Résumé
Née aux Etats-Unis d’Amérique en 2001 à l’initiative de deux universitaires Jonathan Bergmann et Aaron Sams (Siti Hajar Halili et Zamzami Zainuddin, 2015 ; Raths, 2014 ; Tucker, 2012), la classe inversée s’est vite répandue dans le monde. Aujourd’hui, elle n’est plus l’exclusivité du supérieur car on la retrouve aussi bien au secondaire qu’au primaire. Pour certains auteurs, ce modèle pédagogique permet d’améliorer significativement les rendements scolaires (Milman, 2012, Cohen et Brugar, 2013 ; Hamdan et al., 2013). Pour d’autres par contre, il entraîne de nombreuses contraintes telles que l’augmentation de la charge de travail de l’enseignant et de l’apprenant (Bergmann et Sams, 2014 ; Galaway, Berry et Takaro, 2015) et la maîtrise par les enseignants de nouvelles compétences technopédagogiques. Dans le cadre de notre recherche doctorale, nous nous penchons sur l’apport controversé de ce modèle pédagogique. La question principale est de savoir quels effets significatifs ce modèle pédagogique peut avoir sur l’enseignement/apprentissage de l’histoire-géographie et éducation à la citoyenneté des élèves du secondaire. Pour ce faire, l’un des préalables est d’amener les enseignants, dans le cadre de la formation continue, à développer les compétences nécessaires à la mise en pratique de ce modèle pédagogique. C’est l’objet du présent article. Il décrit successivement le contexte, le dispositif et le déroulement de la formation.
Mots Clés
Formation des enseignants, classe inversée, histoire-géographie et éducation à la citoyenneté
Introduction
Le présent article est une partie de notre recherche doctorale dont le thème est : « Formation continue des enseignants à la pratique de la classe inversée : quels effets sur le processus enseignement/apprentissage ? ». L’objectif général de cette recherche est de mettre en relief les changements significatifs en termes compétences professionnelles des enseignants qui pourraient résulter de l’utilisation du modèle pédagogique dit classe inversée dans l’enseignement de l’histoire-géographie et l’éducation à la citoyenneté au secondaire. Or, le modèle pédagogique en question n’est pas de mise du moins officiellement dans le système éducatif camerounais et particulièrement en ce qui concerne l’enseignement des disciplines sus-évoquées. C’est pourquoi la formation des enseignants à la pratique s’est imposée comme préalable à la mesure des effets. Notre propos ici porte sur la présentation du design pédagogique que nous avons mis sur pied dans le but d’initier les enseignants à l’utilisation de l’enseignement inversé. Il s’articule autour de trois points essentiels : l’analyse du contexte de la formation, la description du design pédagogique et la présentation de la formation proprement dite.
Contexte de formation
Tout acte de formation, pour être efficace, doit partir de l’analyse du contexte (Fabre, 1992) afin de déterminer l’existant par rapport aux savoirs nouveaux à faire acquérir et de déterminer les facteurs à prendre en compte dans l’élaboration du design pédagogique à mettre en place. Ces facteurs du contexte sont liés certains aux individus, d’autres à l’environnement de la formation. Tessmer et Richey (1997) proposent un construit théorique du design pédagogique selon trois dimensions (contexte orientant, contexte d’enseignement et contexte de transfert) et trois niveaux (facteurs de l’apprenant, facteurs de l’environnement immédiat, facteurs de l’organisation, de la communauté). Sans perdre de vue ces facteurs, les lignes suivantes relèvent les éléments du contexte capitalisables dans l’élaboration de notre design pédagogique. Trois points sont abordés : la présentation de l’environnement institutionnel de formation, l’analyse du dispositif de formation de mise et le cadrage théorique de notre design pédagogique.
Formation continue, une préoccupante permanente
Trois faits majeurs caractérisent le contexte de notre recherche : d’abord la vision d’un Cameroun émergent en 2035 consignée dans le Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi (DSCE) ; ensuite, les réformes curriculaires visant à rendre le système éducatif plus efficace ; enfin, l’insertion progressive des technologies de l’information et de la communication dans les activités à des fins pédagogiques.
L’amélioration de la qualité de l’enseignement et la professionnalisation des métiers de l’éducation préoccupent la plupart des systèmes éducatifs dans le monde (Yameogo cité par T. Karsenti et al., 2011, p.101). Au Cameroun, en dehors de la formation initiale dans les écoles, la poursuite de ce double objectif se fait à travers la formation continue des personnels enseignants. A cet effet, le DSCE, conçu pour la décennie 2010-2020, fait de la formation continue l’un des aspects clés du développement du capital humain. On peut y lire notamment que le Gouvernement « entend mettre un accent sur la formation du capital humain, notamment à travers (…) une formation continue étendue et doublée d’un système de valorisation des acquis de l’expérience » (p.18). Le chapitre 3 relatif à la stratégie de croissance en son paragraphe 3.3. met un point d’honneur sur le développement du capital humain en tant que force créatrice de richesse. Pour créer la richesse et l’emploi, il faut des hommes bien formés sur la base des programmes dont les finalités répondent aux attentes sans cesse évolutive de la société.
En maints points, le DSCE reprend à son compte les prescriptions de la loi N°98/004 du 4 avril 1998 portant orientation de l’éducation. Cette loi dispose en son article 11 que l’Etat :
« veille à l’adaptation permanente du système éducatif aux réalités économiques et socioculturelles nationales ainsi qu’à l’environnement international, particulièrement en ce qui concerne la promotion des enseignements scientifiques et technologiques, du bilinguisme et l’enseignement des langues nationales ».
Bien plus, la même loi fait de l’enseignant le garant principal de la qualité de l’éducation et lui donne par conséquent droit à une formation initiale et continue appropriée.
Dans la perspective de la formation permanente des enseignants visée par le DSCE, la loi d’orientation de l’éducation et l’organigramme[1] du Ministère des Enseignements Secondaires (MNESEC), un dispositif de formation fonctionne sous la vigilance de l’Inspection Générale des Enseignements (IGE).
Dispositif de formation : cas de l’inspection régionale des sciences humaines
Divers organes du MINESEC assurent la formation continue des enseignants ainsi que le présente le tableau ci-après :
Tableau 1 : Principaux organes chargés de la formation continue des enseignants (Inspiré du décret N°2012/139 du 11 juin 2012 et du décret n°2001)
NIVEAUX | ORGANES | |
1. | National | Inspection Générale des Enseignements |
Inspections Nationales de Pédagogie | ||
2. | Régional | Inspections Régionales de Pédagogie |
3. | Départemental | Conseillers Pédagogiques |
4. | Etablissement scolaire | Censorats |
Départements ou conseils d’enseignement |
Le décret N°2012/139 du 11 juin 2012 reconnait aux inspections pédagogiques une mission permanente de formation et de suivi évaluation des enseignants, de recherche et de propositions de mesures visant l’amélioration des rendements scolaires. A l’inspection pédagogique régionale, le dispositif de formation obéit aux modalités d’un « enseignement hybride » (Docq et al., 2010). Il comprend un volet à distance et un autre de proximité.
La formation à distance se fait pour l’essentiel à travers les correspondances administratives même si on note un début d’utilisation des espaces virtuels à cette fin. Les correspondances administratives à caractère formatif sont soit des lettres de feedback, soit des instructions de la hiérarchie en direction des enseignants.
A l’origine des lettres de feedback plus connues sous l’appellation d’accusés de réception (AR) se trouvent les correspondances en provenance des établissements scolaires (donc des enseignants). Ces correspondances dont le calendrier d’envoi est établi en début d’année scolaire sont de diverses natures : rapports des conseils d’enseignement, résultats des évaluations, propositions des sujets aux examens officiels, rapports sur le déroulement des activités post et préscolaires, emplois du temps, fiches de progression, projets pédagogiques. Après exploitation de ces correspondances, les inspecteurs initient des projets d’AR qu’ils soumettent à la signature du Délégué Régional par l’entremise del’Inspecteur Coordonnateur Régional (ICR).
Sur le plan architectural, un AR s’articule autour de trois paragraphes. Le premier paragraphe souligne selon les cas les aspects positifs en termes d’efforts fournis, de résultats obtenus, de respect des procédures ou de la réglementation en vigueur. Son objectif est de reconnaître le mérite de l’auteur du document et de le motiver davantage. Le deuxième, lui, relève les insuffisances, lacunes et dysfonctionnements constatés tant en ce qui concerne le fond et que la forme du document fourni. Le dernier paragraphe enfin prescrit en de termes variés la médication rendue nécessaire :
Je vous engage à…Vous veillerez à l’avenir à…Je vous instruis de tout mettre en œuvre pour…Je vous enjoins l’ordre de…Je vous exhorte à…Je vous invite à vous approprier les dispositions de la lettre circulaire n°…. Vous veillerez désormais à….
Ces expressions traduisent les changements attendus de l’enseignant, lesquels se déclinent en termes de savoirs à maitriser, de compétences professionnelles à développer, d’attitude à adopter, de mesures à mettre en œuvre ou d’outils à utiliser en vue de meilleurs rendements scolaires. C’est donc finalement un retour d’information, un feed-back qui permet aux enseignants d’apprendre de leurs erreurs (Astolfi, 2017). Toutefois, la formation à distance par le biais des correspondances administratives pose le problème de l’effet du feed-back tardif sur les performances des enseignants. Le parcours à suivre par un document X et l’AR Y auquel il donne lieu prend en moyenne un mois et demi selon le Service de l’Accueil, Courrier et Liaison (SACL) de la délégation régionale. Le Conseiller Pédagogique d’une délégation départementale confirme cette lenteur lorsqu’il déclare :
« Pour certains établissements privés qui n’ont pas mis sur pied un système de consultation régulière de leur boîte à lettres, certaines de leurs correspondances à caractère non urgent comme les accusés de réception destinés aux enseignants peuvent séjourner à la délégation départementale pendant tout un trimestre ».
Conséquemment, le temps écoulé entre le compte-rendu des activités produit par l’enseignant et les remarques de la hiérarchie est assez long. Il semble hypothéquer l’efficacité de ce type de formation car, comme le relèvent Roediger et Butler (2011), l’apprentissage (et donc la formation) est d’autant plus efficace que le retour d’information est le plus proche possible de l’activité de production de l’apprenant.
La formation à distance à travers des espaces virtuels est encore à ses débuts. En 2010, l’IPR/SH a créé un portfolio dans le but de faciliter la mutualisation des ressources éducatives. Récemment aussi, une plate-forme a été créée sur Edmondo.
[1] Décret N°2012/139 du 11 juin 2012
La formation en face à face a lieu lors des rencontres à caractère pédagogique : inspections, journées pédagogiques, consultations pédagogiques, conseils d’enseignement élargis, carrefours pédagogiques, séminaires pédagogiques. Les séminaires pédagogiques sont parmi ces rencontres, les moments privilégiés de formation continue des enseignants. Structurés par l’espace (Issaadi et Jaillet, 2017, p. 2), ils se déroulent dans une ambiance semblable à celle d’une salle de classe : des enseignants assis par rangées avec en face un ou plusieurs formateurs, un tableau, etc. Le modèle pédagogique veut que les enseignants découvrent le contenu de la formation sur place même si, quelques fois, des correspondances administratives ayant précédé les sessions de formation mentionnent les thèmes des travaux et les tâches préalables à réaliser. Cinq moments successifs marquent le déroulement des séminaires : les apports théoriques sous forme d’exposés, les travaux en ateliers, la restitution des travaux en plénière, les échanges et le recentrage. L’évaluation des acquis se fait soit sur place par le biais d’un questionnaire d’opinion sur table (éventuellement) soit ultérieurement lors des missions d’inspection.
Cadrage théorique de la formation
Notre dispositif de formation sur trois principales considérations scientifiques. D’abord celles qui pensent la formation continue comme instrument de développement professionnel (Perrenoud, 1994 ; Baron et Bruillard, 2002 ; Villemonteix, 2004 ; Trinquier, 2005) et dont la démarche implique l’alternance entre théorie et pratique (Houpert, 2017). Ensuite, le dispositif s’adosse sur les travaux considérant l’enseignement inversé comme un modèle pédagogique pluridimensionnel (Dufour, 2014 ; Lebrun, 2017) situé à la confluence de diverses approches pédagogiques (Bishop et Verleger, 2013 ; Dominé, 2014). Par ailleurs, nous considérons que la pratique de la classe inversée implique l’utilisation d’une grande variété de supports didactiques (Nono Tchatouo et Baque, 2017) et permet d’améliorer les compétences des enseignants et les résultats des élèves (Bergmann et Sams, 2014 ; Milman, 2012 ; Siti Hajar Halili, Zamzami Zainuddin, 2015). La mise en place d’une formation y relative doit prendre en compte la théorie du comportement planifié (Ajzen et Madden, 1986) indispensable à l’appréciation de l’engagement des enseignants à former.
Dispositif pour la formation continue des enseignants
Caractérisation du dispositif
L’objectif du présent dispositif est de former les enseignants à la pratique de la classe inversée. Ce dispositif que nous appelons également design pédagogique est, pour reprendre Docq et al., (2010), « un ensemble cohérent constitué de ressources, de stratégies, de méthodes et d’acteurs interagissant dans un contexte donné pour atteindre un but ». Il s’agit d’un dispositif hybride (Fearon et al., 2011 ; Lebrun, 2015). L’hybridation se situe à deux niveaux. D’abord en ce qui concerne les lieux de formation. Une partie de la formation se fera à distance, l’autre en présentiel grâce à des regroupements des formateurs et des formés en un endroit précis. Le deuxième aspect de l’hybridation réside dans le caractère dualiste de la formation. La première partie de la formation est théorique. Elle a pour objectif de familiariser les apprenants avec le modèle. La deuxième partie est pratique. Elle est marquée par l’accompagnement par les formateurs des apprenants/enseignants dans la préparation et la conduite des leçons. L’ensemble du dispositif de formation est un design incrémentiel itératif parce qu’à la fois empirique et scientifique, évolutif et adaptatif. Il est centré sur l’activité de la personne à former (Leblanc et al., 2008).
Les acteurs du dispositif
Deux catégories d’acteurs interagissent, les formateurs et les personnes à former. Le chercheur, parce que maitrisant mieux l’objet de la formation, est le principal formateur. Mais, dans l’impossibilité de former et d’observer tout seul l’ensemble des enseignants, il a intégré ses collègues de service (inspecteurs pédagogiques) dans le dispositif. Ces derniers ont pour rôle, une fois formés, d’accompagner les apprenants dans la préparation et la conduite des leçons pratique, de les observer en situation de classe et de les évaluer au terme de l’expérimentation. Ces inspecteurs ont été choisis sur la base de trois critères : la familiarité avec les TIC, la disponibilité et l’expérience en matière d’encadrement et de suivi évaluation des enseignants (5 ans au moins). Pour les désigner, nous utilisons invariablement les termes coach, tuteur et accompagnateur parce que leur rôle consiste à cheminer avec les enseignants apprenants dans ce qui convient d’appeler « pédagogie de côte à côte ».
La deuxième catégorie d’acteurs est composée d’enseignants du secondaire désignés sur la base de huit critères à savoir :
- Avoir des notions de base de bureautique, de navigation sur internet, d’utilisation de la messagerie électronique ;
- Avoir un compte sur un réseau social : Twitter, WhatsAppp, Facebook, Skype ;
- Avoir un emploi du temps hebdomadaire permettant un travail supplémentaire ;
- Disposer d’un ordinateur ou d’un téléphone android personnel ;
- Disposer d’une adresse électronique ;
- Etre disposé à insérer les TIC dans les activités d’enseignement ;
- Etre disposé à travailler de manière collaborative ;
- N’avoir aucune pratique de la classe inversée ;
- Tenir deux classes de même niveau et y enseigner l’une au moins des trois disciplines : histoire, géographie, éducation à la citoyenneté ;
Le contenu de la formation
Le contenu de la formation est constitué des objectifs spécifiques, des ressources et du scénario pédagogique.
Objectifs spécifiques
Au terme de la formation théorique et pratique, les apprenants doivent :
- Maitriser le fonctionnement de la classe inverse ;
- Etre capables d’adapter la classe inversée aux réalités de leur milieu professionnel.
Ressources
Diverses ressources pédagogiques ont été utilisées. Citons principalement :
- test de positionnement ; L’apprenant est appelé à répondre aux questions portant sur les déterminants de la classe inversée ;
- une capsule vidéo expliquant le fonctionnement d’un enseignement en classe inversée (https://www.youtube.com/watch?v=1_3_QGPyVCQ) ;
- un tutoriel edmodo en guise d’exemple de plate-forme numérique pour les activités en ligne (www.cyber-langues.fr/IMG/pdf/edmodocbl2014.pdf) ;
- un vidéoprojecteur pour le visionnage des capsules ;
- une caméra pour les prises de vue ;
- Une grille d’observation des activités.
Activités d’apprentissage et tests
Les activités d’apprentissage comprennent d’une part les activités d’acquisition des savoirs (visionnage des capsules, échanges, définition des concepts,…) et d’autre part, les activités d’application des savoirs (élaboration du cahier des charges des acteurs, préparation et conduite de leçons, remédiation). Quant aux tests, ils sont de deux types : test initial pour la prise de performances de départ et test final pour les des performances finales.
Le scénario pédagogique
Un scénario pédagogique se comprend comme l’ensemble des étapes à franchir, d’activités à mener, de ressources à utiliser, des rôles à jouer en vue de l’appropriation de l’objet de la formation[1]. Dans le cadre de notre travail, deux scénarii sont de mise, l’un pour la formation des accompagnateurs (inspecteurs) et l’autre pour la formation des enseignants. Les deux se présentent sous la forme de diagrammes d’activités (annexes 1 et 2).
En résumé, le dispositif mis en place pour la formation des enseignants à la pratique de la classe inversée s’appuie sur celui en vigueur à l’inspection. Une fois l’objet de la formation défini, notre design pédagogique se déroule en cinq temps forts : test de positionnement, formation théorique, formation pratique sous forme d’accompagnement, test évaluatif des acquis de la formation, évaluation par observation du degré de transfert des acquis de la formation. L’opérationnalisation de ces temps forts est l’objet du paragraphe suivant.
Déroulement de la formation
Nous présentons d’abord la formation des accompagnateurs et par la suite celle des enseignants.
Formation des accompagnateurs (inspecteurs)
La formation des accompagnateurs obéit au scénario même de la classe inversée. Elle est dualiste en ce sens qu’elle comporte chronologiquement des activités hors-classe et des activités en présentiel.
Activités hors-classe
Deux activités hors-classe intercalées par un regroupement ont été prévues. La première visait l’appropriation par les inspecteurs du concept et des enjeux de la classe inversée. Elle consistait pour les participants à proposer une définition puis à relever les outils, avantages et contraintes du modèle pédagogique à partir du visionnage de la capsule vidéo mise à leur disposition sur périphériques amovibles (clé USB, carte mémoire et CD-ROM).
La deuxième activité hors-classe, intervenant après le premier regroupement, était basée sur l’élaboration des outils de suivi et d’encadrement des enseignants notamment le cahier des charges des acteurs (capture d’écran 1).
[1] Voir C. Depover et al., (cours) « Analyse et conception des scénarios d’apprentissage », Université de Mons, Département des Sciences et de la Technologie de l’Education, année académique 2012-2013.
Cette capture d’écran montre un cas d’utilisation de la plate-forme edmodo. Le formateur y a indiqué le travail à faire, fourni les aides nécessaires et fixé la date buttoir pour le retour des productions individuelles.
Activités en présentiel
Les activités en présentiel se sont déroulées en deux regroupements.
Premier regroupement
Une semaine après que les ressources ont été mises à la disposition des enseignants à former, une première rencontre a regroupé 06 inspecteurs et le formateur (Photo 1).
Sur la base de la vidéo projetée et de la littérature dont certains extraits ont été également visualisés (Siti Hajar Halili, Zamzami Zainuddin. 2015 ; Galaway et al., 2015; Faillet, 2014 ; Lebrun, 2015) une définition consensuelle et contextualisée a été retenue à savoir que la classe inversée est :
« Tout acte d’enseignement/apprentissage qui commence par des activités se déroulant hors-classe grâce aux supports mis à la disposition des apprenants et qui se poursuit en classe par des activités pratiques sous l’encadrement de l’enseignant.»
En plus de la définition, les échanges ont porté sur les enjeux de la classe inversée tels que les outils et les méthodes utilisables, la préparation des élèves à l’acceptation du modèle, les avantages (Photo 2) et, enfin, les obstacles à contourner.
Deuxième regroupement
Au cours du deuxième regroupement, les participants ont d’abord été répartis en 02 ateliers de 03 inspecteurs chacun. L’activité consistait à fusionner les apports individuels relatifs à l’activité hors-classe (paragraphe 3.1.1.). Par la suite, les deux ateliers ont mutualisé leurs productions. Le cahier des charges (annexe 3) qui en est résulté a été présenté et expliqué en plénière et à l’intention des enseignants invités à cet effet.
Formation des enseignants
Huit enseignants ont été sélectionnés par les inspecteurs, cinq ont effectivement pris part à la formation, 03 ont fait défection en raisons de leur emploi du temps surchargé. Leur formation a commencé le 22 décembre 2016 par un test de positionnement ou test d’entrée.
Test d’entrée 3
Nous sommes partis du postulat selon lequel les enseignants maitrisent les compétences professionnelles de base pour formuler un questionnaire ayant trait essentiellement aux déterminants de la classe inversée (Siti Hajar Halili et Zamzami Zainuddin, 2015). L’objectif étant d’identifier les aspects sur lesquels l’accent devait être mis au cours de la formation, les questions ont porté sur la définition de la classe inversée, la recherche documentaire en ligne, l’insertion des technologiques dans les pratiques de classe, la mise à disposition des ressources du cours, la réalisation des devoirs par les apprenants (Annexe 4 ).
Le test permet de classer les 12 compétences objet de l‘évaluation en trois catégories (A, B et C) selon qu’elles sont maitrisées ou non par au moins 3 des 05 enseignants à former ou dont les capacités méritent d’être renforcées afin de les rendre capables de pratiquer la classe inversée :
- A) Compétences très faiblement maîtrisées : recherche de capsules vidéo pour la préparation de cours, création d’un espace d’échange en ligne, utilisation d’un vidéoprojecteur en classe, exploitation interactive d’une vidéo, utilisation du téléphone portable à des fins pédagogique ;
- B) Compétences moyennement maitrisées : recherche de ressources textes en ligne, animation d’un forum d’échange en ligne, préparation collaborative de contenus de cours, organisation des activités de rémédiation ;
- C) Compétence parfaitement maitrisées : rechercher les ressources du cours dans un manuel, organiser les élèves en groupes de travail hors- classe et en classe ;
En considérant les compétences C comme les préacquis favorables à la mise en œuvre de la classe inversée, la formation s’est centrée sur les compétences A et B. Les activités d’enseignement/apprentissage ont été organisées en conséquence.
Formation proprement dite
L’annexe 2 présente le scénario pédagogique de manière exhaustive sous la forme d’un diagramme d’activités. On y observe que la formation comporte deux phases dont nous donnons les traits essentiels dans les deux paragraphes suivants.
La phase théorique
A l’issue du test de positionnement, les enseignants ont rejoint les inspecteurs dans leur atelier. L’un des inspecteurs a conduit les échanges sur les enjeux et les possibilités de contextualisation de la classe inversée. Pour cette fin, il s’est servi d’une vidéo sur la classe inversée, d’un diagramme d’activités (annexe 2) et du cahier des charges des acteurs (annexe 3).
La phase pratique
Les cinq enseignants participant au projet ont été placés chacun sous l’encadrement d’un inspecteur pendant la préparation et la conduite de ses leçons.
Tableau 2 : Caractéristiques des enseignants en fonction du média mis en œuvre, du type de ressources, du niveau de la classe et de l’accessibilité aux TIC
Enseignant | Niveau de la classe et discipline enseignée | Leçons préparées et dispensées | Média utilisés |
Nature de ressources de cours | Activités de régulation | |||
Sous tutelle | en autonomie | Groupe de discussion | auto-confrontation | avec les élèves | ||||
LO |
Tle ESG
Histoire |
3 | 1 | WhatsApppvidéoprojecteur, papier | vidéo, textes, photos | 3 | 1 | 2 |
MR | 1ère D
ESG[1] Géographie |
3 | 1 | WhatsApp, vidéoprojecteur papier | vidéo, textes, photos | 3 | 1 | 2 |
NG | 1ère année EST -(ATC)
ECM |
3 | 1 | papier | textes, photos | 3 | 1 | 2 |
NL | Tle EST (TMA)
ECM[2] |
3 | 2 | WhatsApp, papier | vidéo, textes, photos | 3 | 1 | 2 |
WC | 4e année EST (ESCOM)
ECM |
3 | 2 | papier | textes, photos | 3 | 1 | 2 |
Total | 15 | 7 | 1 | 10 |
Il se dégage trois profils d’enseignants en fonction de média mis en œuvre, du type de ressources de cours et du niveau de la classe et de l’accessibilité aux TIC.
[1] ESG : Enseignement Secondaire Général ; EST : Enseignement Secondaire Technique.
[2] ECM : Education Civique et Morale ou encore Education à la Citoyenneté.
Les activités d’accompagnement ont varié d’un inspecteur à l’autre en fonction des leçons dispensées et des besoins individuels des enseignants. De manière générale, nous les avons regroupés en trois temps :
- Pendant la préparation de la leçon. Il s’agissait de conseiller l’enseignant dans la définition des objectifs, des activités d’enseignement/apprentissage et dans la recherche des supports les mieux adaptés ;
- Pendant la leçon, en plus de l’observation, l’accompagnateur a, selon les cas, manipulé le vidéoprojecteur (Photo 2) pour permettre à l’enseignant de s’occuper des interactions conséquentes ou encore pris la parole pour animer une séquence du cours (Photo 1) conformément aux principes de l’enseignement explicite (Gautier et al., 2013).
Figure 6 : Exploitation d’une vidéo (à gauche) et concertation entre l’enseignant et l’accompagnateur (Photographies 3 et 4). Sur la photo de gauche, l’enseignant guide l’exploitation de la vidéo projetée par l’accompagnateur (à droite).
Après le cours, l’accompagnateur organise le groupe de discussions plus connu sous l’appellation de carrefour pédagogique. A cette rencontre à laquelle prennent part les collègues de l’enseignant l’ayant observé en classe, l’on procède à une analyse critique du fond et de la forme du cours. L’enseignant a l’occasion de justifier ses choix et de prendre des notes en vue de l’amélioration de la séance à venir.
Conclusion
Dans la mise en œuvre de l’expérimentation, le dévolu a été jeté sur l’enseignement de l’histoire, de la géographie et de l’Education à la Citoyenneté au secondaire. La formation a connu une phase théorique et une phase pratique. Dans la phase pratique, il y a eu pour chaque leçon expérimentale, alternance entre enseignement et régulation. L’expérimentation, calquée sur le calendrier scolaire, a eu cours au deuxième trimestre de l’année scolaire 2016/2017, de janvier à mars.
Au total, les cinq enseignants ont préparé et conduit vingt deux leçons dont quinze sous le coaching des inspecteurs et sept en autonomie. Pour chaque enseignant, deux leçons en tutelle et une en autonomie ont été filmées. Les premières ont servi de base pour les activités de régulation et les secondes pour l’évaluation finale des compétences acquises. L’ensemble des données vidéos, des entretiens, des supports physiques de cours (fiches pédagogiques, contenus de cours, consignes, aides) et des traces numériques laissées sur WhatsApp et edmodo sont en cours de compilation pour traitement et analyse.
Bibliographie
Astolfi, J.-P. (2017). L’erreur, un outil pour enseigner, ESF
Depover et al., (cours) « Analyse et conception des scénarios d’apprentissage », Université de Mons, Département des Sciences et de la Technologie de l’Education, année académique 2012-2013.
Fearon, C., Starr, S., & McLaughlin, H. (2011). Value of blended learning in university and the workplace : Some experiences of university students. Industrial and Commercial Training, 43(7), 446-450.
Galaway, L.-P., Berry, B. et Takaro, T.-K. (2015). Student perceptions and lessons learned from flipping a master’s level environmental and occupation health course. Canadian Journal of Learning and Technology, Vol.41 (2), pp.1-16. [En ligne] http://www.cjlt.ca/index.php/cjlt/article/view/898 Récupéré le 25.11.2015
Gautheir, C., Bissonnette, S., Richard, M. et Casstonguay, M. (2013). Enseignement explicite et réussite des élèves. La gestion des apprentissages. Montréal, Canada : ERPI
Lebrun, M. (2017). « Les classes inversées, variété et effets différenciés ». Cahiers Pédagogiques N° 537 – Classes inversées. [En ligne] http://www.cahiers-pedagogiques.com/Les-classes-inversees-variete-et-effets-differencies. Récupéré le 10/06/2017 à 02H14 GMT.
Lebrun, M. (2015). L’hybridation dans l’enseignement supérieur : vers une nouvelle
culture de l’évaluation ? Evaluer. Journal international de Recherche en Education et Formation, 1(1), pp. 65-78
Nono Tchatouo, L.-P. et Baque, N. (2017). Place des outils et ressources numériques dans cette forme d’enseignement. Adjectif.net Mis en ligne mercredi 26 avril 2017 [Enligne] http://www.adjectif.net/spip/spip.php? article427. Récupéré le 0406/2017 à 15H GMT
Perrenoud, P., (1994) La formation continue comme vecteur de professionnalisation du métier d’enseignant. Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation, Université de Genève [En ligne] https://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1994/1994_10.html. Récupéré le 10/06/2017
Perrin, N ; Bétrix, D. ; Baumberger, B. et Martin, D. « Intégration des TIC dans la formation des enseignants : fonctions attribuées aux TIC par les formateurs en regard de leurs conceptions et pratiques pédagogiques, Haute école pédagogique du canton de Vaud, Suisse
Trinquier, M.-P. (2005). Formation continue des enseignants : la question de l’altération des formateurs. Recherche et formation n°50, pp107-116. [En ligne] http://ife.ens-lyon.fr/publications/edition-electronique/recherche-et-formation/RR050-07.pdf
Annexe 1
Annexe 2
Annexe 3
Tableau 5 : Cahier des charges des acteurs | ||||
Où se déroule l’activité ? | Que fait | |||
L’inspecteur ? | L’enseignant ? | L’élève ? | ||
Hors-classe (domicile, bureau, etc.) | Avant le cours
Consigne les activités d’enseignement proposées et les activités d’apprentissage menées ; Assiste l’enseignant dans la préparation du cours, le choix des média, des activités et des méthodes et des ressources ; Propose des ressources éducatives libres (REL), des cours ou vidéos prêts à l’emploi à l’enseignant Conseille et suit l’enseignant dans la mise en œuvre ; Organise des entretiens avec élèves et enseignant (après chaque séance) à propos de leurs impressions, ce qui marche, ce qui ne marche, ce qu’il convient d’améliorer, d’abandonner ou de consolider Prépare le test évaluatif sommatif |
Met le cours à la disposition des élèves
Fais des recherches documentaires Prépare le cours Choisis le format du cours Choisit le média Propose les activités à mener Suit l’activité des élèves Organise un système de feedback Propose un quizz
Offre un lien vers une ressources/un document Incite et analyse la participation des élèves Organise les activités de classe par groupe Motive l’implication Choisit le cours ou l’aspect du cours à enseigner en classe inversée |
Apprend le cours
Fais des exercices
Fais des recherches
Echanges avec ses camarades
Interagit avec l’enseignant
Visionne la capsule
Prend des notes |
Où se déroule l’activité ? | Que fait | |||
L’inspecteur ? | L’enseignant ? | L’élève ? | Camera man | |
En classe | Observe l’activité de l’enseignant (faits et geste, son attitude vis-à-vis des apprenants, outils méthodologiques)
Observe l’activité de l’apprenant (réponses aux questions, questions posées, réalisations des tâches soumises, prise des notes, rire, bavardage, etc)
Renseigne la grille d’observation
Relève les aspects/points à évoquer lors des entretiens |
Organise la restitution
Vérifie les prérequis des élèves ;
Vérifie l’effectivité des activités hors classe
Fais le suivi individualisé le cas échéant
Evalue les apprentissages (évaluation formative) |
Pose des questions d’éclaircissement
Travaille en équipe
Recopie le résumé
Fais des exercices d’application
Restitue les activités hors-classe
Subit les testes formatifs et sommatifs
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Filme le groupe classe
Monte les vidéos
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Annexe 4
Test de positionnement des enseignants
1°) La classe inversée consiste (Cochez la bonne réponse) à :
- Faire des exposés à la place des cours classiques
- Laisser les élèves travailler entre eux
- Faire découvrir le cours à la maison et réserver l’essentiel du temps de classe aux activités pratiques
2°) Pour votre cours de « climats du Cameroun », vous voulez rechercher une ressource de cours sur internet. Citez trois manières différentes de le faire :
- ………………………………………………………………………
- …………………………………………………………….………..
- ……………………………………………………………………..
3°) Pour préparer vos cours vous utilisez (Encerclez la ou les bonnes réponses) :
- a) Le téléphone portable ; b) Internet ; c) Ordinateur
4°) Pour enseigner, il vous arrive d’utiliser (Encerclez la ou les bonnes réponses)
a) Téléphone portable ; b) Internet ; c) Ordinateur ; d) Le vidéoprojecteur (PPT) ; c) les réseaux sociaux
5°) Vos apprenants :
- découvrent le cours du jour :
seulement en classe ; à domicile ; avant de venir en classe ; souvent à domicile
- font leurs devoirs :
en classe ; à domicile ; en classe et à domicile
6°) Pensez-vous que les résultats de vos apprenants peuvent être meilleurs s’ils font leurs devoirs en votre présence ? (Cochez votre avis) Oui Non
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