APPLICATION OF THE COMPETENCY APPROACH: QUALITATIVE ANALYSE OF THE UNDERSTANDING OF THE VOCATIONAL TRAINING’S TEACHERS
Élève-inspecteur pédagogique – ENSET – Libreville, Gabon
SUMMARY
The present study raises the hazards in the application of programs by competences in vocational training. In fact, after dealing, during several decades, with the behaviourist psychology and front now to the new orientation of the cognitive psychology approach, the teachers navigate between several understanding that have some implication about how they conceive their job. These conceptions are based on the theoretical debate between the behaviourist and cognitive approaches on learning. As Rope says (1996), the notion of competencies at school results in several understandings, several translations of the actors. The interest to wonder about the application of programs by competency is the validation by the actors of tools conceived in laboratory on one hand and, in the idea that conceptions influenced by internal and external stimulus (Noiseux, on 1997) that can lead a system to plural orientations on the other hand. Whereas an epistemological difference among teachers cannot reassure the pupils supposed to develop the transferable competences in the long term. The present communication will lean on an experience led with a teachers’ sample of Estrie (Quebec). We will make a transposition with Gabon, a sub-Saharan country, which tries to tip over its trainings to the approach by competences and will show how the difficulties lived by these pioneers were by-passed. From these results, it is necessary to confirm some theoretical tools with those that use them to make sure they understood and are convenient for didactic situations reserved upstream. As Lewy says (1992), if the teachers are not well prepared for the new role that programs require from them, it is difficult to apply the programs in an optimal way.
INTRODUCTION
Le désir d’une formation professionnelle mieux adaptée et articulée a conduit les décideurs à orienter les programmes de formation dans l’approche par compétences. Au Québec, comme partout ailleurs, l’État va prendre une place importante dans l’élaboration des programmes scolaires par la consultation des opérateurs économiques. Pourtant, l’élaboration de ces programmes n’est pas sans remous sur le plan théorique. Si pour certains les traces de la psychologie béhavioriste qui a longtemps marqué le monde de l’éducation seraient encore présentes dans les nouveaux programmes (Louis, Jutras et Hensler, 1996) pour d’autres, l’approche par compétences devrait s’inscrire dans la psychologie cognitive (Desilets et Brassard, 1994 ; Tardif, Désilets, Paradis et Lachiver, 1992 ; Desilets et Tardif, 1993) si l’on veut voir les élèves développer des compétences transférables dans le long terme.
On peut se demander dès lors si ce débat épistémologique au sujet de l’orientation conceptuelle des programmes par compétences n’a pas atteint les enseignants en tant qu’acteurs clés dans l’application des programmes élaborés souvent en laboratoire. La présente contribution tente de relever, auprès d’un échantillon d’enseignants de l’Estrie (Québec), par une analyse qualitative des verbalisations, leurs conceptions ainsi les aléas dans l’application des programmes par compétences en formation professionnelle (Moukagni, 2000). Ainsi, nous énonçons d’abord les différents modèles de conceptions de la formation et le cadre méthodologique. Nous présentons ensuite les résultats et montrons comment les aléas constatés ont été exploités dans le pilotage de la mise en place des programmes par compétences au Gabon. En conclusion, nous combinons les limites actuelles et proposons des pistes de recherches.
DIFFÉRENTS MODÈLES DE CONCEPTIONS DE LA FORMATION
Comme dit plus haut, le béhaviorisme et le cognitivisme semblent coexister au sujet du développement des compétences. Le premier développerait des compétences de reproduction, plus liées aux activités d’exécution répétitive, automatisée (Aubret, Gilbert et Pigeyre, 1993). Le deuxième développerait des compétences transférables à plus long terme qui se ferait par la résolution des problèmes auxquels l’élève doit être soumis. La connaissance de ces deux tendances nous amène à circonscrire d’abord la notion de conception avant de décrire quelques conceptions de la formation. Dans la présente étude, le terme conception doit être entendu comme une « manière particulière de comprendre une question (…), idée que l’on peut se faire de quelque chose » (Grand Larousse Universel, 1988, p.2477). Dans une vison plus large, « les conceptions forment un tout où se mêlent connaissances scientifiques, croyances, idéologies, fonctionnalités sociales, dimensions rationnelles et esthétiques, émotionnelles, affectives… » (Clément, 1994, p.24). Les conceptions sont donc, en permanence, confrontées par nos pratiques humaines et constituent, à ce titre, le produit de notre histoire individuelle, forcément influencée par notre culture, notre environnement physique et social. On ne peut dire d’une conception qu’elle est fausse ni vraie. Elle est simplement la compréhension du moment. Ainsi, nous nous sommes intéressé au « je fais » dans la mesure où cela renvoie aux comportements et attitudes de l’enseignant plutôt au « je suis » qui serait lié au fonctionnement psychique qui lui donne le sentiment d’exister en tant qu’être.
En s’appuyant sur les travaux de Porlàn, Garcia, Rivero et Martin (1998) et Koliopoulos et Ravanis (1998), nous avons retenu quatre modèles de conceptions de la formation à savoir : le modèle traditionnel, le modèle technologique, le modèle spontanéiste et le modèle constructiviste. La description des catégories comme la place des objectifs, l’organisation des contenus, les stratégies d’intervention pédagogique et d’évaluation des apprentissages nous permettent de situer les conceptions des enseignants dans chacun des modèles susmentionnés. À partir de la figure 1, suivant la conception qu’il a sur les catégories retenues, nous formulons l’hypothèse que si un enseignant est influencé par la psychologie béhavioriste, il ferait alors développer chez l’élève les compétences d’imitation. En contrepartie, un enseignant qui a une tendance cognitiviste ferait développer soit les compétences de transposition, soit les compétences d’innovation.
Nous terminons cette partie par le tableau de synthèse ci-après qui nous donne une vue synoptique des conceptions des enseignants au regard de la littérature et nous aide dans l’analyse des verbalisations.
Tableau 10 : Synthèse des modèles de conceptions de la formation
Catégorie | CONCEPTION | ||||
Traditionnelle | Technologique | Spontanéiste | Constructiviste | ||
Objectifs |
En quantité et servent à définir chaque séquence d’enseignement | Re-contextualisation en fonction de l’évolution des besoins et la
discipline. |
D’autres peuvent s’ajouter. | Fort besoin d’aller au-delà des objectifs de formation normalement prévus | |
Contenus |
Reproduction des connaissances de la discipline et fort besoin de couvrir l’ensemble du
programme |
Adaptation contextuelle de la discipline au plan scolaire |
Réélaboration et intégration des connaissances en provenance de différentes sources. | ||
Enseignements |
Se situe au niveau de la transmission pendant que l’élève écoute sagement. Interventions fréquentes de l’enseignant qui joue le rôle
d’entraîneur. |
Une activité technique plutôt rigide mais en constante évolution. | Se situe dans un contexte de médiation entre les connaissances et les élèves. | Vu comme la recherche de problèmes d’intérêt potentiel pour être porteur de sens. | |
Apprentissage |
Une reproduction. L’élève doit réaliser les activités suivant le modèle enseigné et reproduire les mêmes
attitudes de l’enseignant |
Par construction graduelle des connaissances. | Se base sur l’intérêt de l’élève et sert de fil conducteur à la
formation. |
À partir des idées des élèves, ce qui guide l’enseignant à orienter la formation en fonction des besoins des apprenants | |
Évaluation |
Porte sur le résultat et permet de vérifier que toutes les consignes ont été respectées. | Vue comme une mesure du degré d’atteinte des objectifs, elle porte sur les savoirs et les savoir-faire | Vue comme participation à la dynamique de la classe et porte sur les stratégies utilisées. | Axée sur la construction des savoirs, elle porte sur l’évolution réelle des conceptions des élèves et consiste en la recherche d’un ajustement constant de la part de l’enseignant. |
CADRE MÉTHODOLOGIQUE
Tout en restant dans l’optique d’une recherche qualitative, nous avons fait le choix d’une étude ethno- méthodologique pour quatre raisons. La première raison est que cette étude se veut pratique. Aussi s’intéresse-t-elle aux activités, aux circonstances et au raisonnement pratique, professionnel ou profane qui guide les acteurs. Il s’agit donc d’une recherche empirique sur les méthodes que les individus utilisent pour donner sens et en même temps pour accomplir leurs actions de tous les jours (Coulon, 1993). La deuxième raison est dans le principe de l’indexicalité selon lequel les activités des membres se construisent à travers le langage quotidien et un mot a non seulement une signification trans-situationnelle, mais également, une signification relative au contexte dans lequel il a été utilisé (Coulon, 1993).
La troisième raison réside dans le principe de la réflexivité qui postule que les acteurs reconnaissent, démontrent et rendent observables à chacun des autres membres le caractère de leurs pratiques concrètes. Ils ont pour rôle de livrer leur savoir-faire, leurs règles de conduites et leurs procédures, dire ce qu’ils font. Plutôt que d’appliquer les procédures dans l’action, ils formulent leur code de procédures. Ainsi, par l’acte même de dire, l’acteur construit le code. La dernière raison est dans la notion de membre. En ethnométhodologie, être membre, c’est maîtriser un langage commun avec d’autres membres. En connaissant la pratique de l’intérieur, l’enseignant dispose également de la compétence requise pour l’analyser. Ce positionnement succinct nous guide dans la suite des choix méthodologiques.
Collecte de données
L’entrevue semi-structurée a été retenue comme technique de recueil de données. Ce choix part du postulat que les conceptions ne sont pas directement observables mais elles peuvent être inférées, reconstruites à partir des traces telles que les verbalisations. Les entrevues ont été menées avec une certaine souplesse liée au déroulement et à la forme des questions contenues sommairement dans le guide d’entrevue.
Échantillonnage
Pour diversifier les propos, nous avons sollicité les enseignants qui a) utilisent les programmes par compétences élaborés par le ministère de l’Éducation du Québec, b)travaillent en Estrie dans le secteur de la formation professionnelle et c) ont une expérience d’au moins deux ans dans l’enseignement. Le tableau 2 ci-après donne les caractéristiques des interviewés. Leur nombre n’a pas été arrêté au départ. C’est plutôt par le concept de la saturation de l’information que nous avons dû arrêter à 10.
Tableau 11 : Caractéristiques de l’échantillonnage
Participants | Sexe | Secteur de formation | Expérience de travail | Expérience en enseignement |
En01*33 | F | Production laitière | 07 ans | 05 ans |
En02 | F | Horticulture | 10 ans | 10 ans |
En03 | M | Mécanique automobile | 10 ans | 23 ans |
En04 | M | Mécanique industrielle | 30 ans | 04 ans |
En05 | M | Soudage | 05 ans | 10 ans |
En06 | M | Charpenterie | 12 ans | 03 ans |
En07 | M | Ébénisterie | 02 ans | 05 ans |
En08 | M | Fabrication de moules | 04 ans | 08 ans |
En09 | F | Esthétique | 08 ans | 05 ans |
En10 | M | Métallurgie | 04 ans | 20 ans |
2.3 Traitement et analyse des données
Les entrevues enregistrées ont été transcrites mot à mot. L’ensemble des matériaux bruts représentait près de 110 pages à interlignes simples. Un traitement particulier des transcriptions, inhérent aux spécificités du logiciel Nud.Ist, était nécessaire avant l’importation du texte sur le logiciel de manière à permettre le codage. L’analyse a été faite par thématisation à l’aide du même logiciel par la constitution d’un corpus à partir des données empiriques en mettant en veilleuse notre a priori, la mise des unités textuelles dans des regroupements communs et l’analyse des catégories de chacun des discours pour parvenir à des sous-catégories.
33 Codes d’identification attribués aux participants
RÉSULTATS
Contact avec les programmes par compétences
Nous précisons que l’analyse a révélé deux groupes d’enseignants. Ceux ayant connu la transition entre les programmes par objectifs et les programmes par compétences et ceux arrivés dans l’enseignement après l’implantation des nouveaux programmes. Pour les premiers, alors que les programmes par objectifs n’étaient pas encore tout à fait assimilés, est-on passé aux programmes par compétences [En 02, En 03].
La passerelle ne semble pas établie même s’ils reconnaissent une meilleure traduction de ces nouveaux programmes. Avant ça, on parlait plutôt de l’approche par objectifs. C’est, entre parenthèse, et c’est mon avis, ça veut dire la même chose. Les approches par compétences c’est peut-être mieux défini par contre que les objectifs [En 03]
Avant, on parlait plus d’objectifs terminaux, d’objectifs spécifiques. On parlait plus d’évaluation formative, sommative. Encore là, ce n’était pas encore clair dans nos têtes…[En 02]. Pour le deuxième groupe [En 01, En 04, En 05, En 06, En 07, En 08, En 09, En 10], c’est en arrivant qu’ils ont fait connaissance avec ces programmes, parfois sans formation à ce sujet. L’approche par compétences, je ne connaissais pas ça du tout, du tout,, cette approche-là avant de rentrer ici en enseignement. [En 06]. C’est vraiment quand j’ai commencé à enseigner. Avant ça, je n’étais pas au courant. Je sais que j’avais déjà suivi des cours des années passées. Ok ! Mais je ne connaissais vraiment pas le principe de l’approche par compétences. [En 10]
Adaptation au fil du temps
Ces premiers contacts avec les programmes traduisent sans doute les problèmes de transitions et d’appropriation des contenus des programmes. Chacun avec son histoire évoque l’appropriation des programmes. Histoire où se mêlent difficultés de début, absence d’outils de transition entre la carrière en industrie plus pratique et la nouvelle à connotation pédagogique. C’est parfois à une application au premier degré des programmes qu’ils ont fait usage pour, plus tard et au fil des ans, tirer les leçons du passé à propos de cet apprentissage du coup par coup, par essai erreur.
Parce que, moi, c’est sûr, j’avais trouvé ça dur quand j’ai commencé à enseigner. J’avais commencé à tomber là… tu sors de l’Industrie, puis le marteau. Ça fait vingt ans que tu n’as pas été à l’école puis tu vas commencer à enseigner. [En 10]
(…) Au début de mon enseignement ce n’était pas évident, mon approche vu que je ne l’avais pas vécue et l’enseigner comme ça, ça a demandé une transition… Là, on apprend une expression là sur le tas. On y va, puis on plonge, puis on essaie. J’ai fais des erreurs. J’ai pas traumatisé personne mais, je veux dire, des fois, je partais là sur une façon d’enseigner. [En 01]
(…) Mais, au début, je te dirais que moi et puis l’autre prof, quand on a commencé à enseigner, on nous a présentés tous les documents du Ministère : Le programme d’études, le tableau d’analyse et de spécification, le guide du matériel pédagogique, etc., etc., ce que ça prenait à partir du programme. Mais avant qu’on en prenne conscience que c’était une approche par compétences, ça a dû aller deux ou trois ans après. On en parlait mais sans en être conscient de nos actes d’enseignement. [En 09]
Les conceptions des enseignants
Comme le montre le tableau 3 ci-après, les enseignants chevauchent entre les différentes conceptions. Ils ont une conception semi-traditionnelle de la formation. Elle se résume par l’application des multiples objectifs contenus dans les programmes et les évaluations qui tentent de vérifier chaque petit objectif. L’analyse des matériaux indique que les enseignants font ce choix par saupoudrage, afin de rester conformes aux exigences ministérielles. En effet, les objectifs qui figurent sur les plans de cours ne sont pas toujours ceux enseignés car, les enseignants ont le souci de combler les désirs des opérateurs économiques.
Tableau 12 : Synthèse générale des conceptions par rapport aux objectifs(Ob), aux contenus (Co), à l’enseignement (En), à l’apprentissage (Ap) et à l’évaluation (Ev).
Part. |
Ob |
Co |
CTRAD
En |
Ap |
Ev |
Ob |
Co |
CTECH
En |
Ap |
Ev |
Ob |
Co |
CSPON
En |
Ap |
Ev |
Ob |
Co |
CCONS
En |
Ap |
Ev |
En01 | X | X | X | X | X | X | X | X | X | |||||||||||
En02
En03 |
X
X |
X | X
X |
X
X |
X
X |
X |
X |
X |
X |
X |
X
X |
X | X | X
X |
X |
X | ||||
En04
En05 En06 |
X
X X |
X |
X |
X
X X |
X |
X X |
X | X
X X |
X |
X | X
X X |
X
X |
X |
X |
X X |
X
X X |
X |
X |
||
En07
En08 |
X
X |
X
X |
X | X | X
X |
X | X |
X |
||||||||||||
En09
En10 |
X
X |
X |
X
X |
X |
X |
X
X |
X | X | X | X | X |
Légende : CTRAD : Conception traditionnelle ; CTECH : Conception technologique ; CSPON : Conception spontanéiste ; CCONS : Conception constructiviste
De cette application superficielle apparaît une orientation des programmes vers d’autres conceptions (technologique, spontanéiste et constructiviste) de la formation et ce, non sans éprouver certains conflits. Les enseignants pensent que les critères de performance retenus sont parfois en deçà quand ils ne sont pas vagues ou trop subjectifs. Les quotas horaires des modules semblent être fixés aléatoirement. D’où parfois la réorganisation des modules en prenant en compte les données de terrain. Les contenus proposés sont dépassés disent-ils alors que les opérateurs économiques sont à la recherche des élèves formés à la fine pointe. D’une manière générale, les enseignants n’utilisent pas souvent les stratégies et les contenus proposés et se réfèrent rarement aux programmes.
Le guide pédagogique… ça fait longtemps que ça traîne sur mon bureau. [En 02]
Moi, je ne suis pas familier beaucoup avec les programmes. [En 04]
(…) Moi, les programmes, je ne les lis pas bien, bien. C’est ça qui arrive pour nous autres. (…) Le programme même, ça a été fait pour atteindre une certaine compétence. Mais il y a rien là-dedans. C’est juste du blabla. [En 04]
Les enseignants relèvent aussi des carences dans l’absence des contenus pour enseigner les savoir- être. Même quand ils les enseignent, ils ne sont pas retenus dans l’évaluation et les élèves s’en rendent compte. Cette situation inconfortable des enseignants conduit les élèves à ne considérer que les aspects évaluables.
Avoir le souci du travail bien fait, c’est du comportemental. Ça, c’est pas évalué. Avoir le respect des équipements, ça aussi c’est du comportemental, ça non plus ce n’est pas évalué. On dirait que les étudiants s’en rendent compte rapidement qu’ils ne sont pas fous, que sur les huit objectifs qu’on met là, il y en a seulement que deux (2) que l’évaluation va être portée. Là, ils vont mettre l’emphase là- dessus. Le reste là… c’est comme si c’avait pas d’importance. C’est ce que je trouve difficile dans cette approche également, dans cette approche par compétences. [En02]
Au regard de ces difficultés, les enseignants semblent poser le problème du mythe du bureaucrate qui serait déconnecté des réalités du terrain. Ce mythe se traduit par la présence de deux camps : Celui des concepteurs et celui des exécutants. Ce mythe est-il présent au Gabon ?
EXPLOITATION GABONAISE DES RÉSULTATS
De manière à atténuer ces difficultés, le Gabon a suivi une démarche visant à soutenir régulièrement les enseignants dans la mise en application des programmes par compétences au BEP (Mouila et Franceville) et à les faire participer dès la rédaction du nouveau programme menant au Diplôme de l’École Nationale de Commerce (DENC) de Port-Gentil.
Soutien psychopédagogique
Dans le cadre des programmes du Brevet d’Études Professionnelles, la conception a été entièrement faite au niveau de l’Administration centrale. Avant l’implantation, les enseignants ont été invités à rédiger les plans de module avec l’aide des conseillers pédagogiques. Une fois le programme implanté, les missions permanentes sont toujours nécessaires à chaque début et fin de trimestre pour soutenir les enseignants dans l’appropriation des outils du programme (Fiches module, fiches d’évaluation et grilles d’appréciation), la planification de chaque module et dans le processus conduisant à l’évaluation des apprentissages. Malgré tout le soutien pédagogique, les problèmes demeurent. Les enseignants éprouvent encore des difficultés d’adaptation face aux changements survenus dans le recoupement des modules et la nouvelle vision de l’enseignement/apprentissage. D’où certaines résistances.
Méthode collégiale de rédaction du programme de l’ENC
Compte tenu des résistances observées dans l’implantation des programmes du BEP, nous avons adopté, pour l’ENC, une démarche visant à intégrer les avis et l’expertise des enseignants dès l’élaboration du programme. A l’application, les enseignants se sont sentis valorisés et nous n’avons pas observé les mêmes résistances qu’en BEP. N’empêche que les problèmes pédagogiques suite au changement de paradigme persistent malgré le soutien pédagogique constant.
CONCLUSION
A la lumière des évocations des enseignants et de l’expérience gabonaise qui mérite d’être documentée, il y a vraisemblablement un tâtonnement où l’on perçoit que les enseignants sont à cheval entre les courants béhavioristes et cognitiviste. De ce tâtonnement, nous avons retenu trois phénomènes problématiques. Primo, la « pluri-dimensionnalité » de la compétence qui inquiète les enseignants car devant observer plusieurs facettes non stables (variabilité du comportement cognitif et affectif des élèves, évolution technologique à rattraper malgré des programmes figés, contrôle du temps fixé d’avance, etc.). Deusio, l’imprévisibilité des groupes qui donne parfois lieu à un éternel recommencement. Pour les enseignants, il devient difficile de définir les outils sans connaître la clientèle. Tertio, le jugement intuitif qui se manifeste par l’application tous azimuts des programmes (Coquidé, 1998). Comme l’observe Huberman (1973), il s’agit pour les enseignants de récuser un modèle préétabli en s’orientant vers l’improvisation, le tâtonnement.
La présence des croyances et des habitudes interpelle les acteurs pour une clarification. Ce dont nous sommes certains, dans un cas comme dans l’autre, ce que les enseignants ne lisent pas les outils de programme qui sont mis à leur disposition.
C’est pourquoi, tout en étant conscient que cette étude ne peut être généralisée, nous pensons que des recherches plus documentées peuvent contribuer à éclairer la problématique de l’application des programmes par compétences dans l’enseignement technique et professionnel, surtout pour les pays comme le Gabon qui se trouve dans une phase d’expérimentale.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Clément, P. (1994). Représentations, conceptions, connaissances. In A. Giordan, Y. Girault et P.
Clément (dir.), Conceptions et connaissances (p. 15-45). Berne : Peter Lang.
Coquidé, M. (1998). Les pratiques expérimentales : propos d’enseignants et conceptions officielles.
ASTER, 26, 109-132.
Coulomb, A. (1993). Ethnométhodologie et éducation. Paris : PUF.
Désilets, M. et Brassard, C. (1994). La notion de compétence revue et corrigée à travers la lunette cognitiviste. Pédagogie collégiale, 7(4), 7-10.
Désilets, M. et Tardif, J. (1993). Un modèle pratique pour le développement des compétences.
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Grand Larousse universel (1988). Grand dictionnaire encyclopédique Larousse. Paris : Larousse. Huberman, A. M. (1973) Comment s’opère les changements en éducation : contribution à l’étude de l’innovation. Bureau internationale de l’éducation : UNESCO.
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Moukagni, F. (2000) Les conceptions des enseignantes et des enseignants du secteur professionnel relativement aux programmes par compétences. Mémoire présenté à la faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke, Sherbrooke (Québec).
Noiseux, G. (1997). Traité de formation à l’enseignement par médiation : Les compétences du médiateur pour réactualiser sa pratique professionnelle (Tome 1). Sainte-Foy : MST Éditeurs.
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- Marouf (dir.), Le travail en question (p. 73-120). Paris : L’Harmattan.
Saint-Onge, M. (1995, juin). L’approche par compétences : Ses problèmes et nos solutions. Communication présentée lors du 15e colloque de l’AQPC, Rivière- du-loup (Québec).
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