EFTP est mentionné dans tous les grands programmes au niveau régional, sous-régional et national.
Une décennie d’actions, la période 2000-2010
La mise en œuvre de grands programmes liés à la réalisation des OMD et des objectifs de l’EPT a donné lieu à de nombreuses initiatives qui se sont répercutées sur les politiques éducatives, sur les organismes d’éducation et de formation, sur la formation des enseignants et leur qualification, mais aussi plus localement sur le développement d’initiatives pour améliorer la scolarisation dans l’enseignement général ou dans les centres de formation. Dans ce chapitre, nous partons de la situation à la fin du 20e siècle pour montrer comment certains indicateurs ont évolué sous l’effet des actions et des programmes d’EFTP en ASS. Notons l’amélioration, ces dernières années, de la disponibilité et la fiabilité des données par pays sur les principaux indicateurs sociaux, démographiques et économiques. Ce qui suit nous permet d’apprécier l’évolution de quelques indicateurs présentés et discutés dans le précédent chapitre.
Le suivi de quelques grands indicateurs
L’évolution de la population et des caractéristiques sociales et professionnelles
La population d’ASS est en croissance constante. Les villes ont le plus fort taux de croissance avec une progression de 90 millions d’habitants (soit 41%) tandis que les populations des zones rurales s’accroissent de 87 millions (soit 17%). Cette croissance est essentiellement due à l’augmentation de l’espérance de vie, ce qui suggère que les conditions de vie se sont améliorées. Selon des études de la Banque mondiale, la pauvreté décroit en ASS, mais cette décroissance est beaucoup plus lente que ne le laissait espérer les projections faites pour les OMD. Non seulement le taux de chômage n’est pas systématiquement suivi en ASS, mais la collection des données s’est dégradée. Lorsque ces données existent, elles témoignent toutes de taux très élevés. De même, la connaissance des sources potentielles d’emplois par secteur économique ne s’est guère améliorée au cours de la décennie. La division sociale du travail n’est pas mieux documentée, ce qui compromet sérieusement la capacité des États à orienter leur développement et anticiper les besoins. Le pourcentage des plus de 15 ans dans des emplois est stable (environ 70%) mais cette stabilité cache mal la faiblesse de l’emploi des femmes (environ 61%) alors que celui des hommes est à 81%. Il n’y a que peu d’évolutions dans les disparités entre les pays ou dans le nombre dans le marché de l’emploi. En revanche, les chiffres de l’alphabétisation des femmes progressent nettement. Les indicateurs qui caractérisent les populations d’ASS pointent des progrès qui reflètent les efforts déployés pour atteindre les OMD et les objectifs de l’EFTP. Néanmoins, ces progrès restent fragiles, notamment en raison de la crise économique. Des efforts supplémentaires doivent être faits pour créer des fondations solides pour l’enseignement général qui doit nécessairement inclure de solides bases pour l’enseignement technique et professionnel.
Les OMD, évaluation du chemin parcouru
Le rapport 2011 des OMD indique que l’ASS est la région qui a fait plus de progrès dans un certain nombre de domaines, notamment ceux relatifs à la santé. Le rapport confirme l’amélioration des conditions de vie dans ces pays, mais aussi celle des taux de scolarisation, qui étaient un des autres défis. Les disparités entre zones urbaines et rurales restent frappantes. Peu de femmes ont accès à un emploi rémunéré, une situation amplifiée par la crise et alors qu’une large majorité des travailleurs sont engagés dans des emplois « précaires ».
L’ASS a amélioré les taux de scolarisation dans l’enseignement primaire, mais l’objectif d’éducation primaire universelle est loin d’être atteint. Il est notable que certains des pays les plus pauvres dans le monde ont fait de rapides progrès depuis 1999, probablement en raison de la suppression des frais de scolarité dans la plupart de ces pays. La majorité des enfants hors de l’école en ASS sont exclus du système et ne fréquentent jamais une salle de classe, même si l’on peut identifier des programmes dans certains pays qui tentent de prendre contact avec eux pour leur permettre d’acquérir un certain degré d’éducation. Malgré d’indéniables progrès, l’ASS reste la région qui a le plus haut niveau d’analphabétisme chez les jeunes (72% en 2009).
L’évolution de la scolarisation
L’analyse de l’évolution des indicateurs liés à la scolarisation et le fonctionnement des systèmes éducatifs est particulièrement utile pour comprendre les évolutions en ASS. Le Forum de Dakar (2000) a, par exemple, provoqué plusieurs changements importants : i) la prise en compte de l’EPT dans le cadre du développement global du secteur de l’éducation constitue en soi un élément de stratégie nationale de croissance et de réduction de la pauvreté ; ii) il a suscité une forte mobilisation internationale pour l’éducation avec une priorité affichée pour l’Afrique aussi bien au niveau de l’aide publique au développement que dans les arbitrages budgétaires intersectoriels des pays. Cependant, malgré cette mobilisation, les ressources accordées aux différents pays restent en deçà des promesses faites et montrent des signes d’essoufflement. Les taux de scolarisation progressent régulièrement mais ces taux sont plus favorables pour les garçons que pour les filles. En l’espace de dix ans, le nombre d’enfants scolarisés est passé de 85 millions à plus de 133 millions. Les conditions scolaires se sont, toutefois dans l’ensemble, détériorées. Les taux de scolarisation dans le secondaire ont également augmenté de façon significative avec plus de 16 millions de nouveaux entrants. Les effectifs des étudiants de l’EFTP ont plus que doublé, passant d’un peu plus de 1 million à plus de 2 millions. Les disparités entre les pays subsistent mais sont moins importantes.
Dans une perspective mondiale et, à minima, dans une perspective quantitative, l’impulsion donnée pour atteindre les OMD ainsi que les objectifs de l’EPT a été très efficace en termes d’accès à l’éducation. Certes, les objectifs de l’EPT et ceux de l’EFTP sont encore loin d’être atteints. On notera la progression de l’EFTP mais cela n’a pas été suffisant pour produire un impact réel sur la vie des enfants défavorisés.
L’EFTP dans le processus de Dakar
Comme l’a reconnu le rapport Dakar plus sept, l’accent mis sur la scolarisation primaire universelle a, en partie, éclipsé une réflexion en profondeur sur la scolarité secondaire. La question qui se pose est bien celle de la poursuite d’études de ces enfants qui sortent de l’école primaire : doivent-ils poursuivre leurs études dans l’enseignement secondaire général ou technique ? Si l’articulation primaire, secondaire, universitaire est évidemment logique, gardons en mémoire le fait que (i) peu d’élèves poursuivent une scolarité après l’école primaire, (ii) que l’EFTP reste, malgré d’importants progrès quantitatifs, très minoritaire dans les prolongations post-primaire, (iii) qu’il est encore largement structuré autour de la formation pour des emplois dans le secteur formel et ignore encore largement tout le secteur informel et (iv) qu’il est évident que la réduction de l’éducation pour tous aux seuls savoirs généraux ne permettra pas aux pays d’engager des processus de développement durable de leurs environnements sociaux, économiques et, au final, politiques et culturels. C’est probablement la principale leçon à tirer de la mise en œuvre des objectifs de l’EPT en ASS.
Les politiques sectorielles doivent être intégrées dans les réformes globales du système éducatif. Les réformes doivent concerner l’ensemble du secteur afin de permettre l’atteinte d’une scolarisation primaire universelle de qualité, de s’assurer de l’existence d’un large secteur de formation professionnelle répondant à la nécessité de développer des marchés du travail à faible valeur ajoutée, et surtout de redonner du sens aux enseignements secondaires et supérieurs, moins répandu mais soutenu par des normes internationales qui s’appliquent pour eux. Le développement de l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) apparaît comme une stratégie transversale prometteuse même si elle est loin d’être une panacée en termes de réduction des coûts. Enfin, les stratégies concernant l’EFTP doivent répondre au concept et objectifs de développement durable des pays (Déclaration de Bonn, 2004).
Compte tenu de ce qui précède et étant donné la diversité des situations, le rapport Dakar plus sept propose d’améliorer la piètre opinion générale à propos de l’EFTP au travers de sept stratégies. Le plan d’action comprenait des activités à court-terme (1-3 ans), à moyen terme (4-6 ans) et à long terme (7-10 ans). En relation avec les politiques éducatives d’EFTP, il est proposé de prendre en compte le contexte national et la mise en place d’une régulation conçue pour améliorer les accès équitables à l’EFTP.
Il est évident que l’évaluation effectuée dans le cadre de Dakar plus sept ainsi que les perspectives qui en résultent mettent une fois de plus en évidence la nécessité d’une approche globale qui promeut l’idée que l’accès à une qualification professionnelle est d’abord et avant tout la clé pour obtenir un emploi stable et rémunéré.
Les actions sous-régionales
Processus d’Abuja pour la redynamisation de l’EFTP
En partenariat avec la CEDEAO, en 2009, l’UNESCO-BREDA a organisé un atelier régional à Abuja, au Nigeria, conçu pour revitaliser l’EFTP dans les États de la CEDEAO en apportant un appui technique pour la mise en œuvre de l’une des sept priorités du plan d’action pour la deuxième Décennie de l’Éducation pour l’Afrique de l’Union africaine (UA) (2006-2015). Les présentations ont confirmé la crise de l’EFTP dans ces états et la nécessité de les redynamiser. Les états, en vue de renforcer l’EFTP et l’harmonisation en Afrique occidentale, ont émis les recommandations suivantes : i) mettre à jour et adapter, au niveau local, les programmes d’EFTP ; ii) partager ces programmes et les ressources avec tous les États membres de la CEDEAO ; iii) créer un réseau de centres d’excellence d’EFTP. L’UNESCO fournit le soutien technique aux pays pour développer leurs cadres de qualifications. La CEDEAO coordonne les efforts pour mettre en place un cadre régional de qualifications. Le « Processus d’Abuja » prévoit la mise en place d’un observatoire sous- régional de l’EFTP. Il s’agit de développer et coordonner les actions locales ainsi que de créer les synergies entre les états et ainsi faciliter le développement durable des politiques d’EFTP.
La Task Force Inter Agences (IATT) pour la revitalisation de l’EFTP
L’IATT résulte d’un regroupement des Agences des Nations Unies qui forme une plateforme de partage des connaissances. Elle promeut le dialogue politique, le renforcement des capacités et la mobilisation de ressources. Elle réunit le travail commun des partenaires financiers, les Communautés Économiques Régionales (RECs), les centres d’excellence et les réseaux. Elle est composée des principaux partenaires techniques et financiers impliqués dans le renforcement des capacités, le développement des compétences, l’emploi des jeunes et la réduction de la pauvreté pour rassembler leurs ressources en appui aux efforts de revitalisation de l’EFTP.
Ce groupe de travail peut offrir un soutien opérationnel aux pays au travers d’initiatives pilotes qui visent à développer une expertise ou des partenariats innovants. L’appui apporté aux pays dans le cadre de la préparation de l’UNDAF est un des éléments clé de l’engagement de l’IATT, qui fournit également des appuis à la CEDEAO, l’UNESCO et au Programme régional du PNUD pour la cohésion sociale et l’emploi des jeunes.
Le processus de revitalisation de l’EFTP dans la région SADC
Malgré l’importance de l’EFTP pour le développement et les initiatives entreprises au cours des deux dernières décennies, en Afrique australe, il est dans un triste état. Un processus de revitalisation a été lancé et une équipe de recherche a entrepris d’examiner les résultats nationaux de 13 pays de la SADC et de les traduire en un cadre stratégique régional cohérent. Les premiers résultats révèlent une très faible prise en compte de l’EFTP dans la région. Si presque tous les pays ont lancé un cadre national de qualifications, mais ce travail est loin d’être achevé. Dans le cadre de l’établissement d’un processus régional, la priorité devrait être donnée à la mise en place d’un cadre régional de qualifications. Les employeurs devraient être impliqués d’une manière significative en matière d’EFTP afin que les réformes entreprises dans la région répondent aux besoins de formation qui doivent, à leur tour, répondre aux besoins du marché du travail et de l’industrie.
Sur la base de ces observations, les pays de la SADC ont engagé une série d’actions qui constituent un mémorandum d’accord sur un processus visant à améliorer et revitaliser l’EFTP. Cinq priorités stratégiques ont été définies : institutionnalisation de l’outil de pilotage régional ; renforcement des capacités et des connaissances de l’EFTP ; approche systémique du développement ; développement institutionnel ; développement des personnels et des équipes.
La structuration par la formation professionnelle du secteur informel
Les questions liées au développement des zones rurales ou à la structuration du secteur informel de l’économie risquent fort de ne pas faire partie de ces programmes : les données quantitatives montrent que non seulement le secteur informel constitue une part significative des économies africaines, mais encore qu’il occupe une place de plus en plus prépondérante dans la création d’emplois et la production de la richesse nationale de ces pays.
Durant les années 2000, une série d’études sur la formation professionnelle dans le secteur informel ont été conduites dans plusieurs pays (Walther, 2006a, 2006b, 2006c, 2006d, 2006 ; Walther & Filipiak, 2006a, 2006b, 2006c). Ces études montrent que les efforts entrepris pour répondre aux besoins de compétences et de professionnalisation du secteur informel ont donné lieu à un certain nombre d’expérimentations et à l’émergence de bonnes pratiques de formation des jeunes ou des adultes. Ces efforts de formation ne peuvent être isolés et les actions doivent s’intégrer dans un ensemble de services qui facilite l’accès aux innovations techniques, aux services financiers…, c’est-à-dire aux instruments susceptibles de participer aux développements quantitatif et qualitatif du secteur. Même s’ils sont modestes, les efforts en matière de formation sont globalement positifs même si leur financement reste un enjeu majeur. D’autres études ont été menées pour évaluer les principales caractéristiques de l’apprentissage et les types et niveaux de compétences que l’EFTP est capable de générer. Ils ont également analysé les projets de formation innovants en cours et qui visent à stimuler l’économie informelle pour passer d’une stratégie de survie à une de développement. Il s’agit de définir les conditions optimales susceptibles de faire correspondre les programmes de formation publics et privés avec les besoins du secteur informel.
Une analyse de la situation dans les pays examinés révèle un certain nombre de facteurs clés destinés à revitaliser le secteur informel en Afrique, cela a permis de proposer neuf recommandations. Ces facteurs sont utiles comme repères pour apprécier les réflexions et les actions. Dans ce cadre, le développement de la formation professionnelle est avant tout basé sur une approche pragmatique et locale. Certaines limites apparaissent ; ainsi, l’effort de structuration de la formation professionnelle aux besoins du secteur informel accroîtra les niveaux de qualification de la population, ce qui, dès lors accroitra la demande de reconnaissance sociale et donc une pression encore plus forte sur le système éducatif. La transformation de ces progrès en termes de développement durable va rapidement révéler le besoin de les accompagner par des systèmes de gestion locale, régionale et nationale de plus en plus fiable, ce qui n’est pas vraiment le cas aujourd’hui.
La formation des enseignants
Globalement, la place et le rôle des enseignants dans les processus en cours, que ce soit les OMD, ou les objectifs de l’EPT ou de l’EFTP, ont été éclipsés pendant toute la première phase, et plus particulièrement dans l’EFTP. Pourtant, la réalisation des OMD et des objectifs de l’EPT est directement liée à la capacité des pays à organiser, développer et élever le niveau de recrutement des enseignants d’un point de vue quantitatif et qualitatif. C’est dans cet esprit que le programme d’Initiative de formation des enseignants en Afrique sub-saharienne (TTISSA), impliquant 17 pays d’Afrique subsaharienne, a été lancé en 2006. Il s’agissait est d’aider les États membres à améliorer la qualité et l’efficacité de leur personnel enseignant. De fait, cela confirme le rôle indispensable de formation des enseignants. Le cadre de TTISSA est holistique et vise quatre résultats clés : i) améliorer le statut des enseignants et leurs conditions de travail ; ii) améliorer la qualité de la gestion des enseignants et des structures administratives ; iii) élaborer des politiques appropriées relatives aux enseignants et iv) renforcer la formation des enseignants et les organisations de perfectionnement professionnel.
Perspectives au sortir de la décennie
Un bilan plutôt globalement positif, mais…
Les OMD et les objectifs de l’EPT ont eu un fort impact sur la structuration des systèmes éducatifs. Dans ce processus, l’EFTP – mais aussi la constitution d’un corps enseignant compétent et qualifié – a pris progressivement de l’importance. Aujourd’hui, l’EFTP apparait comme l’un des outils clés dans la lutte contre la pauvreté, en ce qu’elle détermine les fondements mêmes de l’enseignement général pour tous. Cette étape majeure dans le développement du concept d’EPT – qui intègre la formation professionnelle pour tous – modifie les fondements mêmes de la pensée à l’égard de l’enseignement général. Cependant, dans un contexte d’ASS, toute ambition semble irréaliste dès lors qu’elle concentre un grand nombre de difficultés sociales, économiques et politiques. Tous les indicateurs traditionnels situent l’ASS en fond de classe ; les situations de conflit ou de crise ne font qu’aggraver une situation déjà fragile. Malgré tout cela, on enregistre des progrès évidents, grâce notamment aux volontés combinées de tous les intervenants, et ce malgré les effets de la crise qui compromet davantage la réalisation des OMD d’ici 2015. L’usage des outils qui permettent d’améliorer la lisibilité de l’état du marché du travail ou de suivre l’évolution des qualifications et des compétences ne sont que très peu utilisés et cela par peu de pays. Cette absence de visibilité globale est dramatique car elle empêche toute tentative d’orientation et de coordination des efforts de développement.
Des perspectives pour continuer à progresser
Malgré les efforts consentis et quelques progrès constatés, tout un ensemble de problèmes demeurent ; ils devront être résolus avant d’aller plus loin. Tous les pays d’ASS (et cela à tous les niveaux) doivent être équipés d’outils de gestion et de coordination des politiques publiques éducatives. Les pays dépendent des aides extérieures et de fait n’ont pas réellement les moyens de mettre en place les politiques nécessaires. Cela suppose de faire évoluer les politiques d’aide, notamment les politiques de soutien. Par conséquent, les circuits financiers doivent être examinés de manière très critique afin de combattre efficacement la corruption à tous les niveaux. Pour cela, il s’agit de mettre en place des systèmes de financement durables.
L’articulation formation-emploi suppose de penser les parcours scolaires, trop souvent hiératiques pour les populations défavorisées. La formation des enseignants ne peut plus être considérée comme un supplément d’âme. Le nombre et le niveau de qualification des enseignants doivent être améliorés quantitativement et qualitativement. Une plus grande synergie entre les institutions de formation doit permettre de développer ces formations d’enseignants, notamment au travers des échanges sur les bonnes pratiques. Ces institutions devront élaborer collectivement des programmes de recherche adaptées aux besoins locaux.
Il s’agit ainsi de quelques-uns des défis auxquels sont confrontés les pays d’ASS qui cherchent à atteindre leurs objectifs. Les outils sont encore pour la plupart encore à l’état d’ébauches mais la plupart existe, il convient de les développer et d’en étendre la portée. Les volontés semblent se dessiner pour préparer un monde pour les jeunes générations qui ne soit pas finalement pire que celui dans lequel nous vivons… c’est tout l’enjeu de ce XXIe siècle naissant.
Références bibliographiques
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Walther, R. (2006e). La formation professionnelle en secteur informel. Rapport sur l’enquête terrain en Éthiopie. Document de travail, 34.
Walther, R., & Filipiak, E. (2006a). La formation professionnelle en secteur informel. Rapport sur l’enquête terrain au Bénin. Document de travail, 19.
Walther, R., & Filipiak, E. (2006b). La formation professionnelle en secteur informel. Rapport sur l’enquête terrain au Sénégal. Document de travail, 21.
Walther, R., & Filipiak, E. (2006c). La formation professionnelle en secteur informel. Rapport sur l’enquête terrain en Afrique du Sud. Document de travail, 30.
Résumé
L’adoption par l’ONU des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) tout comme celle par l’UNESCO des objectifs de l’Éducation Pour Tous (EPT) marquent un important tournant politique visant à améliorer les conditions de vie de l’ensemble des populations. Il s’agit d’éradiquer la misère et la pauvreté dans le monde. Les moyens pour y parvenir se concentrent très largement sur l’éducation qui devient un but en soi : faire reculer l’analphabétisme, offrir un accès à tous à une école de base, promouvoir l’équité d’opportunités auprès de tous. Au travers de l’éducation, d’autres objectifs sont visés, comme la promotion de la lutte contre la pauvreté, de l’égalité entre les sexes, du développement durable ou encore de partenariats pour le développement. Le but de cette communication est de présenter un état de la situation en Afrique subsaharienne (ASS) depuis la fin des années 1990 et le lancement de ces grands programmes internationaux.
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